Mieux connaître... Paul Cézanne (1839-1906) Il est certaines origines familiales qui permettent de développer son talent. Mais encore faut-il en avoir ! Aucun doute pour ce qui est de Cézanne qui, s’il bénéficie d’une aide financière plus que précieuse de son père, banquier, reste un sujet doué. À 19 ans, le baccalauréat en poche, il décide de faire du droit. A-t-il foncièrement été influencé par Zola qu’il avait fréquenté lors de ses études au Collège Bourbon d’Aix-en-Provence quand il prend la décision de se consacrer à la peinture ? On peut le supposer car les deux amis entretiennent une correspondance assidue et dirigée vers la notion d’indépendance humaine. Cependant, comme le donne à voir son travail alors restitué dans les Quatre Saisons, les débuts d’artiste de Paul sont maladroits… Il en est conscient, abandonne quelque temps pinceau et couleurs, rejoignant l’univers paternel de la banque ! Pourtant, l’indécis ne perd jamais de vue les grands représentants de l’art pictural, ce qui le conforte définitivement dans le souhait et la volonté de devenir un peintre reconnu à son tour. Les hésitations de Cézanne se manifestent sur la toile. Il en est conscient, au point de parler de sa « couillardise »… Son anxiété le déborde aussi, sa palette d’alors apparaît pesante : il reste tout aussi gauche lorsqu’il se lance dans des évocations érotiques. Cézanne se cherche mais sa culture large va lui permettre de se trouver. Enfin. Car le trait fort et assuré ne doit pas grand’chose – au fond – à ses influences baroques italiennes. Malgré ce, il s’intéresse aux impressionnistes et s’impose même de vivre à Auvers-sur-Oise où se trouve Pissarro. L’amour est au rendez-vous et Hortense Fiquet le fait père d’un garçon. L’ambiance est riche culturellement. Finalement, Cézanne est un passionné, un fou de peinture. La Maison du pendu laisse deviner que ce peintre français a du génie dès qu’il se tient devant sa palette. D’ailleurs, il fait tomber les reliquats d’une éducation rigide et les influences de la bonne bourgeoisie. Les corps se dénudent, osant représenter le monde caché des baignades. Toutefois, Cézanne demeure insatisfait. Il ne se sent jamais bien là où il se trouve. Il bouge beaucoup géographiquement et n’assume pas vraiment sa paternité. Son père l’apprend, ne comprend plus du tout son héritier et finit par ne plus le soutenir financièrement. Mais rien n’arrête les besoins de l’artiste qui le poussent toujours davantage à fréquenter les sujets les plus doués de son époque : Renoir, Monticelli, Monet… Il les cherche, les trouve, crée des liens et évolue toujours davantage. Cézanne excelle : son geste peut être raffiné (Vase bleu) ou méticuleux – voire compulsif et obsessionnel (La Montagne Sainte-Victoire). Mais Cézanne reste un grand névrosé. Tour à tour colérique et distant, ses problèmes familiaux, affectifs ou amicaux – telle sa brouille avec Zola – retentissent défavorablement sur lui et sur son entourage. L’homme s’enferme progressivement. Notamment vers la fin de l’année 1886, date du décès de son père. Et puis le peintre n’attire pas vraiment de reconnaissance dans le milieu artistique, ce qui n’arrange en rien son déséquilibre psychologique. Pourtant, Gauguin sent que Cézanne va apporter sa touche à l’histoire de la peinture. Les Nabis le suivent. Puis c’est au tour de Vollard de pressentir que l’artiste va jouer dans la cour des Grands. En 1900, Paul Cézanne expose dans des endroits prestigieux, ses œuvres commencent à se vendre à des prix intéressants. L’homme prend soudain une véritable assurance. Il sait – et le dit – qu’il aura sa place dans les musées… La liste est longue de ses audaces picturales qui marquent aujourd’hui encore les courants artistiques didactiques : ses merveilleux Joueurs de cartes, son Garçon au gilet rouge, ou encore son Lac d’Annecy, constituent à eux seuls la personnalité devenue dorénavant incontrôlable de cet obstiné. On se déplace pour vérifier que l’homme n’est pas un mirage et que sa trempe fera autorité. Les Cubistes s’en inspirent, les Fauves aussi. La ténacité a payé : Paul Cézanne laissera plus de 1000 peintures, sans compter 500 aquarelles, œuvres dont beaucoup sont réparties dans les musées les plus prestigieux du monde.
Ivan Calatayud
|
Mentions légales Signesetsens.com ©