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Dans un occident en conflit avec ses racines judéo-chrétiennes, émerge un grand nombre d’autres religions, d’autres croyances. Depuis plus de 150 ans, nos sociétés découvrent l’hindouisme et le bouddhisme avec leur notion de réincarnation. Mais celle-ci pose, pour les occidentaux que nous sommes, certaines questions.
S’agit-il d’une dénégation de la mort ? Est-ce une fuite du réel ? Croyance que l’on retrouve chez les Égyptiens et les Grecs sous le vocable de métempsychose. L’idée de réincarnation suscite encore au XXIème siècle de nombreuses polémiques : réincarnation ou résurrection ? Liée à l’environnement culturel et historique, la réincarnation se décline, quoi qu’il en soit, de différentes manières.
La renaissance et le monde égyptien
Pour le philosophe Hérodote, les Égyptiens sont les premiers à avoir exposé la doctrine de l’immortalité de l’âme et le fait qu’au moment de la mort du corps matériel, l’âme s’incarne dans un nouveau corps qui est prêt à naître ; ils affirment que lorsque l’âme a terminé tout le cycle des incarnations des animaux de la mer, de la terre et de l’air, elle parvient finalement à entrer dans un corps humain, né ou préparé pour la recevoir… De son côté, l’égyptologue français Gaston Maspero explique que l’immortalité pour les Égyptiens était un mourir et vivre perpétuels que l’âme traversait en gardant sa propre identité. L’âme n’a pas vécu ces vicissitudes uniquement après la vie humaine. Avant de naître en ce monde, elle est née et morte dans de nombreux autres mondes.
La renaissance et le monde grec
La notion de renaissance en Grèce est connue depuis le VIème siècle avant J. C. ; il s’agit du mouvement religieux nommé Orphisme. Sa cosmogonie est proche des concepts égyptiens et orientaux. La matrice universelle est symbolisée par un œuf, dont serait sorti le premier Dieu : Éros. Dans cette doctrine, l’âme est prise dans un cycle de renaissances et seule une vie vertueuse peut libérer l’Homme de sa partie négative (nommée, par les Grecs, Part Titanesque). La renaissance prend en Grèce le nom de Métempsychose. Le Pythagorisme succède à l’Orphisme mais en reste très imprégné : Daniel Donnet, professeur à l’Université de Louvain, explique que les documents relatifs au pythagorisme ouvrent l’accès aux premières justifications philosophiques. On notera tout d’abord que la métempsychose a pour toile de fond une réflexion globale sur l’Univers, où l’on voit prévaloir un perpétuel retour cyclique : la réincarnation s’inscrit dans l’alternance du mouvement de vie et du mouvement de mort, la mort n’étant qu’une phase obscure cachée de la révolution qui prépare le retour à la vie…. Ces deux courants de pensée influenceront Platon. Celui-ci pense également que l’âme s’est incarnée pour subir une punition et qu’une vie vertueuse est la condition de sa libération. Daniel Bonnet de dire : Il faut bien saisir que pour beaucoup de penseurs, l’opposition au christianisme est un impérieux devoir de conscience car l’attitude des chrétiens qui prétend détenir la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, heurte de front leur idéal de vie.
La renaissance et le monde indien
Les premiers textes védiques qui ont parlé de réincarnation sont les Upanishads (VIIème siècle avant J. C.). Ces écrits mettent en avant que chaque être est une parcelle du Brahman (l’âme universelle originelle). Cette infime partie nommée Atman est éternelle. Elle s’est incarnée, à l’identique de la conception grecque, afin de se purifier pour refusionner avec le Brahman Universel. Quant au Bouddhisme, il aborde différemment la notion de réincarnation. Dominique Trotignon, dans « Réincarnation, Renaissance, Nirvana », écrit : Le Bouddhisme va nier l’existence du principe spirituel qu’est l’Atman. L’esprit n’est pas emprisonné dans un corps : les deux forment un tout indissociable et l’Atman n’est qu’une illusion. Car tout n’est qu’impermanence et changement ; tout n’est qu’un composé instable d’éléments variables. L’Atman n’a pas de réalité. Tout meurt à chaque instant, la vie est une succession indéfinie de morts et de renaissances. Ce qui nous paraît réalité n’est donc qu’illusion, y compris notre propre existence. Pour le bouddhisme, la mort est un phénomène réel dans la mesure où la réincarnation ne signifie pas que ce soit le même individu qui se réincarne. L’idée d’un Moi permanent est donc une illusion. Pour le Bouddhisme encore, sortir de cette illusion est appelé Nirvana.
Un continuum
Ces différents regards ont en commun une forme de continuum de l’être par le biais de l’âme, une domination de sa destinée malgré la mort. La réincarnation, c’est aussi un moyen d’accéder au sacré, à quelque chose qui nous dépasse. Le docteur Ian Stevenson, spécialiste de ce domaine, rapporte que la plupart des sujets qu’il a étudiés possèdent des qualités (aptitudes, etc.) qu’ils n’ont pas eu l’occasion de développer au cours de la présente incarnation et qui sont précisément, selon les témoins interrogés, des qualités que possédaient les personnalités antérieures. Les observations du docteur Stevenson semblent bien aller dans le sens de ce qu’enseigne la pensée ésotérique. Il met en effet en avant la notion de lien : Il n’y a pas de substitution, dit-il, d’une personnalité à une autre, mais continuité de l’une à l’autre.
Dominique Séjalon
Renaître par le son
Certaines vibrations ont le pouvoir de régénérer. Il en est ainsi des mantras utilisés dans le Yoga. Notre tradition occidentale n’est pas en reste, utilisant certains chants, comme le grégorien et autres musiques sacrées. Certaines pièces de Bach ou de Mozart, par exemple, sont ainsi conseillées par les musicothérapeutes pour installer un état de détente propice à une revitalisation énergétique. Au commencement était le son reste en fait le credo de toute spiritualité, qu’elle soit orientale ou occidentale. D’où aussi l’importance d’une parole juste, agencement de sons qui peut véritablement être à la source d’une authentique renaissance.
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