Si en mathématiques, 1 + 1 = 2, il n’en est pas à l’identique dans toutes les sphères du quotidien. Ainsi, la loi de la procréation en a décidé autrement. Lorsque la dyade conjugale est sur le point de se transformer en triade familiale sous l’effet d’un heureux événement, la future maman, toute à sa grossesse, est à l’honneur. Au point d’en oublier le futur papa en proie à quelques tourments intérieurs légitimes, même si – virilité oblige – il ne le montre pas toujours…
Le moment où un homme est pour la première fois en passe de devenir père représente effectivement un passage difficile psychologiquement. Certains, d’ailleurs, ne se sentent pas très bien dès l’annonce d’un nouveau venu ! Pour autant, le cap reste naturellement franchissable.
Un trinôme mnésique
Marc, 30 ans, vient d’apprendre que le test de natalité de Laurie, sa femme, s’est révélé positif. S’il apprécie la bonne nouvelle, une sensation d’angoisse surgit au conscient malgré lui. Quel est donc ce malaise qu’il convient de cacher, malaise qu’il situe entre bonheur et inquiétude ? La psychanalyse connaît ce sentiment ambivalent – quoique normal – lié justement au triangle en train de se former, triangle qui n’est pas sans rappeler une certaine période œdipienne où l’exclusion était d’actualité. Sa compagne est maintenant " habitée " par un rival potentiel en la personne de ce bébé en formation. Inconsciemment, tout homme ressent au plus profond de lui que sa femme, devenant mère, rien ne sera plus comme avant. Si l’homme manque d’une certaine maturité liée à son histoire familiale et à la façon dont son psychisme a vécu le complexe d’Œdipe, il peut paniquer. Témoins ceux qui mettent en place, à ce moment-là, une relation extraconjugale, tout simplement parce que leur partenaire devient intouchable par tabou de l’inceste interposé… L’inconscient peut fantasmer aussi que l’épouse est essentiellement mère, et rien d’autre. Heureusement, dans la très grande majorité, le futur papa dépasse ses troubles.
Des interrogations anxiogènes
Bien que 97 % des enfants naissent sans complications, les premières angoisses conscientes du futur papa reposent sur deux questions essentielles : Ma femme va-t-elle mourir ? ou Mon enfant sera-t-il en bonne santé ? Les nausées et autres désagréments éprouvés par la femme enceinte prennent aussi souvent des proportions alarmistes. Se sachant le géniteur, la culpabilité n’est pas loin. Pour parer à ce type d’inquiétudes, participer avec sa conjointe à des cours de préparation à l’accouchement, surtout s’il s’agit d’une première paternité, a en général pour effet de rassurer sur les différentes étapes de la grossesse. Il est important de comprendre – vous le père – que vous n’êtes pas seul responsable de la situation. Si vous avez besoin d’être soulagé, n’hésitez pas à demander des explications techniques. Votre femme ou des amis fiables se feront un plaisir de vous délester de la peur inhérente à cet inconnu. Et si la pudeur est trop forte, consultez des ouvrages sur le sujet, comme « Papa débutant » de Lionel Pailles, un guide sans tabou ni leçon de morale qui répond aux questions les plus fréquemment posées aux spécialistes (sages-femmes, pédiatres, psys, médecins généralistes)…
Neuf mois pour devenir père
Après les premières inquiétudes, le temps devient toujours un allié, la nature étant merveilleusement faite et n’agissant jamais par hasard. Si un bébé met neuf mois pour se former à l’abri des regards, cette période de gestation est nécessaire mais suffisante pour qu’un futur papa se prépare à ce chambardement. Vivant cet évènement de l’extérieur, il ne sera en partie tranquillisé que lorsqu’il verra « son » enfant. Ce processus explique ce stress singulier pendant cette attente d’autant plus frustrante qu’il se sent physiologiquement étranger au développement de ce petit être. Il est alors important de savoir rester à sa place. Et ce, de manière à éviter, entre autres, le dommageable « syndrome de la couvade » qui tend à toucher, selon certaines études, presque 20 % des futurs pères (indigestion, nausées, prise de poids). Il s’agit ici peut-être d’une conséquence, sous prétexte d’égalité, d’une non-différenciation du rôle de la mère par rapport à la fonction symbolique du père mais, quoi qu’il en soit, le futur papa a intérêt à préparer la venue de l’enfant en s’occupant par exemple des tâches administratives… Autre conseil, contrairement à ce qui est facilement véhiculé de nos jours, il n’y a aucune obligation à assister à l’accouchement. Certains hommes le font malheureusement alors qu’ils n’en n’ont pas vraiment le désir…
Christian Bardoux