Pierre Bonnard
(1867-1947)
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Peu aisé d’aborder la peinture de Bonnard. À la fois, un classicisme ancestral domine son œuvre mais, comme l’atteste son «Nu devant la glace», qui date de 1933, ce corps dévêtu renvoie un caractère libre. En fait, rien d’étonnant à cela car, d’une part, ce peintre français appartient à un solide milieu bourgeois aux règles bien ancrées et, d’autre part, les mouvements réactionnaires de son époque – devant un Impressionnisme qui complèterait trop un académisme plus vraiment adapté à l’avancée du monde – font leur chemin dans la tête d’un Pierre Bonnard au caractère fort affirmé. Sa famille lui a certes donné de l’assurance, tout comme ses études supérieures brillantes le dirigeant vers l’Administration. Celles-ci ne l’empêchent d’ailleurs pas de s’inscrire dès 1887 à l’Académie Julian. De ce passage formateur naîtra le groupe des Nabis, dans le droit fil de Gauguin, groupe qui réunira également Maillol et Vuillard mais à l’origine duquel se trouvent Maurice Denis et Paul Ranson. À cette époque, sa peinture est taxée de tachisme violent. C’est vrai que la couleur se manifeste dans ses toiles mais pour mieux faire disparaître la précision du geste. Volontiers porté sur l’esprit caricaturiste, le travail de Bonnard déforme et, de facto, interpelle. Drôle, cet artiste s’amuse à représenter son époque telle qu’elle est aussi une fois le masque posé. Il reconnaît être un décorateur de l’intimisme. D’où son goût pour les panneaux, les paravents, les affiches. Bonnard confirme, quoi qu’il en soit, au travers de l’importance de ses créations, qu’il est un maître de l’intérieur et de l’intériorité.
Ivan Calatayud