Le jeu de l’enfant n’est pas perçu de façon universelle
: les uns y voient l’occasion de développer
des compétences, les autres associent le
jeu au développement de l’esprit, et d’autres encore
conçoivent que le jeu permet à l’enfant
d’exprimer ses sentiments et de libérer ses tensions intérieures. Que les théoriciens contemporains
associent le jeu chez l’enfant à la croissance du corps, de l’esprit ou de l’âme, tous reconnaissent son importance.
Les premiers jeux de l’enfant lui permettent de découvrir son corps et d’en déterminer les limites. Puis la manipulation des objets lui en apprend les caractéristiques (ils sont durs, doux, lisses ou rudes) et le fonctionnement (on roule un ballon, le sable coule entre les doigts, l’eau peut porter un bateau, les crayons laissent des marques). L’enfant expérimente les diverses possibilités des objets et les utilise de toutes sortes de façons. Cette découverte du monde environnant ne concerne pas que les objets, mais aussi les personnes. Ainsi, l’enfant comprend très tôt que maman est fière du beau dessin qu’il a fait, puisqu’elle affiche son chef-d’oeuvre sur le réfrigérateur, alors qu’elle pousse des hauts cris et le punit pour ce dessin qu’il a fait sur le mur, même s’il est mieux réussi. Graduellement, il développe des stratégies d’action lui permettant de composer tant avec les objets qu’avec les gens. En jouant, l’enfant développe donc un savoir-faire et un savoir-être, autrement
dit des habiletés et des attitudes qu’il utilisera
dans diverses situations de sa vie quotidienne. Dans le jeu, l’enfant se « pratique », se prépare pour la vraie
vie.
Jouer, c’est éprouver un sentiment de maîtrise
Jouer, c’est aussi éprouver un sentiment de contrôle Les premiers jeux de l’enfant lui permettent de découvrir
son corps et d’en déterminer les limites. Puis
la manipulation des objets lui en apprend les caractéristiques
(ils sont durs, doux, lisses ou rudes) et le
fonctionnement (on roule un ballon, le sable coule
entre les doigts, l’eau peut porter un bateau, les
crayons laissent des marques). L’enfant expérimente
les diverses possibilités des objets et les utilise de
toutes sortes de façons. Cette découverte du monde
environnant ne concerne pas que les objets, mais
aussi les personnes. Ainsi, l’enfant comprend très tôt
que maman est fière du beau dessin qu’il a fait,
puisqu’elle affiche son chef-d’oeuvre sur le réfrigérateur,
alors qu’elle pousse des hauts cris et le punit
pour ce dessin qu’il a fait sur le mur, même s’il est
mieux réussi. Graduellement, il développe des stratégies
d’action lui permettant de composer tant avec
les objets qu’avec les gens. En jouant, l’enfant développe
donc un savoir-faire et un savoir-être, autrement dit des habiletés et des attitudes qu’il utilisera
dans diverses situations de sa vie quotidienne. Dans
le jeu, l’enfant se « pratique », se prépare pour la vraie
vie.
Jouer, c’est éprouver un sentiment de maîtrise
Jouer, c’est aussi éprouver un sentiment de contrôle sur son environnement et sur ses actions ; c’est éprouver
un sentiment de maîtrise sur une portion de sa vie.
Bien que l’enfant dépende de ses parents pour la plupart
de ses soins (nourriture, habillement, hygiène), il
est le maître tout-puissant dans son jeu : il est autosuffisant.
Aucune méthode ni règle précise n’étant
nécessaire pour jouer, chacune des tentatives de l’enfant
est valable. Il décide lui-même du début, du
thème, du déroulement et de la fin de son jeu. Il détermine
ce qu’il fait avec le matériel : il fait avancer
l’auto, refait le même casse-tête aussi souvent qu’il
le désire et colore la pomme en bleu si cela lui
chante. Comme il n’attend aucun résultat précis du
jeu, l’enfant peut prendre les initiatives qui lui plaisent
et il comprend rapidement qu’il a un effet sur
son environnement : il dépose un bloc sur un autre
et le voilà face à une petite tour ; il appuie sur une
manette et le jouet se met à faire de la musique. L’enfant
expérimente alors un sentiment de contrôle sur
les objets et de maîtrise sur la situation : il est capable
! Le jeu devient source de gratification et contribue à renforcer son estime de lui-même. Lors de difficultés,
l’enfant utilise ses ressources personnelles pour
trouver des solutions : ainsi, cet ourson tout mou ne
peut tenir assis sans aide mais, appuyé sur le mur
dans le coin de la chambre, il y parvient. Cette capacité
à résoudre les problèmes contribue aussi au sentiment
de maîtrise de l’enfant et peut être mise à
profit dans diverses situations de sa vie quotidienne.
