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La psycho
dans Signes & sens
Le bon apprentissage
de la lecture
et de l’orthographe
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L’apprentissage de la lecture et de l’orthographe constitue la base indispensable à tous les apprentissages ultérieurs et à la réussite scolaire ; il nécessite plusieurs pré-requis sans lesquels il ne peut se dérouler dans des conditions favorables. L’enfant doit avoir envie d’apprendre à lire.
Normalement, le goût de la lecture a été donné à l’enfant par les histoires que les parents lui ont lues chaque soir depuis sa plus tendre enfance et par le fait de voir les aînés prendre du plaisir dans cette activité. Il faut, sur le plan affectif, qu’il ait dépassé son attachement à la mère ou au père ; il doit donc avoir renoncé au désir d’appropriation de l’adulte de sexe opposé, gagnant ainsi une indépendance psychique qui lui permet de rejoindre les enfants de son âge, sans penser que ce serait mieux d’être seul à la maison avec maman ou papa plutôt qu’à l’école. Enfin, il est nécessaire d’avoir un développement intellectuel suffisant. Les psychologues situent ce niveau à six ans d’âge mental.
Âge réel et âge mental
L’enfant normal moyen de six ans d’âge réel a six ans d’âge mental ; un enfant peut avoir un âge mental supérieur ou inférieur à son âge réel selon son avance ou son retard intellectuel. Autrement dit, quel que soit l’âge réel, cinq ans, cinq ans et demi ou sept ans, ce niveau minimum de six ans d’âge mental, mis en évidence par un test de niveau intellectuel, est indispensable pour apprendre à lire. Or, pour un certain nombre d’enfants, il y aura des difficultés parce qu’ils n’ont pas atteint les six ans d’âge mental ; ce sera le cas de ceux présentant un retard intellectuel dû à de mauvaises conditions sociales ou de santé ; il leur manque de six mois à un an ou plus sur le plan mental de sorte que leur niveau réel de compétences se situe autour de cinq ans et demi, cinq ans, parfois moins ; ceux-ci vont ainsi se trouver en échec dès les premières semaines du Cours Préparatoire. De la même manière, certains enfants moyens nés à la fin de l’année civile, en novembre-décembre, n’ont pas non plus les six ans d’âge réel et par suite les six ans d’âge mental, d’où des difficultés prévisibles surtout en début d’apprentissage ; toutefois, ces difficultés peuvent se compenser au deuxième et troisième trimestres de l’année scolaire.
Les bases de l’apprentissage
L’enseignant s’adresse donc à un élève moyen de six ans alors que le groupe se compose d’enfants ayant une compétence réelle s’échelonnant de cinq à sept ans. Dans ce contexte, le choix de méthode a une importance considérable. Actuellement, les enseignants utilisent le méthode globale ou semi-globale qui consiste, dans un premier temps, à reconnaître d’un seul coup d’œil les mots sans les décomposer en syllabes, de sorte que l’on donne à l’enfant l’illusion d’un savoir lire sans efforts. Plus tard, vient la décomposition des mots en syllabes mais de façon secondaire, voire annexe, le but étant de lire globalement avec l’objectif privilégié de trouver du sens au texte. J’ai vu des enfants qui connaissaient au mois de juin leur livre de lecture par cœur mais qui se révélaient incapables de lire une phrase simple écrite de ma main. Inutile de dire qu’ils étaient tout aussi incapables d’écrire sous dictée. La méthode globale ou semi-globale peut convenir aux enfants intelligents mais elle est catastrophique pour tous ceux qui éprouvent des difficultés ; elle ne leur permet pas d’acquérir les bases de l’orthographe car, pour écrire correctement et lire, il faut impérativement travailler plusieurs semaines sur les syllabes simples (pa, po, pi, pu), sur les syllabes inverses (ap, op, ip, up) et les syllabes complexes (br, tr, pl, cr), comme on le pratique avec une méthode syllabique. Ce travail répétitif indispensable, au cours duquel l’attention de l’enfant est attirée sur la succession sonore des sons qu’il doit transcrire, sert à la fois à la compréhension de savoir comment on fait pour lire et comment on écrit. Les enfants, et parmi eux les plus faibles, ne sont pas suffisamment entraînés à faire ces « gammes » avec les syllabes en lecture et en orthographe. À cause de cette insuffisance de pratique, les enfants se mettent à faire des inversions, des confusions de sons dont les spécialistes ont fait une maladie : la dyslexie et la dysorthographie justiciables d’un traitement chez l’orthophoniste, remboursé par la sécurité sociale.
Très peu de vraies dyslexie ou dysorthographie !
Personnellement, je n’ai rencontré que très peu d’enfants présentant une vraie dyslexie ou une vraie dysorthographie. Lorsque l’on reprend, dès le début, l’apprentissage de la lecture avec eux, après s’être assuré qu’ils ont bien le niveau requis de six ans d’âge mental et en utilisant une méthode syllabique, on constate qu’ils apprennent tout à fait normalement et ne présentent plus les troubles dyslexiques ou dysorthographiques qu’on leur avait attribués. Beaucoup de pseudo dyslexies ou dysorthographies proviennent de la mise en œuvre d’un mauvais apprentissage, non pas de l’élève mais de l’enseignant, qui suit trop facilement les manuels et les modes qu’on lui propose. Toutes les études sur la lecture ont montré que la meilleure méthode en terme d’efficacité était syllabique et gestuelle (un son associé à un geste pour une meilleure mémorisation) ; elle permet au plus grand nombre d’enfants, même avec des difficultés légères, de maîtriser la technique de la lecture et de l’orthographe dans le délai imparti de l’année scolaire. De fait, et compte tenu de ces remarques issues de l’expérience, les parents soucieux de la réussite de leur enfant pourront leur assurer une aide efficace pour un bon démarrage dans cet apprentissage fondamental.
Jean-Pierre Bègue
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