Le point de vue
de Signes & sens
Des informations télévisées paradoxales et déroutantes qui vont de la
noirceur – malheureusement bien réelle – de situations de précarité incompréhensibles
au XXIème siècle aux jeux – tout aussi télévisés – qui
offrent des euros qui tombent du ciel, en passant par certains people
qui expliquent – interviews à la clef – leur propre précarité professionnelle
personnelle mais que l’on voit faisant la une des magazines dans
plusieurs cocktails hebdomadaires…, toutes ces informations-là nous
laissent pantois ! Peu importe celles qui nous dérangent le plus. Une
chose est sûre : où se trouve la morale de l’histoire?, s’interroge-t-on
compulsivement dès qu’un média s’infiltre dans notre existence. Il y a
même une journaliste célèbre qui, pour mieux faire son métier, s’en est
allée du côté des démunis, se faisant passer
pour une chômeuse prête à faire n’importe
quoi. Elle finit par décrocher des heures de
ménage, réalise la dureté et l’inhumanité de
certains de nos compatriotes… Sauf qu’elle
a un emploi en CDI dans un grand hebdomadaire
(elle l’avoue elle-même). Et
qu’elle sort un livre chez un grand éditeur
sur le sujet de la détresse et de la misère humaines…
Ceci dit, depuis quelques années,
on nous parle beaucoup d’empathie.
L’Homme aurait ainsi la capacité psychologique
de se mettre à la place des exclus, des
rejetés, des refoulés… On peut toutefois
tenter de soulever une question : n’est-ce
pas un peu prétentieux d’envisager que certains
élus parviennent à se mettre en lien
avec ceux à qui la vie a joué un vilain tour ?
Les plus humbles pourront donner en guise de réponse qu’il s’agit en
fait de compassion. Ce terme fait frémir : quel est l’individu qui désire
que l’on ait de la compassion pour lui ? D’autant que quels que soient
les obstacles – parfois dramatiques – qui se dressent devant soi, l’inconscient
cherche toujours une issue lui semblant favorable. Cette voie peut
déranger la société car – tout aussi impénétrable que celles de Dieu –, elle
ne va pas fatalement dans le sens d’une bienséance aseptisée ! Prenons la
clochardisation : finalement, nous peine-t-elle ou nous angoisse-t-elle ?
Fondamentalement et avec grande sincérité, ce peut être les deux. Tout
simplement parce que notre surmoi, ce juge intérieur implacable, nous
laisse juste entrevoir ici que ça pourrait nous arriver aussi un jour… Et
si, plus modestement, on développait de l’empathie vis-à-vis de nous ?
Histoire de ne pas fabriquer de rapport dominant/dominé, implicitement
organisé sur une forme de mépris pour les mal-en-point, mépris habilement
déguisé. Après tout, charité bien ordonnée ne commence-t-elle
pas par soi-même ?