Nous avons toutes et tous quelques complexes qui cherchent à nous pourrir la vie ! Et ce, quel que soit notre âge car, même lorsque notre adolescence est loin, loin, loin, un certain mal-être peut planer et surgir à la moindre occasion...
Sans rentrer dans une théorie psychanalytique rébarbative et pour simplifier, un complexe est un désaccord interne et refoulé entre ce que nous avons envie d'être et un interdit qui nous en empêche ! Cet interdit repose sur une morale filiale bien sédimentée par des jugements collectifs. Ainsi la crainte du fameux regard des autres veille-t-elle à ne pas nous faire dépasser les limites. Mais ces limites sont subjectives et endogamiques.
Le film remarquable " La vie est un long fleuve tranquille " donne à constater que si la famille Le Quesnoy a ses principes psychorigides, la famille Groseille a aussi les siens, ne serait-ce que sa proximité avec ses enfants ! Tout est donc question de point de vue et d'héritage de " valeurs " que chacun reproduit avec le modèle de ses aïeux dont il est porteur et qui lui " colle " à la peau pour toujours...
Si C., avocate, est obnubilée par son tour de taille (grands-parents maternels décédés en déportation), A., qui gagne énormément d'argent avec son entreprise de menuiserie, souffre de son absence de diplôme universitaire (père médecin)... Pourtant, ils ont tous deux " réussi "... Ce qu'ils ne ressentent ni l'un ni l'autre. Leurs complexes respectifs les empêchent de savourer les avantages de leur situation, fixés qu'ils sont à ce qui, selon eux, ne " colle " pas. Ce qu'il faut retenir de ces deux exemples ? C'est que l'être humain - s'il est la victime quasi consentante de la norme - est surtout prisonnier des diktats familiaux séculaires, tout aussi muets soient-ils...
Par voie de conséquence, pour abandonner ses idées obsédantes et injustifiées, il faut donc quitter libidinalement sa famille ! Indépendamment de Freud, c'était du reste le conseil de Jean Cocteau qui disait avec bienveillance et pertinence : " Ce que les autres te reprochent, cultive-le, c'est toi "...
Vis-à-vis de notre environnement familial, voire professionnel (qui est constitué curieusement des mêmes profils psychologiques mais ça, ce serait un autre histoire qui mériterait d'être développée), nous savons pertinemment ce qui déplaît à nos proches. Or, dépasser nos complexes passe justement par le maintien de nos propres singularités qui les agacent ou les offusquent. Il est bien évident que je parle de comportements acceptables dans le sens où ils ne nuisent pas à autrui car en quoi le tour de taille de C. et l'absence de diplôme universitaire de A. peuvent gêner qui que ce soit ?
Dépasser nos complexes consiste tout simplement à vouloir refuser les répétitions transgénérationnelles et leurs cortèges sclérosants dans la mesure où notre unicité fait notre personnalité. Une grande victoire sur soi !
Chantal Calatayud