Déjà perçus par le fœtus in utero, ces mouvements vibratoires rythmiques définissant le son précèdent le sens de la vue. Ainsi, avant de discerner le monde, le petit d’Homme en possède une connaissance auditive. Les traditions spirituelles considèrent d’ailleurs que la vibration sonore est à l’origine de la Création et transmettent qu’« Au commencement était le Verbe »…
Les sons nous fascinent ou nous dérangent, nous bercent ou nous éveillent. De simples bruits peuvent, par l’écoute singulière de l’artiste qui sommeille en chacun, devenir musique et prendre soudainement une dimension inattendue. Peut-être est-ce d’ailleurs là que se situe aussi l’un des sens de la bonne nouvelle de l’Évangile : Que ceux qui ont des oreilles entendent… ? Ainsi, l’Inde éternelle considère le son comme étant à l’origine du cosmos, possédant un aspect non manifesté (parâ : le silence), subtil (pashiantî : la vibration) et articulé (vaikharî : le langage). Dans toutes les cultures, l’art musical consiste à conjuguer ces trois qualités de manière à obtenir certains résultats.
Des effets psychosomatiques
Si la matière originelle de la vibration sonore reste universelle, les différences géographiques et historiques ont enrichi la manière d’appréhender son pouvoir mais aussi de le maîtriser et de l’utiliser. Dans la légende d’Homère, il nous est conté qu’Ulysse est prévenu que le chant des sirènes abrite un pouvoir séducteur et peut engendrer des conséquences du point de vue du comportement. La musique militaire agit sur la combativité du soldat, tandis que l’objectif d’une
nocturne de Chopin ou d’une chanson de variété cherche à stimuler chez l’auditeur un tout autre état émotionnel. De fait, les sons deviennent des outils logeant une dimension au service salvateur du psychosomatique, dont les effets sont en prise directe avec les corps et les esprits.
Des applications positives
Le musicien américain David Hykes popularise dans les années 90 le chant harmonique, une technique vocale consistant à utiliser savamment la cavité bucco-nasale pour produire plusieurs sons (polyphonie), le corps devenant l’instrument naturel par excellence. Issues des chants traditionnels mongols et tibétains, on retrouve également ces techniques dans les chants polyphoniques corses. Le principe consiste à laisser jaillir, à partir d’une note fondamentale grave, les harmoniques aiguës naturelles. Il se trouve que cette pratique ancestrale véhicule des vertus thérapeutiques, rééquilibrant l’énergie subtile du pratiquant. Le thérapeute Alfred Tomatis s’est rendu compte de l’importance, pour l’équilibre de l’individu, de ces vibrations.
La voix, expliquait-il,
n’émet que les harmoniques que l’oreille peut entendre. Il a fondé alors sur cette découverte une méthode de rééducation, appelée
audio-psycho-phonologie, visant à la restitution de certaines fréquences, à l’aide d’ateliers audio-vocaux. Ses applications se révèlent, toujours aujourd’hui, très positives dans les domaines de l’apprentissage scolaire mais également pour les sujets manquant de confiance en soi.
La musicothérapie
Paradoxalement, la musicothérapie entre dans le cadre des psychothérapies utilisant la musique comme médiation dite muette ! Muette dans le sens où elle permet aux sujets présentant des difficultés de communication de passer par l’univers musical pour exprimer leurs émotions. Cette discipline est appelée
musicothérapie active lorsque le patient se sert d’un instrument (percussions, piano, synthétiseur ou autres…) et
musicothérapie passive quand le choix du support se porte sur des enregistrements sonores. L’aspect thérapeutique consiste à mettre en lien la production musicale avec la résolution de la problématique à l’origine de la consultation. Le thérapeute peut éventuellement être musicien mais ce pré-requis n’est en aucun cas obligatoire. Le musicothérapeute, par sa connaissance du fonctionnement psychique conscient et inconscient, guide la séance en fonction d’un axe précis et la conclut par une interprétation verbale, c’est-à-dire en donnant à entendre un sens singulier, évolutif et libérateur pour son consultant.
Martine Guillet
