Existent-ils réellement ceux qui, au fond d’eux, ne gardent pas quelques colères inavouées vis-à-vis des auteurs de leurs jours ? Ne serait-ce que le sentiment d’avoir été parfois mal aimé. La plupart a cependant compris que la perfection n’étant pas de ce monde, il ne sert à rien de pester ad vitam æternam contre ses ascendants. D’autres en restent pourtant suffisamment marqués au point que la rancœur soit toujours là, pénalisant leur existence. Ce triste constat met en miroir l’intérêt de faire la paix intérieurement avec ses parents pour tout simplement d’ailleurs faire la paix avec soi…
Se réconcilier avec ses géniteurs demande d’accepter qu’ils n’aient pas été comme nous les aurions désirés. Selon l’histoire de chacun, ce processus n’est cependant pas aisé à intégrer, certaines blessures de l’enfance étant encore là. Toutefois, il est possible de refuser de rester une éternelle victime…
La force des pulsions de vie
Il est fabuleux d’imaginer la puissance de cette énergie vitale qui a fait qu’indépendamment de tous les obstacles du passé, nous sommes là aujourd’hui, bien vivants. La psychanalyse parle de la force des pulsions de vie inhérentes à chaque individu. Cette prise de conscience peut libérer de conflits qui n’ont plus lieu d’être. Elle invite
de facto, pour y parvenir, à se détacher de l’enfance. Il s’agit avant tout et encore une fois d’une réconciliation avec soi-même.
La désidentification
Des parents qui ont fait souffrir sont souvent des parents immatures qui n’ont pas su ou pas pu faire autrement. Cultiver une haine à leur encontre ou, pire, des désirs de vengeance, ne fait qu’enchaîner à « une identification à l’agresseur », selon les travaux d’Anna Freud. Sans compter sur le risque de faire porter à ses propres enfants la non-résolution de cette guerre inutile. À l’inverse, le non-jugement libère la descendance d’un fardeau inconscient.
Le pardon
Dans un dossier « Psycho » de Santé magazine intitulé « Choisir de se réconcilier avec ses parents », Chantal Calatayud, psychanalyste et auteur d’« Apprendre à pardonner, l’approche psychanalytique », insiste sur l’importance du pardon :
Nous savons que nous avons pardonné, explique-t-elle,
lorsque penser à la personne qui nous a fait souffrir ne déclenche plus de rancœur. S’installe alors en nous une « neutralité bienveillante ». Il faut avoir le détachement nécessaire pour exprimer son « ressenti » et comprendre qu’on ne changera pas ce qui s’est passé. Mais justement, c’est du passé et il faut aller de l’avant… C’est un objectif parfois difficile à atteindre et qui nécessite un travail intérieur délicat que le temps, heureusement, aide à élaborer…
Cédric Gras