Il est de mise de se lamenter sur les affres de la période hivernale. Il faut dire que les médias ne se privent pas de nous annoncer, avec une froideur polaire, les grands retours de la grippe, de l'angine et autre gastro-entérite, déclenchant ainsi malgré nous quelques angoisses de contamination détestables et ce, avant même que le virus le plus combatif n'ait pointé le bout de son nez... Le comble, c'est qu'ils n'omettent pas non plus de nous mettre à la diète dès les lendemains de Fêtes ! Voilà de quoi nous rendre dépressifs alors que l'année vient juste de commencer... Mais si nous décidions de regarder, de vivre et de profiter de l'hiver autrement ? En somme, soyons judicieux !
Effectivement, à cette saison, il n'est pas indispensable de s'envoler en direction d'îles paradisiaques pour nous réchauffer et oublier que le soleil se couche décidément comme les poules... C'est peut-être l'inverse d'ailleurs ! Je veux dire par-là que les mois, jugés par beaucoup comme faisant partie des plus ingrats du calendrier, ont pourtant de quoi nous séduire.
Envisageons d'emblée le registre affectif. Qu'il est doux que le couple ou la famille rentre à la maison beaucoup plus tôt le soir et se retrouve autour d'une bonne soupe qui aura des vertus détox essentiellement liées à ce moment de partage et de réel bonheur. L'Épiphanie peut constituer également un joli prétexte pour se réunir et, pourquoi pas, y ajouter un peu d'Histoire et de légendes. Sans oublier que la Chandeleur n'est pas si loin et qu'il est possible de s'entraîner à la créativité en vue de crêpes-parties étonnantes. Quant à la découverte ou à la redécouverte des recettes de grand-mère enveloppantes, telles les civets, les ragoûts, les daubes, les blanquettes, j'en passe et des meilleures, elle permet de nous rappeler notre filiation, de nous remémorer des souvenirs d'enfance délicieux et de nous convaincre de l'importance de la transmission orale pour humaniser au mieux...
Les agapes d'un autre temps charmant nous invitent à faire tout de même un peu de sport mais aucune inquiétude à avoir si le compte en banque est tristounet. Là encore, il n'est pas incontournable de rejoindre une station de ski. Une jolie balade vivifiante tout près de chez soi nous fait apprécier une nature qui nous emmène dans une illusion bienfaitrice car il est un tort de la voir dépouillée. Se montrant sans fard, elle nous suggère l'authenticité, nous incitant à plonger au cœur de nos racines pour identifier nos potentialités. Admirer un arbre sans feuille, par une température au-dessus du zéro qui voudrait nous faire croire que plus rien n'est possible en terme de vie, nous conduit en fait à nous faire réaliser que, quelles que soient nos difficultés, nos valeurs sont à disposition pour que notre vitalité reprenne ses droits un jour... ou l'autre... Quant à fouler un sol gelé, ne nous en privons pas. Il envoie une résonance qui fait écho dans la mesure où nous sentons sous nos pas combien nous sommes des marcheurs sécurisés sur cette terre ferme. Ce chemin nous rappelle que même si, d'aventure, nos pas venaient à se dérober, il ne nous resterait simplement qu'à nous redresser...
Une autre grande leçon de l'environnement, particulièrement accessible durant les frimas, consiste à observer les oiseaux. Ils se débrouillent comme ils peuvent mais arrivent toujours à trouver de quoi se nourrir, voire se réchauffer, ne serait-ce que grâce à la gentillesse de celles et ceux qui leur fournissent et accrochent aux branches des boules de graisse salvatrices... En les regardant picorer, sans se poser la moindre question sur leurs généreux dispensateurs, ils rappellent que la solidarité humaine existe et qu'elle fonctionne quand le parcours existentiel de chacun d'entre nous le requiert... Pour la flore, même constat de confiance, de persévérance, de bravoure, de témérité : qui n'a jamais observé les Roses de Noël scintillant sous un épais manteau blanc ou encore les pensées, les primevères, les bruyères, qui offrent un spectacle lumineux alors que le thermomètre prend des vacances, refusant pendant plusieurs semaines de nous laisser envisager que des températures plus clémentes finiront par émerger... Le mercure cherche à nous faire admettre que la végétation est au repos mais elle ne se laisse pas faire ! Elle bouscule nos habitudes, remplaçant les impatients de l'été ! Elle nous susurre que le changement est nécessaire à l'Homme pour qu'il progresse. Elle nous stimule dans ce sens car, quand nous prenons la peine de nous pencher sur elle, nous assistons à un florilège d'enseignements certes bucoliques mais loin d'être innocents en terme de communication silencieuse : ces végétaux s'adaptent et nous conseillent joliment d'apprendre ou de ne pas oublier à en faire autant... Une discrétion qui évoque les travaux du naturaliste Charles Darwin, lui qui tout petit avait dû surmonter le décès prématuré de sa mère et qui en avait fait une sagesse, assurant inlassablement que les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s'adaptent le mieux aux changements...
Sur ces précieuses paroles darwinistes, permettez-moi de vous souhaiter un hiver plein de spectacles didactiques et une Nouvelle Année auréolée de bonheurs et d'évolution...
Chantal Calatayud