S’il est une phase de turbulences qui incommode parfois toute la maisonnée, c’est bien celle de l’adolescence traversée par l’un de ses membres. Durant cette période, la communication souffre d’ailleurs plus de la réaction de malentendants que de réels malentendus ! Les parents et l’ado ont en effet tendance à se livrer une sorte de combat relationnel perdu d’avance. À moins que le bon sens et la sagesse ne parviennent au rendez-vous…
Rester ferme sans paraître dictatorial, protecteur mais pas infantilisant, compréhensif en se gardant de tout laxisme, proche sans envahir, représentent une alchimie cependant difficile à mettre en place. Effectivement, tout ado cherche à la fois sa liberté et ses limites. Françoise Dolto comparait ainsi cet être en devenir d’adulte à un homard pendant sa mue, sans carapace… Toutefois et comme le rappelle le psychothérapeute canadien, Michel Delagrave, la liberté ce n’est pas l’anarchie !
Un discours cohérent
Il est révolu le temps où votre enfant se confiait facilement à vous. Désormais, la moindre question peut être perçue comme une véritable intrusion. Votre ado est fuyant et il faudrait le prendre avec des pincettes tant sa
parano a tendance à se déclencher à la moindre contrariété. En réalité, s’il ne répond pas à vos questions, c’est qu’il teste vos limites ! Pas question dès lors qu’il se sente pisté dans son jardin secret. Il ne s’agit pas non plus de céder sur tout. Exiger de connaître l’heure à laquelle il rentrera de sa sortie entre copains relève de votre responsabilité de parents. Un ado peut très bien comprendre qu’il n’est pas majeur aux yeux de la loi et qu’il ne lui est pas permis de faire tout ce qu’il désire. Ces limites, à condition qu’elles ne soient pas affectées par votre inquiétude, seront des balises qui le sécuriseront, même s’il ne vous l’avoue pas. Ainsi, précise Michel Delegrave,
le rôle de parent est un modèle pour son enfant, nécessairement imparfait, mais exemple vivant qu’il cherche inconsciemment à imiter ou à contre-imiter une fois devenu adolescent ! Ceci étant, un ado s’engouffre dans la moindre des failles d’un adulte. De fait a-t-il besoin d’une cohérence entre le « dire » et le « faire » : il est illogique d’interdire de fumer à un jeune de 16 ans quand le parent fume. Il en est à l’identique quant aux limitations de vitesse sur le scooter. Ce sujet sera source de conflit si votre ado vous surprend à les transgresser au volant de votre voiture…
Un langage respectueux
Tout peut se discuter avec un ado, à condition que là aussi les écarts de langage soient proscrits (de part et d’autre). Michel Delagrave insiste encore sur le fait que
la politesse, ce n’est pas d’apprendre à se taire mais c’est d’arriver à tout dire de façon acceptable et civilisée. Il rajoute que
c’est aussi une façon d’endiguer l’irrespect et la violence… Se laisser insulter par son ado ne devrait jamais être toléré. La compréhension de son mal-être du moment ne l’excuse pas. Lorsqu’il exagère, les dérives ne sont pas loin. Quand un ado dépasse la décence à votre encontre, c’est lui-même qu’il abîme car ses propos ne sont que l’effet de ses propres projections qu’il risque de retourner contre lui-même au final en se faisant payer inconsciemment ses écarts par des manières détournées (conduites addictives ou mises en danger physique de type accident…). Inversement, il vous appartient d’employer un langage adapté en évitant les brimades. Ne lui dites pas non plus que vous avez vécu la même chose à son âge, vous lui ôteriez son unicité, d’autant que votre époque n’est pas la sienne. À chacun sa place et son temps. Les conflits de génération s’apaiseraient si les parents cessaient de comparer de façon nostalgique leur propre jeunesse à celle de leur ado.
Les règles
Sans en faire une fixation et une occasion de disputes, il demeure important que la scolarité soit régulièrement abordée. Des résultats en baisse, alors que tout allait bien par le passé, sont une façon masquée de signifier un dysfonctionnement psychologique. Un rendez-vous avec le professeur principal s’impose pour faire objectivement le point sur la suite à donner : changement d’orientation, soutien scolaire… Un ado a besoin que ses parents s’intéressent à ses études, sans – bien entendu ‒ le harceler en cas d’échec. Il peut y avoir une histoire amoureuse mal vécue qui accapare toute son énergie ou, tout simplement, un désintérêt pour la filière choisie. C’est, quoi qu’il en soit, le moment d’envisager son avenir et de le rassurer. Quant aux vêtements qui peuvent vous paraître excentriques, vous avez le droit de donner votre avis, sachant qu’il ne sert à rien d’interdire systématiquement le port d’une tenue qui vous déplaît. Ici, la nuance et la tolérance sont de rigueur même si vous grincez des dents ! À l’inverse, l’indifférence risque de pousser à la surenchère. Idem pour les téléphones portables et autres ordinateurs. Établir un contrat cohérent s’impose : pas de téléphone pendant les repas, par exemple, mais autorisation d’avoir un espace intime dans sa chambre pour dialoguer avec les copains…
Michel Delagrave rappelle les qualités principales des règles à suivre :
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Une règle doit être connue et claire.
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Une règle doit être cohérente.
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Une règle doit être constante.
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Une règle doit être associée à une conséquence lorsqu’il y a une infraction répétée.
Le thérapeute conclut en disant que
le défi du parent face à l’adolescent, c’est d’être ouvert, authentique et protecteur sans être étouffant. En quelque sorte, une main de fer dans un gant de velours !
Stéphanie Girard
