Le progrès a beaucoup contribué à l'illusion d'une accélération du temps. Alors que les appareils ménagers, les machines agricoles et l'informatique constituent des atouts majeurs complémentaires de bonne santé physique et psychologique, le présent nous échappe cruellement. À chacun toutefois de décider de ne plus passer à côté des bénédictions quotidiennes...
Le vouloir est une chose mais encore faut-il développer une conscience de soi corporelle et psychique. Les sensations communiquent avec un lien corps/esprit précieux qu'il est nécessaire de découvrir, voire de redécouvrir...
Une connexion essentielle
Le lever se prépare. Pour un démarrage en douceur de la journée, le Docteur Laurence Pescay préconise le simulateur d'aube : " Cet appareil permet à l'inconscient un réveil en douceur. Cette caractéristique favorise la sécrétion de cortisol, une hormone qui régule les mauvaises réactions anxiogènes. ". Il n'y a donc pas de perte d'énergie au début de la journée. Le petit déjeuner revêt en outre une importance primordiale pour l'organisme...
. Manon, 35 ans, professeur des écoles, a réalisé l'intérêt de ce premier repas : " Alors que j'ai choisi mon métier, il commençait à me déprimer. Mon nouveau copain, professeur de yoga, m'a expliqué que tant que je boirais une tasse de thé à toute vitesse en avalant quelques biscuits, mon environnement m'apparaîtrait sombre et inintéressant. J'ai suivi ses conseils en préparant la table la veille, avec les produits que je pouvais laisser dehors. Que tout soit prêt dès mon réveil a été un déclencheur positif. Mon petit déjeuner est maintenant équilibré et constitue un véritable moment de bonheur ! ". Il est d'ailleurs à noter que les religions, en demandant d'offrir toute nourriture à Dieu, rejoignent cette sagesse. Dans son enseignement, publié chez Albin Michel, la Sage Mâ Ananda Moyî rappelle ce grand principe en livrant une anecdote personnelle :
. " Un jour, Mâ accepte de se laisser nourrir par un homme qui reconnaît n'avoir jamais observé de restriction en matière de nourriture :
- 'Peu importe, lui dit Mâ, donnez-moi quelque chose'.
Après avoir mangé des fruits, elle lui précise : 'À partir de maintenant, tout ce que vous mangez, offrez-le tout d'abord à Dieu'.
- 'Mais je mange toutes sortes de choses'.
- 'Ça ne fait rien, tout ce que vous mangez, vous devez en premier lieu le consacrer à Dieu.'.
Et cette méthode modifia complètement ses habitudes. "...
Saint Paul invite déjà à son époque à pratiquer ce rituel : " Frères, tout ce que vous faites : manger, boire, ou n'importe quoi d'autre, faites-le pour la gloire de Dieu. "... C'est dire l'importance de cette conscientisation qui devient centration. Cette présence à soi doit de toute façon se retrouver dans toutes les situations liées au déroulement des heures qui s'égrennent... Ainsi en va-t-il à l'identique pour sa toilette : sentir le contact de l'eau sur la peau à la température qui convient est un pur cadeau, tout comme l'apaisement dû aux cosmétiques ou l'ivresse d'une eau de toilette... Il s'agit-là d'une communion exceptionnelle de soi à soi car chaque sensation est la réponse à une émotion personnelle... Au même titre que le fait de se rendre à son travail à pied, à bicyclette ou même en voiture offre le privilège de se concentrer sur le plaisir des yeux, en sachant que chaque instant est unique, ne demandant qu'à être savouré...
Un entraînement positif
Il faut savoir que rares sont les personnes qui ont choisi de se relier en permanence à la source de la vie. En arrivant dans un lieu quel qu'il soit, y compris dans un commerce, il n'est pas question de se laisser anéantir par une ambiance morose ou une agressivité latente à peine masquée. La psychothérapeute Dominique Roby explique comment il faut immédiatement déjouer ce piège : " Si une collègue vous accueille en vous assurant que le patron est d'une humeur détestable ce matin, répondez-lui que, par chance, vous vous êtes levé(e) d'une belle humeur ! ". Effectivement, le mental ne se laissera par contaminer par les projections de ladite collègue. C'est alors que, selon le coach Hugo Natoli, " la vitalité n'étant pas amoindrie par les affects de l'entourage, elle circulera dans tout le corps, rappelant de facto que pour l'instant vous êtes en accord avec vous-même. Vous pouvez dès lors vaquer à vos occupations sans être débordé(e) par des tracas supposés arriver mais qui appartiennent en vérité à un hypothétique futur ! ". Dans cet ordre imaginaire, a-t-on déjà vu la nature dépérir à l'idée d'une tempête qui pourrait éventuellement souffler le jour suivant ? Non, évidemment ! La végétation est de toute manière bien protégée grâce à ses profondes racines qui la fixent solidement et la nourrissent...
. Patrick, 45 ans, paysagiste, s'émerveille à chaque seconde de la richesse de l'Univers : " Ma profession m'a fait le cadeau inestimable d'être l'observateur privilégié de ce que je vis. J'ai décuplé ma capacité à accueillir les évènements comme ils se présentent et à vibrer au rythme de mes sensations qui, par magie, sont positives. Je sens ma respiration à l'unisson de mon environnement. J'ai appris à m'aimer selon ce modèle à disposition de chacun, moi l'enfant de la DDASS, et à me mettre au diapason de l'oiseau qui chante, me disant même qu'il chante pour moi ! Cette joie sans cesse renouvelée à chaque battement de mon cœur est irremplaçable. ". Éric Seydoux, auteur de l'ouvrage éclairant " Méditer les mains dans les poches ", publié aux éditions de Mortagne, reprend métaphoriquement cette possibilité de s'extirper de la pollution avoisinante : " Comme notre Terre, le corps est un ensemble cohérent où toutes les parties sont liées. Comme elle, nous avons nos rivières (les veines, la lymphe), nos forêts (les poumons). Notre squelette comme autant de montagnes, de crêtes et de vallées. L'air qui entre et sort comme autant de brises légères et de tempêtes. Comme sur Terre les multitudes de créatures, les cellules sont autant de familles, de tribus, de toutes les formes et de toutes les races, qui voyagent sans cesse, font du commerce, s'assistent les unes les autres ou se font la guerre. Les analogies entre l'infiniment grand et l'infiniment petit sont innombrables et flagrantes. Et nous voilà, nous, comme un lien privilégié entre ces deux univers. À chaque respiration, j'inspire et j'expire l'Univers tout entier. C'est pas rien. "... Effectivement, ce n'est pas rien !
Léa Mardon
