Les temps ont bien changé ! Jusqu'aux années 1970, il était de bon ton de masquer le plus possible sa grossesse par des tenues amples et aucune femme n'allait en consultation gynécologique sans une combinaison. Le problème, et comme toujours, ce sont les extrêmes. La psychorigidité dans ce domaine a fait place peu à peu aux " débordements " : la mode vestimentaire des femmes enceintes a basculé du côté du droit à afficher son ventre arrondi dans la rue, nombril à l'air et poitrine offerte durant la période estivale, alors que l'hiver les tenues ultra-moulantes annoncent, mais sans aucune esthétique de base, la venue d'un heureux événement... Dommage, car belle en attendant bébé c'est tout à fait possible mais à condition de respecter les fondamentaux...
Si l'on en croit les psys, tout ce que nous revendiquons trop fort, empiétant manifestement sur le territoire d'autrui, traduit un malaise intérieur. Il est vrai que les médias, véhiculant tous azimuts la difficulté de trouver sa place en ce XXIème siècle, peuvent devenir des agents contaminants... Cependant, si une femme enceinte a maintenant compris - grâce à la médecine - qu'il est déconseillé qu'elle mange " pour deux ", il est regrettable que la maternité soit utilisée comme un pouvoir, une domination, un faire-valoir... Ces véritables processus défensifs paradoxaux, du haut de leur contradiction, brandissent sans retenue une zone abdominale dorénavant " occupée " pour quelques mois mais avec l'intention ferme de transmettre en parallèle un " Touche pas à mon ventre ! " déconcertant à plus d'un titre... Quoi qu'il en soit et dans le registre de la prénatalité en particulier, j'adhère tout à fait au proverbe italien qui fait sens notamment ici en assurant que " la beauté du ciel est dans les étoiles, tandis que la beauté des femmes est dans leur chevelure "... Je rejoins d'autant plus cette vérité que les codes de joliesse insistent, avec un discernement approprié, sur la sagesse de mettre en valeur ce qui magnifie. J'entends déjà des voix féminines, voire féministes, s'élever, me rappelant - si je l'avais oublié - qu'une grossesse c'est superbe et là, à mon tour, je m'insurge en répondant " NON " : une grossesse c'est attendrissant, c'est doux, c'est miraculeux mais ce n'est pas ma-gni-fi-que ! Une objectivation tend d'ailleurs à le prouver : certains futurs papas, qui seront alors facilement étiquetés de grands névrosés, connaissent des angoisses qui augmentent au fur et à mesure que leur compagne, en devenir de mère, prend un kilo par mois, ou bien davantage... Et si, justement, pour apaiser ces messieurs qui attendent avec anxiété de voir leur univers habituel modifié et même chamboulé, leur " aimante " leur faisait don d'un spectacle plus rassurant ? Il s'agit de celui de leur visage, lieu où l'amour se lit spontanément, à la faveur de " la puissance lumineuse d'un sourire ", comme l'exprime avec élégance l'écrivain Christian Bobin. Ou encore André Maurois qui rappelle qu'il n'y a " point de plaisir plus vif qu'un visage qui nous est cher, illuminé par la joie d'un souhait exaucé "... Cet enchantement, ce cadeau de la nature, souligne sans artifice que ce désir d'enfant est la convergence et la résultante d'un désir de couple où l'imposture et l'exclusion ne sont pas de mise...
Fanchon Picaud