|
La psycho
dans Signes & sens
J’interroge mes doutes
pour en finir avec la parano ! |
Le terme « parano » est dérivé d’une véritable pathologie mentale : la psychose paranoïaque, qui fit l’objet de la thèse de psychiatrie de Jacques Lacan. Le sujet mérite quoi qu’il en soit que l’on s’en préoccupe avant que ce qui ne s’avère être, au départ, qu’un simple trait de caractère, finisse par mettre à mal nos plus belles relations et, en particulier, celle que nous entretenons avec nous-même…
Être parano, au sens commun de l’expression, revient à intenter des procès d’intention à autrui, en cultivant un a priori subjectif. Tout individu est, à un moment de son existence, confronté à ce genre de réaction qui prend sa source au niveau d’un déficit du narcissisme.
Une identification projective
Douter constamment de soi déclenche un processus psychique archaïque bien connu des spécialistes : il s’agit d’un mécanisme de défense, appelé identification projective, consistant à attribuer à autrui ses propres auto-accusations. La psychanalyste Melanie Klein, en 1946, parle d’une position schizo-paranoïde inhérente à chaque être humain, mais qui doit être dépassée. Dans le cas des comportements teintés de parano, le sujet se persuade que l’entourage ne l’estime pas alors que c’est lui-même qui manque de confiance en lui. Même un compliment sincère peut être interprété comme une tentative de séduction mensongère. Les quiproquos se multiplient et la communication se détériore. La solution ? Se libérer des croyances erronées.
L’importance de parler de soi
Une croyance ne reflète pas une réalité mais demeure le fruit d’une représentation psychique. Chacun ayant sa propre représentation du monde et aucune n’étant plus vraie qu’une autre, seul l’échange verbal permet une interrogation salutaire. Ainsi, qu’est-ce qui vous pousse à affirmer que votre partenaire ne vous aime plus alors qu’il a seulement oublié, ce matin, la date anniversaire de votre mariage ? Pourquoi ce regard assassin – qui reste d’ailleurs souvent muet –, risquant de « plomber » l’ambiance ? Et si vous preniez plutôt les choses en main en lançant : Aujourd’hui, cela fait exactement huit ans que nous avons dit oui devant Monsieur le Maire. Je n’ai pas vu le temps passer… L’avantage de ce type de dialogue ? Vous parlez de vous et ne présupposez en aucun cas des pensées de votre conjoint. Au contraire, vous lui laissez la possibilité de s’exprimer. Et, du reste, peut-être n’a-t-il rien oublié du tout ?
Autodérision et optimisme
Se moquer gentiment de soi-même constitue un antidote très efficace pour en finir avec la parano. Paradoxalement, cette juste humilité pleine d’humour entretient à la fois une vraie confiance et relativise les contrariétés. À l’inverse, à se prendre de manière illusoire pour le centre du monde, on en vient toujours à souffrir. De l’humour à l’amour, il n’y a qu’un pas, affirme John Edward Tang dans « Plus d’amour dans votre vie », publié aux Éditions Fortuna. Je ne parle pas de l’humour des cyniques, continue-t-il, ceux-là se font mal à eux-mêmes. L’humour et l’amour sont ensemble une porte sur de vastes horizons ensoleillés. À condition, bien entendu, que l’amour ne soit pas soumis aux affres du doute. N’oublions pas à ce sujet que, comme l’a écrit Alexandre Dumas, en amour, qui doute accuse. Ainsi faut-il faire l’effort d’apprendre à être optimiste pour sortir de ce cycle infernal, quel que soit le cas de figure, en faisant confiance aux évènements. Les sondages toutefois sont inquiétants : 4 Français sur 5 se disent pessimistes, fabriquant à leur insu des angoisses résistantes qui finiront par attirer ce qu’ils redoutent ! Aussi devient-il indispensable de développer des réflexes positifs.
Le premier grand pas à effectuer consiste à donner du sens à chacune de ses propres actions, ce qui présente l’avantage de ne pas se focaliser sur un entourage considéré comme inquiétant. Dans un deuxième élan, il s’agit ni d’être dans un procès d’intention gratuit, ni dans la jalousie vis-à-vis d’autrui. Le troisième axe demande à avoir des objectifs réalisables qui n’attireront ni conseils, ni critiques, ni leçons de la part de l’entourage. Enfin, une attitude est à bannir absolument : demander l’avis systématique d’un proche car naîtrait de cette erreur une confusion des genres aux retombées funestes qui alimenteraient davantage la suspicion… En comptant sur soi-même, on évite de remettre en cause les bonnes intentions de notre environnement (familial, sentimental, amical ou professionnel). Alain, le philosophe, décline cette sagesse à sa façon : Pour être heureux, il faut y mettre du sien, nous a-t-il laissé en héritage…
Francine Didot
|