C’est au 55 rue du Faubourg-du-Roule que le 27 mars 1809 Ève-Marie-Henriette-Caroline Dentzel, fille d’un baron d’Empire, met au monde le petit Georges Eugène Haussmann. Son père, Nicolas-Valentin Haussmann, est Intendant de Napoléon Ier. Après des études au collège Henri IV et au lycée Condorcet, il suit un cursus de droit. Il a seulement 22 ans lorsqu’il est nommé Secrétaire Général de la préfecture de la Vienne à Poitiers, puis, un an plus tard, sous-préfet d’Yssingeaux. Quelques années à la tête de la préfecture de Bordeaux, sa carrière culmine lorsqu’il est présenté à Napoléon III par le Ministre de l’Intérieur Victor de Persigny. Le 22 juin 1853, il devient Préfet de la Seine. Un révolutionnaire urbainNapoléon III a besoin d’un homme fort pour son vaste projet de rénovation du centre de Paris. Voulant en faire un lieu prestigieux en accord avec l’idée qu’il a de son statut d’Empereur des Français, il trouve en la personne d’Haussmann un fonctionnaire à la hauteur de ses aspirations. La ville de Paris vit d’ailleurs depuis 2000 ans sur un schéma architectural conçu par les Romains et le peuple parisien accueille positivement ces travaux. Il voit naître de grands axes de communication permettant de se déplacer plus facilement (le Boulevard de Sébastopol, le Boulevard Saint-Michel, la Rue de Rivoli) et de relier les Halles aux gares. Par ailleurs, l’insalubrité recule de façon notable et les épidémies de choléra sont jugulées. Haussmann est également chargé d’organiser l’espace de façon à ce que les émeutes sanglantes qui ont eu lieu par le passé ne se reproduisent pas. S’il adhère à cette politique sécuritaire, elle est cependant loin de constituer l’objectif principal de son œuvre. Nicolas Chaudun, auteur d’un essai biographique aux Èditions Actes Sud, précise qu’Haussmann surpasse tous ses prédécesseurs par son professionnalisme. Il prévoit scrupuleusement les équipements souterrains qui offrent à la ville sa modernité… En ce sens, il devient l’inventeur de l’urbanisme. Quant à l’immeuble haussmannien, sa façade est en pierre de taille (plutôt qu’en pierre de parement comme autrefois) pouvant aller jusqu’à 20 mètres de largeur. Pourvu d’un balcon filant, il offre une homogénéité stylistique à la ville. Une œuvre qui rayonneHaussmann, entouré d’une équipe de bâtisseurs, parmi lesquels figurent des collaborateurs comme Belgrand et Alphand, donne aux Champs Élysées son visage actuel. Il crée le Parc des Buttes-Chaumont, des lieux de promenades comme le bois de Vincennes et le bois de Boulogne. Il met en valeur les monuments, réalise la Place de l’Étoile d’où partent pas moins de douze avenues. Il construit le théâtre de la Ville et le théâtre du Châtelet. Son œuvre rayonne partout en France. Des villes comme Rouen, Lille, Toulouse, Avignon et bien d’autres encore s’en inspirent. Ses idées novatrices s’exportent jusqu’à Alger, Berlin et Vienne. Les détracteursPour autant, Georges Eugène Haussmann a ses détracteurs et suscite quelques jalousies. On le surnomme même « Attila » à cause de la démolition massive d’immeubles vétustes. Jules Ferry fustige les sommes colossales engagées dans l’entreprise en éditant une brochure satirique intitulée « Les comptes fantastiques d’Hausmann », en référence à l’œuvre musicale « Les contes fantastiques d’Hoffmann ». On l’accuse à tort d’enrichissement personnel alors qu’il finit sa vie sans réelle fortune en regard de son métier. On lui reproche surtout le désir de vouloir associer son nom au renouveau de Paris. Ernest Renan rapporte qu’Haussmann aurait fait disparaître une île entière en Bretagne pour satisfaire ses ambitions architecturales, propos qui se sont avérés largement exagérés. Dans ses « Mémoires », un document précieux pour l’histoire de l’urbanisme, Haussmann fait montre d’un humour particulier. Rapportant une conversation au cours de laquelle son interlocuteur lui demande s’il désire être ennobli au titre de duc, il répond : Non, il faudrait me faire aqueduc, et ce titre ne figure pas dans la nomenclature nobiliaire…
Benoit Faret |
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