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Le développement personnel
dans Signes & sens
Créer sa propre image,
un défi libérateur
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S’il est évident que le choix vestimentaire est en relation avec l’idée d’une image à renvoyer, il n’en demeure pas moins un vrai casse-tête quotidien. S’habiller représente un acte répétitif qui coûte en temps, en argent et donc en énergie. Serait-il ainsi un moyen de s’acquitter d’une dette symbolique inconsciente ?
Nous ne choisissons pas nos vêtements par hasard. Cette inclination est guidée par des identifications passées et présentes. Elle peut être d’ailleurs le résultat d’une lutte entre plaisir et interdit, s’étayant de fait facilement sur un complexe ! Cette situation conflictuelle entraîne parfois des comportements vestimentaires atypiques, originaux, repérables comme un trouble de l’apparence. C’est toujours le moi, l’extériorité corporéisée, qui s’affuble de ces conflits intrapsychiques.
Au fil du temps…
On ne peut évoquer la problématique vestimentaire sans se référer un tant soit peu à l’histoire du costume. Le sujet est aussi vaste et dense que l’histoire elle-même. L’étymologie du mot « costume » (coutume) révèle son origine italienne. Ce terme, introduit sous Louis XIII, prononcé alors « costourné », signifie, à l’origine, usage et manière d’être. Le vocable « costume » n’est employé que depuis le milieu du XVIIIème siècle. Il convient de souligner qu’il s’apparentait surtout à un choix de vêtements pour une utilisation spécifique.
En remontant jusqu’à l’époque de la préhistoire, s’habiller était probablement une nécessité : celle de protéger le corps. Les historiens ne peuvent affirmer si s’habiller constituait aussi une façon de dissimuler le corps, sorte d’attitude pudique. Nous nous représentons aisément les populations primitives vêtues de rudiments vestimentaires qui cachaient les organes génitaux. Mais aussi loin que nous remontons dans le temps, se vêtir a toujours été un moyen propre à l’Homme de se projeter dans une entité différente. Nos ancêtres du néolithique se couvraient de peaux de bêtes pour se préserver, certes, mais aussi par processus identificatoire dans le but de posséder la force de l’animal et se confondre par mimétisme. Les archétypes du costume demeurent assez simples et peu nombreux durant la période qui s’étend de la protohistoire au XIVème siècle. Cependant, du XIVème siècle à nos jours, les archétypes apparus sont réduits au nombre de cinq : les costumes drapés, enfilés, cousus ou ouverts, les fourreaux. Dans cette évolution du costume, les cinq archétypes assimilés au fil des générations ont servi de base à de multiples créations. Les combinaisons de ces prototypes offriront des déclinaisons du vêtement de longs siècles encore. François Boucher écrit : Toutefois, l’évolution du costume doit être reliée à tout l’ensemble des phénomènes parallèles à chaque époque, dont les « dominantes » diffèrent dans le temps comme dans l’espace. Un tel examen prouve que ce n’est ni la race, ni le type ethnique, ni le régime politique, ni le génie artistique qui – isolément – entraînent les différences du costume mais bien que ce sont la nature de civilisation et le genre de vie. Les vêtements que nous portons dans notre quotidien sont afférents à une mode. Du latin modus, qui signifie manière, ce terme s’est vulgarisé pendant la période du grand essor industriel du XIXème siècle. Il affirme son caractère transitoire selon les tendances du moment. Mais ne dit-on pas que la mode est un éternel recommencement ?
La perception esthétique subjective
Ces emprunts permanents au passé, dans notre façon de nous habiller, s’inscrivent dans un ordre symbolique. La psychogenèse associe l’enfant à deux périodes identificatoires : une identification à la mère, puis une identification au père. Ces différentes identifications sont nécessaires à la formation du psychisme de l’enfant et à la structuration de son moi. Pour Lacan, le moi est le résultat d’un processus d’identifications à autrui. C’est ce qu’il a appelé le stade du miroir, soit le regard de la mère authentifiant le moi de l’enfant en tant qu’être autonome. L’absence partielle ou altérée du sentiment d’amour, ou fantasmée comme telle par le petit d’Homme, modifie la perception esthétique de son image. L’apport thérapeutique a pour fonction de corriger cette image déficiente. Le sujet prendra progressivement conscience de ses identifications parasites et renoncera à son idéal du moi, instance où sont venues s’apposer les images fantasmatiques du surmoi parental, donc du juge et censeur. Quoi qu’il en soit, l’inconscient se joue de fantaisies les plus étonnantes lorsqu’on observe comment s’habillent les gens autour de nous. Notre œil est habitué à repérer la moindre étrangeté chez les autres et nous dérobe les nôtres. Nous avons tous nos habitudes vestimentaires, nos coloris préférés. La désidentification amène le sujet à accepter sa vraie différence. Il prendra conscience de son véritable désir en s’individuant. L’élection des couleurs et des formes deviendra le fruit de sa propre créativité. Il ne sera plus façonné par la mode, les us et les âges, mais deviendra le créateur de sa propre image. Ainsi, l’influence correctrice du vêtement gomme tout rapport hiérarchique ou ostentatoire dans le port de l’habit. C’est aussi renoncer au but de plaire ou de déplaire. Il n’y a plus à séduire, mais intervient alors la possibilité de renforcer une image où s’accordent être et désir. Avec le vêtement, nous pouvons donc travailler sur le choix des formes, des couleurs, des matières. Notons, si besoin est, que leur interprétation analytique décèlera les attitudes névrotiques dans la façon de se vêtir, comme les aspects phobiques liés à un élément particulier du costume. C’est le vêtement, la matière ou la couleur qui deviendra l’inducteur et les associations libres du sujet libéreront ses affects. Le regard analytique sur nos habituations vestimentaires efface cette image en fait inhibante du paraître qui nous fait autre. N’est-ce pas là l’essence (les sens) même de l’être ?
Nadine Auclair
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