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Les médecines douces
dans Signes & sens
Des techniques de centration
pour ne plus souffrir
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Carpe diem (Cueille le jour qui passe), Hic et nunc (Ici et maintenant)… Il est des locutions latines qui sont, à elles seules, un véritable enseignement…
Le présent reste insaisissable puisque sans cesse en mouvement, l’arrêt sur image n’étant qu’une illusion qui voudrait fixer le temps qui passe inexorablement. C’est en ce sens qu’il relève d’une vraie difficulté. Ainsi, prendre les choses comme elles viennent demande une certaine adaptabilité. Vivre au présent, c’est en quelque sorte dé-buter, c’est-à-dire commencer à voir ce qui est, afin d’en laisser jaillir le sens. La vie n’est pas un long fleuve tranquille et nous sommes embarqués dans son courant. « L’agir » de l’instant conditionne l’état de demain et nous y prépare déjà. C’est ce que les philosophies orientales appellent action-réaction.
Une attitude simple
Se positionner dans un processus de réceptivité est le travail de toute une existence et demande, outre un exercice, un entraînement ! Il s’agit tout d’abord de retrouver un état d’équilibre entre rigidité et dissolution : être capable d’accueillir les évènements du quotidien, sans en être perturbé, c’est-à-dire sans les redouter. La tradition Zen propose l’exercice de l’assise en silence qui peut permettre de relâcher les tensions, tout en restant vigilant. Il est question en premier de souffler, dans le but d’un lâcher-prise des tensions physiques. C’est pourquoi la méditation Zazen insiste sur l’expiration. Le centre de transformation se situe dans le Hara (région au-dessous du nombril).
Jacqueline, ostéopathe, prend tous les matins une demi-heure pour cette pratique qui ne demande aucune condition physique particulière mais prépare à un mieux-être. Depuis que j’ai découvert cette technique, explique-t-elle, je me sens beaucoup plus disponible dans mon quotidien, aussi bien affectif que professionnel. Jacqueline nous confie sa méthode : Pas besoin de stage, ni de retraite dans un quelconque monastère. Un siège suffit. L’important est de suivre sa respiration telle qu’elle est, sans chercher à la modifier. Le dos droit sans crispation, laissez descendre le souffle dans le ventre, jusqu’à ce que « l’inspir » se fasse naturellement. Observez ce qui se passe sans jugement. Laissez descendre simplement et l’équilibre de la posture va s’imposer de lui-même. Faites l’exercice cinq minutes par jour et augmentez la durée jusqu’à atteindre un idéal d’une demi-heure. Ne forcez jamais et sachez goûter l’instant. Je peux vous assurer que cela peut suffire pour retrouver une disponibilité physique et mentale. Je me surprends même à ne plus être perturbée par un embouteillage ou quelqu’autre souci du même ordre. L’attitude juste s’impose à moi de manière spontanée…
Le quotidien comme exercice
Notre corps se transforme à chaque seconde. Même nos émotions changent. Nous passons de la joie à la peine, du rire aux larmes et inversement. Comme les deux faces d’une même pièce, vie et mort sont donc les deux manifestations journalières. Il convient d’accepter cette loi de l’existence qui veut que tout se termine mais qu’il y a aussi un début à tout. Après l’orage, l’arc-en-ciel. Après la pluie, le soleil. Rien n’est immuable, tout passe, y compris la souffrance, aussi tragique soit-elle. Choisir de regarder du côté de la vie, c’est bien assumer son destin, destin qui se joue surtout ici et maintenant ! À vouloir résister au flux vital qui n’est que transformation, nous en oublions de vivre. Aussi, Karlfried Graf Dürckheim, psychologue formé aux traditions orientales, propose-t-il le quotidien comme exercice : quelle que soit notre occupation, écrit-il, il nous est possible de voir son sens intérieur et d’utiliser l’occasion qui nous est ainsi offerte. Certes, nous n’y parviendrons que si nous comprenons le sens de la vie et que si, en fonction de ce sens, nous nous considérons comme responsables, c’est-à-dire si nous avons compris que l’Homme n’a pas seulement la charge de « reconnaître » et de maîtriser le monde extérieur, mais également – et peut-être surtout – celle de se transformer intérieurement…
