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Le développement personnel
dans Signes & sens
Pourquoi un livre de chevet ? |
Le terme « chevet » vient du latin « capitum », signifiant « ouverture supérieure de la tunique pour passer la tête ». En architecture religieuse, il désigne aussi l’extrémité du chœur d’une église. Aujourd’hui, on parle de livre de chevet pour qualifier un ouvrage qui nous accompagne de manière très intime jusqu’au bord du sommeil et que l’on range soigneusement sur la table placée à la tête du lit. Au sens figuré, il désigne un manuel de référence auquel on revient sans cesse.
Intéressante l’explication que propose Gérard Mauger, sociologue et directeur de recherches au CNRS : pour lui, un livre de chevet implique moins la notion de découverte que celle de retrouvailles. Il participerait alors d’un rituel visant à un endormissement de qualité. Ce qui n’est pas sans rappeler l’histoire – toujours la même – que l’enfant aime qu’on lui raconte au moment du coucher. C’est une espèce de survivance infantile, explique Mauger. La relecture a un pouvoir magique et très évocateur. Nous recherchons à retrouver des états d’âme et des états d’esprit que nous avions connus lors de lectures précédentes. Quant à l’écrivain Jean Prieur, il donne un conseil facilement applicable à cet espace et à ce moment privilégié, une manière agréable de contrebalancer l’activisme de nos journées : Lis avec lenteur, nous dit-il, à une époque où l’on nous parle de lecture rapide et de lecture en diagonale… Et si lire au lit revenait tout simplement à prendre le temps de s’occuper de soi ?
Introspection, imaginaire et relaxation
Un sondage réalisé par le journal Télérama auprès d’une centaine d’écrivains francophones a fait ressortir trois ouvrages qui reviennent inexorablement sur la table de chevet de ces professionnels de l’écriture : l’unanimité revient de loin à « À la recherche du temps perdu », roman introspectif de Marcel Proust, qui semble donner raison à Gérard Mauger quant à la quête d’un plaisir originel. L’essayiste Olivier Decroix de préciser qu’il s’agit d’un livre qu’on peut lire plusieurs fois à des âges différents en y trouvant à chaque lecture des choses nouvelles, comme si on ne les avait jamais lues. Viennent ensuite « Ulysse » de James Joyce, roman fleuve de 18 chapitres, et « L’Iliade et l’Odyssée » d’Homère, deux épopées faisant une large place à l’imaginaire. Outre ces titres appartenant à une littérature intemporelle, et même si certains romans cultes gardent aussi une place importante au seuil du sommeil, certaines publications ayant trait au développement personnel sont écrits de telle façon qu’ils peuvent également être lus et relus sans lassitude. C’est le cas, par exemple, du livre de la moniale bouddhiste Pema Chödrön, « Entrer en amitié avec soi-même », ou encore « L’art du calme intérieur » d’Eckart Tolle à propos duquel un lecteur convaincu témoigne : Personnellement, quand je lis ce livre je ressens un profond calme intérieur. C’est comme si j’étais traversé par une vague de sérénité immense. Non non, je n’en rajoute pas ! C’est mieux qu’une séance de relaxation… Voilà joliment résumée la fonction d’un livre de chevet. Peu importe le sujet abordé pourvu que le plaisir y soit toujours au rendez-vous, qu’il génère une sensation de bien-être et prépare à une énergie réparatrice peuplée de doux rêves...
Éric Fuentès
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