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La psycho
dans Signes & sens
Ces ados qui prennent des risques
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Sans attendre qu’il taquine le danger de manière inquiétante, les parents doivent tout d’abord reconnaître que l’adolescent a le droit de prendre des risques – bien entendu, pas n’importe lesquels ! – et voir dans son besoin de “ frissonner ” une forme d’essai constructif de dépassement de soi…
De ce point de vue, l’option zéro risque prise par certains parents, angoissés par la perspective que leur rejeton s’affronte au danger et au déplaisir – ou tout simplement à faire des expériences qu’ils ne pourront pas contrôler –, se révèle être une bonne intention… très piégeante. En effet, cette attitude amène fréquemment le jeune à faire le contraire, non par vice mais par besoin vital de continuer à grandir – c’est-à-dire, entre autres, de se démarquer de ses parents –, quelle que soit la voie utilisée à cet effet. Que faut-il dire à un adolescent qui prend systématiquement le contre-pied des limites éducatives que ses parents lui donnent ? En fait, qu’il n’est pas obligé de se démarquer aussi radicalement d’eux pour se trouver, qu’il existe des quantités de manières plus soft et plus acceptables pour les parents de faire jouer le conflit de générations, par exemple en affichant des goûts musicaux singuliers… ou en mettant le paquet pour être meilleur élève que son père et sa mère ne le furent…
En quête de plaisir
Les parents doivent absolument reconnaître le plaisir qu’il y a à éprouver des sensations fortes quand on est adolescent. Si père et mère ne tiennent pas compte que, dans la prise de risques juvénile, l’adolescent cherche dans presque tous les cas à se faire du bien, c’est le clash assuré. Ainsi, il est stérile de s’obstiner à dire à son adolescent que fumer du cannabis est toujours une forme d’autodestruction si l’intéressé, de son côté, cherche à faire entendre à son entourage qu’il n’en fume que très occasionnellement (ce qui, certes, n’interdit alors pas aux parents de lui rappeler le caractère illicite de la consommation de ce produit stupéfiant, quitte à engager un débat citoyen avec lui sur cette question), qu’il y trouve des sensations agréables (par exemple une détente musculaire et une humeur euphorique) et qu’il n’a aucune envie de mettre sa vie – ni celle d’autrui – en danger, ce qui peut se traduire par le fait qu’il ne prend jamais son scooter s’il vient de fumer un joint ! Lorsque les parents se cramponnent à des certitudes catastrophistes qui dénient le vécu du jeune, celui-ci n’a d’autre choix que de se rebiffer puis de se fermer. Le plus dangereux est que l’adolescent risque alors, par rage et dépit, de multiplier les prises de risques – cette fois-ci de manière débridée –, dans une proportion identique à celle de son refus (passablement désespéré) de communiquer. Pour éviter de telles situations, les parents ne doivent pas renoncer à exposer leurs arguments. Mais à la stricte condition d’écouter l’adolescent et de prendre la mesure de l’écart qu’il peut y avoir entre ce dont ils sont persuadés et ce que le jeune vit. Pour oxygéner la discussion, il n’est pas inutile que les parents soient capables de se souvenir et de parler de la manière dont, plus jeunes, ils fréquentèrent eux-mêmes le risque, de la façon dont leurs proches se positionnèrent pour proscrire certains comportements, en autoriser d’autres et veiller à l’observance de ces mesures éducatives. Surtout, du fait que certaines limites (im)posées par des adultes – et qu’ils estimèrent injustes sur le coup – ont à terme concouru à leur permettre de devenir des adultes psychologiquement stables.
Poser les limites
Il est fondamental de dire clairement au jeune qu’il y a des comportements inadmissibles, que certaines prises de risques ne sont absolument pas négociables, comme rouler à contresens sur une autoroute ou griller systématiquement tous les feux rouges. Bien sûr, certains adolescents excellent à taxer leurs parents de ringards, de sorte que ceux-ci se trouvent gênés au moment de tenir un discours de prohibition. Pourtant, veiller à ce que leurs enfants gardent un peu les pieds sur terre fait partie du métier de parents ! Alors, que faire ? Il s’agit d’expliquer à son adolescent que si certaines prises de risques ne sont absolument pas négociables, cela délimite un espace de dialogue possible au sujet des mises en danger qui peuvent être négociées. On le voit, la fermeté doit toujours s’allier à la souplesse et vice versa : il faut dans tous les cas expliquer pourquoi l’on interdit tel comportement et pourquoi l’on autorise tel autre. Par ailleurs, lorsque les parents ne disposent pas de certitudes mais ont l’impression que leur adolescent vit de manière kamikaze son goût du sport, sa sexualité, etc., je leur conseille de tâter souplement le terrain – sans fourbir leurs arguments comme s’ils organisaient un traquenard pour un présumé coupable – par le biais de la radio, de la télévision, d’un fait divers lu dans les journaux concernant une personne proche ou une localité voisine. Par exemple, face à un jeune casseur qui se vante d’avoir réussi à faire venir les caméras dans sa cité et qui rit à gorge déployée pour donner l’impression d’une grande assurance, on peut glisser à son adolescent que si ce jeune est si démonstratif, c’est peut-être pour masquer le fait qu’il est au fond déboussolé et qu’il irait sans doute mieux s’il pouvait se confier seul, hors de sa bande, à un adulte qui accepterait de ne pas le réduire à un sauvageon…
Pascal Hachet
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