Frantisek Kupka
(1871-1957)
|
Ce peintre tchèque, de milieu modeste, démarre dans la vie professionnelle de façon tout aussi modeste : il apprend le métier de sellier. Son employeur est un être fantasque qui tient absolument à lui transmettre son goût immodéré pour l’ésotérisme ! Il va même jusqu’à lui démontrer qu’il a des dons de médiumnité exceptionnels. Kupka se sauve, d’autant que son apprentissage ne lui convient pas plus. En errant dans le pays, il découvre l’art régional qui l’auréole subitement d’une certaine sagesse. Il réintègre le lieu de son apprentissage. Son maître continue alors à affirmer que le jeune Frantisek est fait pour le spiritisme. Il le présente au maire de Dobruska, Archleb, féru de cette discipline. Parenthèse curieuse : le père de Kupka était alors secrétaire de cette même mairie… Mais Archleb ressent avant tout les talents artistiques du jeune homme et lui offre la possibilité de s’inscrire à l’école technique de Jaromer. Il y rencontre Studnicka, peintre de renom qui lui suggère de se diriger vers l’Académie des beaux-arts de Prague. Il accepte ses conseils et n’aura jamais à le regretter. Curieusement, le spiritisme l’effleure à nouveau et peut même l’influencer. Est-ce cette science intuitive qui le pousse à se rendre à Vienne pour fréquenter l’Académie ? Rien ne le prouve mais son élan artistique s’affirme dans cette nouvelle énergie. Il réalise d’excellents portraits comme sa toile célèbre : Schéhérazade. Kupka prend de plus en plus confiance en lui et voyage pour accueillir avec ferveur de nouvelles connaissances artistiques. Angleterre, Scandinavie, France. C’est en 1895 qu’il s’installe à Paris. Définitivement. Cependant, l’argent manque et l’artiste choisit pour survivre de donner des cours de dessin à des modistes. Il contacte également la presse satirique. Ses représentations graphiques sont acceptées, imposant des messages dirigés contre les responsables des inégalités sociales. La reconnaissance arrive. Il devient plus sélectif pouvant décider vraiment maintenant de ses supports d’expression. Il se lance dorénavant dans l’illustration d’ouvrages comme l’Homme et la Terre d’Élisée Reclus. Mais Kupka n’abandonne pas la peinture pour autant. De l’Impressionnisme, il passe au Fauvisme. L’Expressionnisme s’impose : l’Archaïque, 1910. À cette période, l’art bouge et fait de grandes enjambées. L’artiste est séduit. Il découpe ses toiles et se dirige vers l’art abstrait (Madame Kupka parmi les verticales). La géométrie s’empare radicalement du pinceau. Cet homme brillant s’intéresse à tout : littérature, musique, intégrant ses élans spontanés habilement dans ses œuvres. Sa rigueur modulée est sa signature et demeurera ainsi.
Ivan Calatayud