John Singer Sargent
(1856-1925)
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Natif de Florence, la famille de John Singer Sargent quitte le berceau natal italien lorsqu’il est encore tout jeune enfant. Ses parents vivent alors en Espagne puis en Hollande pour s’installer finalement à Paris. La peinture l’attire au plus haut point. Est-ce une façon pour lui de retrouver une certaine mémoire florentine, toujours est-il qu’à 18 ans, il suit l’enseignement pictural de Carolus Duran ? Même si Sargent reste fidèle à l’adaptabilité de ses géniteurs, même s’il aime voyager – découvrant d’ailleurs les États-Unis à tout juste 20 ans –, la capitale française est une référence dont il a besoin. Excellent portraitiste, cet artiste n’aime pas se limiter. Il réalise ainsi des paysages raffinés qui deviennent une page écrite au pinceau… Il aime fréquenter les intellectuels bien nés. Ce qui ne l’empêche pas du tout de travailler avec acharnement. Il exécute le portrait de Madame Gautreau qui déclenche les foudres de la société française. Alors que ses œuvres pouvaient être vues au Salon, il décide de stopper de fait cette association et quitte par la même occasion la France pour Londres en 1885. En revanche, il ne modifie en rien son caractère, pénètre le milieu chic londonien dont il sent l’influence nécessaire sur la qualité quasi intellectuelle de ses tableaux. Malgré l’envergure de ses représentations, ce sont les États-Unis qui lui permettent de rencontrer la célébrité (Portraits de Mrs Gardner, 1887). John Singer Sargent ne traverse toutefois pas l’existence au hasard de ses rencontres. Il travaille avec acharnement, maîtrise et curiosité. Si l’œuvre de Velãsquez l’influence, l’Impressionnisme devient pour lui une sorte d’évidence au point d’ailleurs qu’il se lie d’amitié avec Monet. Grâce à cet autre immense peintre, Sargent allège sa palette et s’autorise davantage maintenant à aller à l’essentiel, tout en gardant un classicisme dont il ne voit pas l’intérêt de se détacher en… toile de fond ! Certains de ses contemporains aiment ironiser sur ce qu’ils analysent comme étant de la séduction de la part de Sargent : ils lui reprochent de rendre le visage à son avantage même si l’original n’a que peu à voir avec la restitution picturale du portrait ! Il est certain que si ce choix a pu servir la bonne réputation de ce peintre devenu officiellement américain, peut-on lui reprocher une mise en valeur de l’image ? Après tout, un peintre reste un psychologue qui a le pouvoir et le droit de libérer la part humanisante positive de ses modèles…
Ivan Calatayud