« Ne juge pas et tu ne seras pas jugé ! ». Cet aphorisme évangélique ne concerne pas seulement les adeptes d’une croyance religieuse. C’est dans le quotidien qu’il se vérifie toujours, un jugement intempestif attirant souvent une réaction opposée au moins équivalente. Ce que la psychanalyse nomme « projection », c’est-à-dire le fait d’attribuer sans discernement à autrui un défaut qui nous concerne, relève de ce type d’attitude. Ne plus juger reviendrait alors à ne plus se juger, d’où un allègement et un confort inestimables…
> Je tourne sept fois ma langue avant de parler
Combien de malentendus sont dus à une précipitation orale. C’est sorti tout seul… Les mots ont dépassé ma pensée… Votre premier exercice consiste donc à observer ces moments où vous ne pouvez retenir votre langue et où vous regrettez instantanément ce que vous venez de dire. Avec l’habitude, vous installerez une saine vigilance qui vous évitera bien des justifications d’après-coup.
> Je prends en compte l’avis d’autrui
Avant d’émettre un avis négatif sur un comportement, prenez soin de vous enquérir de l’avis d’un tiers : Que pensez-vous d’un tel à ce propos ? Ce comportement possède l’avantage de mettre de la distance entre une réaction à fleur de peau et une saine réflexion.
> Je ne suis pas un juge
Pensez au fonctionnement de la justice qui nécessite une longue procédure avant que le juge déclare un prévenu coupable, s’appuyant, quoi qu’il en soit, sur des textes de lois qu’il n’a d’ailleurs pas écrits lui-même. Fort de cette prise de conscience, ne vous laissez plus aller à une réaction injuste qui ne prendrait en compte qu’un souci de toute-puissance.
> Je ne colle pas d’étiquette
Le manichéisme est une représentation dualiste – et apparemment confortable – de la réalité. Il consiste à classer le monde de manière infantile selon deux critères qui s’excluent l’un l’autre : le bon et le mauvais. Ainsi, l’être perçu bon est idéalisé et son opposé voué aux foudres de la destruction. Lorsque cette grille de lecture est utilisée, elle peut devenir catastrophique. L’Histoire a démontré les ravages que peut générer cette forme de pensée. Relevez tous les préjugés dont vous affublez une personne sans jamais l’avoir rencontrée, simplement parce vous la supposez appartenir à un parti politique, à une religion, à une ethnie ou une culture qui vous est étrangère et qui vous fait peur. Une troisième voie, plus réaliste, consiste à ne pas coller d’étiquette a priori et d’accepter qu’un dialogue est néanmoins possible.
> J’exprime ma différence en respectant autrui
Ne pas juger n’est en aucun cas synonyme d’acceptation béate. Vous avez le droit d’avoir des pensées différentes et de les exprimer. Cette notion de différence et de pluralisme fait la richesse de la démocratie. Winston Churchill n’affirmait-il pas, avec son humour britannique, que la démocratie est le pire des régimes, à l’exception de tous les autres… Tout l’art consiste donc en un équilibre entre affirmation de soi et respect d’autrui, sachant qu’il s’agit d’un chemin et que vous ferez certainement encore des erreurs d’appréciation. L’important est de ne plus en être dupe…
En résumé
L’absence de jugement offre l’assurance d’une communication de qualité. Le défi est enthousiasmant au vu de la paix intérieure et extérieure que ce comportement offre à ceux qui l’ont déjà adopté. Ne plus juger est l’occasion de participer humblement à l’édification d’un monde qui a décidément besoin de tolérance.