La psychanalyse n’est pas une méthode d’éducation ou de formation mais elle peut éclairer l’éducateur ou le formateur. Comme l’écrit en 1925 Sigmund Freud : « Le travail éducatif est une discipline qui ne doit pas être confondue avec l’approche psychanalytique, ni remplacée par elle. La psychanalyse peut être sollicitée par l’éducation comme un moyen auxiliaire »…
L’apport essentiel de la méthode freudienne est celui de considérer l’enfant ou l’adulte comme un sujet à part entière, et non un individu à formater… Jacques Lacan ne disait-il pas que la psychanalyse n’a pas le privilège d’un sujet plus consistant mais doit plutôt permettre de l’éclairer aussi dans les avenues d’autres disciplines...
Le transfert sur l’enseignant
Bien que le transfert soit un terme spécifiquement analytique, il n’existe pas uniquement dans la cure. L’individu a en effet une propension à projeter sur autrui des sentiments inconscients. Cependant, il ne s’agit pas d’une simple répétition des rapports parentaux. Il y a aussi un souhait inconscient de donner un coup d’arrêt à cette répétition. C’est sur la personne sur qui s’exerce le transfert que le sujet adresse cette demande. Dans une classe, cette demande est adressée au maître puisqu’il représente celui qui sait. Comme l’a énoncé aussi Lacan : Le transfert, c’est de l’amour qui s’adresse à du savoir. Nous retrouvons ici la position type de la relation enseignant/élève. D’ailleurs, Freud relève cette situation dans son texte « Sur la psychologie des lycéens » où il note en parlant de son expérience : Je ne sais ce qui nous sollicitait le plus fortement et fut pour nous le plus important, l’intérêt porté aux sciences qu’on nous enseignait ou celui que nous portions aux personnalités de nos maîtres...
Les groupes de paroles
Le premier dispositif de l’analyse des pratiques a été impulsé par Michael Balint. L’importance de tels groupes est de permettre aux participants de pouvoir reconnaître les enjeux inconscients qui se jouent dans la relation pédagogique. Ce travail amène l’enseignant à mieux cerner la position du sujet-supposé-savoir. Cette prise de conscience est fondamentale, notamment dans la capacité d’écoute qu’elle apporte à l’enseignant. C’est dans cet arrêt de ce « supposé savoir pour l’autre » que l’apport de la psychanalyse reste prépondérant pour inscrire l’acte éducatif dans une éthique. Ceci permet, comme le signale Francis Imbert, qu’une parole émerge du côté de l’enfant, qui vient réveiller du côté du maître une parole scellée parce qu’elle n’avait pas été entendue…
Dominique Séjalon
Formation et épanouissement personnel
Il ne s’agit pas pour le formateur uniquement de faire passer des informations afin de modeler un individu dans l’objectif qu’il s’insère dans la société. La formation, par la rencontre qu’elle propose entre deux sujets, permet aussi un épanouissement personnel et une meilleure appropriation de son identité. C’est d’ailleurs ce que le philosophe Emmanuel Levinas nomme l’entre-nous : Comprendre une personne c’est déjà lui parler. Poser l’existence d’autrui en la laissant être, c’est déjà avoir accepté cette existence, avoir tenu compte d’elle…