Sublimer les conflits
L’existence propose en permanence des occasions de stress qui nous parasitent. Il est possible de ne pas se laisser envahir par des affects qui renvoient au passé, en réactivant de vieilles blessures, ou à un sombre avenir qui n’existe que dans notre mental. Nous dépensons une énergie phénoménale à ne pas être là où nous sommes. Sigmund Freud en a fait un livre passionnant : « Psychopathologie de la vie quotidienne ». Il montre, au fil des pages, combien nos actes manqués sont le fruit de ce constant décalage avec la réalité de l’instant. Nous nous défendons de vivre, par inconscient interposé, alors qu’il faudrait se protéger des conséquences de nos conflits intérieurs, en les transformant par une prise de conscience, issue d’un travail sur soi. Chaque jour, chaque heure, chaque minute, sont des opportunités pour se remettre en ordre et donc en paix, demandant toutefois une vigilance à travailler constamment. Prendre conscience de ce qui est inconscient met en adéquation avec la réalité afin d’être plus présent à soi-même et aux autres. Khalil Gibran en montre une perspective, avec cette citation : Celui qui, par quelque alchimie, sait extraire de son cœur, pour les refondre ensemble, compassion, respect, besoin, patience, regret, surprise et pardon, crée cet atome qu’on appelle l’amour…
Gilbert Robery
Quels risques existe-t-il à vivre
dans le passé ?
Bonne question ! Les conséquences à développer et entretenir une âme passéiste sont plus négatives que ce que l’on peut l’imaginer. Considérons les plus importantes :
1 - Un trouble de l’identité, dans la mesure où vivre inconsciemment (c’est-à-dire à l’insu de la conscience) prive de sa propre existence. Pour exemple, n’avez-vous jamais rencontré, pour votre plus grand énervement, sur la route, un automobiliste au volant d’une belle voiture de sport récente qu’il conduit à 50 km/heure sur un axe à 90 km/heure? Ce conducteur, pour les psychanalystes, se trompe d’époque. Il conduit comme il y a quarante ou cinquante ans et se prend donc pour quelqu’un d’autre : un père, un grand-père idéalisé, etc. Le problème, c’est qu’il devient dangereux pour lui et pour… les autres !
2 - Un trouble du comportement, dans la mesure où l’inconscient de cette femme, en recherche d’emploi depuis plusieurs années, la renvoie à une époque où vivait sa tante adorée qui travaillait dans une usine de joints en caoutchouc. Cette usine n’existant plus aujourd’hui, le blocage quant aux possibilités de trouver un emploi est majeur : lors des entretiens d’embauche, ses réactions, ses attitudes, ses réponses, seront dépassées…
3 - Un trouble de l’humeur, dans la mesure où chaque situation qui se présente sera abordée sous l’angle de l’angoisse. Car, comment gérer un événement difficile, en l’appréhendant avec soixante ans de retard ? Un exemple parmi des milliers de possibilités : Marie-Claude apprend que sa jeune sœur est atteinte d’un cancer du sein. Marie-Claude qui, inconsciemment, vit dans le passé, aborde la maladie en passant libidinalement par sa grand-mère maternelle, qu’elle n’a pas connue et dont elle sait qu’elle est décédée d’un cancer du sein. L’inconscient de Marie-Claude, en grande confusion, va faire un faux lien, en établissant un mauvais rapprochement entre le terme cancer et le mot mort. Cette association erronée de représentations mentales entraînera Marie-Claude à avoir la quasi-certitude que sa sœur ne pourra pas lutter contre la maladie. La peur, souvent invalidante, sera au rendez-vous dans son quotidien, la paralysant littéralement…
Ces exemples de la vie quotidienne sont là pour montrer combien il est précieux de vivre le présent. Si vous constatez une difficulté à y parvenir, n’hésitez pas à consulter un psychanalyste, la psychanalyse travaillant essentiellement sur le fantasme et l’angoisse du temps.
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