Rien ne prédispose véritablement ce provençal à peindre. Issu d’un milieu bourgeois vauclusien, Paul Guigou exerce la profession de clerc de notaire à Apt. Mais, pour s’échapper de cet univers plutôt rigide, il donne naissance sur ses toiles à des paysages de sa région natale. Cependant, en 1851, le jeune Paul sent qu’il est davantage fait pour l’art ! Trois ans plus tard, Paul Guigou prend une décision peu facile : il quitte la terre de ses ancêtres pour aller vivre à Marseille. Indépendamment de la luminosité légendaire et vérifiée de cette ville, il peut y fréquenter Loubon qui le guide dans son évolution picturale. C’est alors que Guigou trouve l’énergie nécessaire et suffisante pour exposer ses premières œuvres, notamment à l’exposition de la société artistique des Bouches-du-Rhône. Il y côtoie des artistes régionaux et non des moindres, tels Corot, Rousseau ou encore Puvis de Chavannes. Une belle assurance en place, Guigou sait qu’il doit gagner maintenant la capitale française. Il s’y rend et découvre les œuvres de Courbet. Il est marqué par le travail de ce géant de la peinture, comme on peut le retrouver dans ses toiles célèbres : Route de la Gineste (1859), Paysage de Provence (1860). Jusqu’ici, Guigou avait gardé, au nom du bon sens paysan, son activité notariale mais, en 1862, il quitte son milieu professionnel officiel et va à Paris. Il ne peut toutefois se passer facilement du sud de la France et y revient dès que possible. Dès 1863, Paul Guigou ne manque pas un Salon. Il reste fidèle cependant à ses racines et malgré une solide culture picturale, il demeure un peintre provençal de belle facture : Collines d’Allauch. La campagne parisienne l’émeut beaucoup moins, malgré sa très belle œuvre Vue de Triel. Bien qu’il soit un grand ami de Monticelli, le travail de Guigou rejoint davantage le réalisme de Bazille. Cependant, Paul Guigou souffre de voir sa situation financière au plus bas. Il est heureux et rassuré d’entrer au service de la baronne de Rothschild en 1871 en tant que professeur de dessin. Mais on n’échappe pas véritablement à son destin et si ce peintre voit une sagesse à accepter cet emploi, il n’est certainement pas né pour donner des conseils graphiques… Il le sait au plus profond de lui et c’est une congestion cérébrale qui met fin à des décennies d’incompréhension de son entourage… À 37 ans, Paul Guigou tire définitivement sa révérence, emportant avec lui son immense talent, loué aujourd’hui par les plus grands musées : Paris (Petit Palais), Marseille, Aix-en-Provence, Avignon, Montpellier, Toulon, Périgueux…
Ivan Calatayud