Il est habituel d’associer le terme « décevoir » au latin « decipiere », signifiant au sens propre « prendre, surprendre, attraper ». Une étymologie plus poussée donne une autre origine possible : faisant découler « décevoir » de l’association du verbe « capere », elle signifie aussi « prendre », ou encore « séduire » mais précédé du préfixe privatif « dé ». Envisagé sous cet angle, décevoir consisterait donc plutôt à « ne pas prendre », « ne pas séduire ». Exégèse linguistique intéressante quand on sait que nos comportements séducteurs prennent racine de façon archaïque dans notre plus tendre enfance, à une époque où notre psychisme n’avait qu’un but : capter l’attention de nos premiers objets d’amour que représentaient « maman » et « papa ». Aussi, réaliser aujourd’hui, à l’âge adulte, que nous pouvons exister indépendamment du regard d’autrui est un signe de maturité évidente…
> Je ne vis plus par procuration
S’il est toujours agréable de constater que l’être aimé est heureux, ne confondez pas sa vie avec la vôtre ! Sortez de la croyance qui consiste à penser que votre bonheur tout entier dépend des états d’âme de votre entourage. Cette attitude est illusoire dans la mesure où vous existeriez par procuration, c’est-à-dire que vous délégueriez de fait à autrui le pouvoir de diriger vos humeurs.
> Je ne cherche plus à séduire à tout va
Les psys nomment « mauvaise séduction » un comportement dont la motivation consciente ou inconsciente reste liée à l’obtention d’une récompense ou à la peur d’une conséquence fâcheuse. Exemple : vous avez peur d’échouer à un examen car il y va de ce que votre entourage va en penser ? Révisez votre copie et faites essentiellement les choses pour vous ! Ainsi, vous ne consommerez plus une énergie démesurée et vous vous mettrez naturellement en situation de réussite. Au pire, votre échec prendra sens et vous vous sentirez prêt à rebondir dans la direction qui est vraiment la vôtre.
> Je m’exprime lorsque je ne comprends pas
« Que votre oui soit oui, que votre non soit non ! » prône l’évangéliste Matthieu. Ce conseil de sagesse dépasse le contexte religieux. Arrêtez-vous sur votre état intérieur chaque fois que vous acquiescez à un propos dont vous n’avez pas intégré le sens. Soyez lucide et identifiez la raison pour laquelle vous n’avez pas osé vous exprimer. S’agit-il de la peur de blesser ou encore de passer pour un « nul » aux yeux de l’entourage ? Soyez certain que ces inquiétudes relèvent du pur fantasme, d’autant que la personne concernée appréciera vos interrogations, en profitera pour reformuler son discours et n’aura plus l’impression de prêcher dans le désert…
> Je fais ce que je veux de mes cadeaux
Soyez intransigeant lorsqu’on vous demande des nouvelles du vase que l’on vous a offert et que l’on ne voit pas dans votre salon ! Ce type de remarque révèle en réalité un manque total de savoir-vivre. Surtout ne culpabilisez en rien ! Un cadeau reste un cadeau et ne doit pas être perçu comme une dette que vous auriez contractée. L’objet peut tout à fait ne pas vous convenir et vous pouvez même avoir envie de vous en débarrasser. Rappelez-vous : « décevoir » consiste aussi à « ne pas prendre » !
> Je cultive l’humilité
Comble du paradoxe, direz-vous ? Qu’est-ce que l’humilité a à faire dans le fait de ne plus avoir peur de décevoir ? L’écrivain Georges Perros affirme que la peur de décevoir est l’une des pires décimales de l’orgueil. Ainsi, acceptez tout simplement qu’il n’est pas en votre pouvoir de combler fondamentalement autrui. Faites ce que vous pouvez pour l’être cher mais en ayant toujours à l’esprit que lui seul peut décider d’être bien-heureux ou mal-heureux. C’est d’ailleurs en le décevant quelquefois qu’il trouvera en lui ses propres ressources…
En résumé
Libéré de la peur de décevoir, vous voilà enfin devenu vous-même tout en sachant rendre à César ce qui est à César ! Vous avez intégré en effet l’idée que l’authenticité prime sur le calcul stratégique et, de fait, vous n’avez plus besoin de l’approbation d’un tiers pour avoir bonne conscience. Appropriez-vous en toute sérénité la sage affirmation des Écritures : « Qui m’aime me suive ! »…