La sexualité étant indissociable de la notion de désir, la routine pouvait effectivement nous guetter. Aussi, nos sociétés modernes ont-elles fait voler en éclats nos prudes certitudes en la matière. Mais sommes-nous devenus plus libres pour autant ?
Depuis le slogan « Faites l’amour, pas la guerre ! » de mai 68 et le tout aussi célèbre « Il est interdit d’interdire », les propositions abondent. Le Kama Sutra est devenu en Occident une référence. Toutes les positions y étant répertoriées. Le tantrisme s’exporte bien, les clubs échangistes ont le vent en poupe. Il est même possible de vivre nos fantasmes les plus fous via des mises en scène S. M. Comble du paradoxe, le bondage (du verbe anglais to bind, lier) est une pratique érotique qui consiste à contraindre, d’une manière ou d’une autre, son/sa partenaire. Il s’agit de contraindre le corps dans sa totalité ou en partie. Généralement à l’aide de cordes et de bâillons. Mais aussi de bandes adhésives, de lanières, de chaînes, ou de tout autre ustensile apte à exercer une emprise sur la ou les partie(s) du corps concernée(s). Doit-on vraiment tout essayer pour arriver au septième ciel ? Jusqu’où pouvons-nous aller pour être libéré sexuellement ?
De quelle liberté s’agit-il ?
Pour Sigmund Freud, les origines du comportement humain sont enracinées dans une énergie dite psycho-sexuelle : la libido. Sa théorie révolutionne une image de soi séculaire. La pudeur victorienne est remplacée par une nouvelle conscience du désir sexuel. Un de ses disciples, le psychanalyste Wilhelm Reich, va plus loin et publie en 1945 « La révolution sexuelle ». Il y critique scientifiquement le moralisme sexuel, source de bien des névroses autant individuelles que collectives. Proche des idées marxistes, il assure qu’une révolution culturelle sans révolution sexuelle ne saurait être radicale. Ce qui lui vaudra d’ailleurs les foudres de l’institution communiste. Parler de sexualité était encore trop dérangeant, confondue qu’elle était avec la notion de sexe. Pour Reich pourtant, la pornographie (du grec
pornográphos de
pórnê, prostituée, et
gráphô, décrire), accessible aujourd’hui à tout un chacun, n’est pas le signe d’une véritable libération sexuelle. Elle est plutôt un commerce du sexe, organisée pour les hommes et par des hommes, pouvant engendrer des addictions au même titre que le tabac ou l’alcool. L’image de la femme n’en ressortant d’ailleurs pas embellie…
Une sexualité épanouissante ne doit certes pas s’enfermer dans la routine. Cependant, à trop vouloir innover, le couple peut en oublier spontanéité, sensibilité et véritable créativité. Ainsi il n’est pas utile de tout connaître en terme de techniques amoureuses pour accéder au
nec plus ultra de la relation érotique. Beaucoup de couples en arrivent aujourd’hui à se considérer hors norme s’ils ne correspondent pas aux canons véhiculés par les
médias (en terme de nombre de rapports hebdomadaires, de durée, de techniques etc.). Comme si seul un savoir-faire en la matière avait le pouvoir de donner la recette de l’amour. Tout au plus peut-on puiser de l’inspiration en étant interpellé par certaines pratiques érotiques, à condition que le désir de chacun soit déjà là. Explorer de nouveaux domaines, s’ils sont en adéquation avec la sensibilité érotique des partenaires et s’ils ne sont pas subis par l’un ou par l’autre, peut amener un regain de volupté. Mais attention à ne pas réduire la rencontre amoureuse à de simples recettes gymniques. Découvrir ensemble des sensations nouvelles demande une confiance mutuelle permettant un vrai lâcher prise. N’oublions pas que dans l’acte d’amour, il est question de don de soi
. Et cela concerne tout autant l’homme que la femme. Aussi, la performance n’est-elle pas le seul ingrédient à prendre en compte. Faire l’amour, même si cela passe par le corps, n’est pas un exercice sportif. Faire l’amour, au contraire, est l’occasion d’une fête des sens où le rapport dominant-dominé doit laisser la place à une complémentarité mise au service du seul Éros. Et si l’orgasme est appelé parfois la
petite mort, il s’agit bien sûr pour chacun de mourir à la culpabilité d’être vivant, c’est-à-dire à tout sentiment de haine aussi masqué soit-il…
Comment être créatif
Il existe moult manières de combattre l’usure du désir qui guette tous les couples vivant ensemble depuis des années. C’est là que la créativité prend tout son sens et que le besoin de nouveauté se fait ressentir. Voici quelques suggestions parmi d’autres qui peuvent réveiller la spontanéité amoureuse:
> assouvir une pulsion dès qu’elle se présente peut tuer le désir. Celui-ci a besoin d’être élaboré. Aussi ne devrait-on jamais se hâter. L’amour est à réinventer chaque jour. Pourquoi, comme le suggère Gérard Leleu, sexologue, ne pas se donner par exemple rendez-vous dans un hôtel, comme deux amants qui se retrouveraient en secret. L’excitation et la complicité auront tout à y gagner. Attachez de l’importance à la façon de vous vêtir. Sans être un adepte du
paraître, votre comportement vestimentaire peut déclencher chez votre partenaire rejet ou attirance. Rappelez-vous l’attention que vous lui portiez au début de votre relation. Vous n’êtes pas dispensé(e) de le ou la séduire encore, même après des années de vie commune. Une soirée au restaurant en tête-à-tête peut aider à lâcher prise du quotidien et préparer une rencontre plus intime. Se sentir aimé(e) ne va pas de soi, on aime se l’entendre dire. Alors, dites-le lui ! Se sentir désirable permet de désirer. Rien n’est acquis une fois pour toutes. Vous avez à reconquérir votre partenaire. La rencontre n’est pas définitive. Sachez redécouvrir. Regardez cette personne avec qui vous avez choisi de faire un bout de chemin. Réapprenez à embrasser, à caresser… Il n’y a évidemment pas de techniques miracles. Tout est possible, si l’amour est au rendez-vous. Être libre d’innover en sexualité, c’est aussi abandonner radicalement l’idée que la relation amoureuse et sexuelle relève du
devoir conjugal. Sauf si on y entend
deux voir…
Coralie Roux
Petit guide amoureux
Quand le lien affectif fait l’élastique ou se distend carrément, il faut réagir… au plus vite ! Un ABC élémentaire vous y aidera efficacement.
A – Être le premier
Manifestez vos désirs sans attendre que votre partenaire le fasse en premier. Quel que soit votre sexe !
B – Être romantique
Notre époque oublie – pour notre plus grand désarroi – que les petites attentions répétées font plus qu’un gros cadeau toutes les décennies : une simple rose ou un livre choisi en pensant à ses goûts relance la dynamique de l’amour.
C – Être libre
La jalousie est un vilain défaut ! Autorisez-vous une activité bien à vous. L’autre fera, à coup sûr, la même chose. Vos échanges seront amplifiés. Votre vie affective sera riche. De plus en plus.