Comme ce n’est qu’un jeu, il peut même courir le
risque d’échouer et tenter de monter sa tour...
jusqu’au ciel. Quand l’échec survient, l’enfant apprivoise
un contexte où les conséquences sont minimes
et dans lequel il apprend à réagir.
Jouer, c’est imaginer et créer
Le jeu est aussi le lieu des fantaisies, des solutions
farfelues, de la débrouillardise. Utilisant ses habiletés
créatives, l’enfant décide ce qu’est la réalité, la
transforme et l’adapte à ses désirs. La créativité de
l’enfant, sorte de bricolage intellectuel mettant bout à bout divers éléments pour créer une idée nouvelle,
peut être vue comme son imagination en action.
Dans son jeu, il donne vie aux objets, crée un ami
imaginaire, fait bouger l’inanimé, pleurer les végétaux
ou parler les animaux. Il peut être indifférent au
temps et à l’espace et passe ainsi sans transition de
l’époque de l’Homme des cavernes à l’ère spatiale.
La seule limite, c’est son imagination et les restrictions
qu’impose son environnement. Avec les années,
l’enfant pratique des jeux de plus en plus près
de la réalité et utilise les matériaux du monde réel.
Jouer, c’est s’exprimer
Même si l’enfant ne parle pas, dans son jeu il exprime
ses sentiments, tant positifs que négatifs. Lancer
un objet par terre, sourire à un personnage,
déchirer un dessin, présenter un objet à un partenaire,
provoquer un accident, voilà autant de gestes qu’il
utilise pour communiquer ce qu’il ressent. Le jeu est
en quelque sorte le langage primaire de l’enfant, son
langage dans l’action, qui lui permet de livrer son
monde intérieur et ses émotions, tout autant que son
monde imaginaire. L’adulte est parfois sourd à cette
forme de communication tacite. Ainsi, il interdira vigoureusement
tout geste de l’enfant qu’il perçoit
comme étant agressif sans en comprendre le véritable
sens. Par exemple, peut-être grondera-t-il l’enfant
qui bouscule violemment son ourson, le jetant par
terre et se fâchant contre lui, sans s’apercevoir que
c’est là une façon saine pour l’enfant de réagir à ce
nouveau bébé fraîchement débarqué dans sa famille
et qui prend tellement de place dans la maison. Le
jeu permet à l’enfant de déplacer sur des objets-substituts
ses désirs et ses frustrations. De la sorte, le jeu
lui sert de soupape émotive. Par ailleurs, il arrive fréquemment
que l’enfant parle tout seul en jouant.
C’est pour lui l’occasion de pratiquer ses habiletés
verbales, expliquant à ses jouets ce qu’il fait, ce qui
se passe. Cet exercice du langage favorise l’essai de
nouveaux mots. Selon Bruner (« Jeu, pensée et langage », Ed. Perspectives, 1986), l’apprentissage de
la langue maternelle est plus rapide s’il s’inscrit dans
un contexte ludique.
Jouer, c’est surtout expérimenter le plaisir
Jouer, c’est toutefois avoir du plaisir d’abord et avant
tout. Cette sensation de plaisir peut être associée à
certaines caractéristiques propres à toute situation de
jeu : la nouveauté, l’incertitude et le défi, défi qui
doit cependant être perçu par l’enfant comme étant
surmontable. Si le défi est absent du jeu, l’enfant
s’ennuie ; si le défi est trop grand, il se décourage.
Dans le jeu, la nouveauté attire l’enfant qui prend
plaisir à défier l’incertitude et à relever le défi.
Comme rien n’est réglé à l’avance dans le jeu, tout
peut arriver ; la curiosité est éveillée et entraîne l’enfant
vers la découverte du plaisir intrinsèque du jeu.
Il souhaitera maintenir cette sensation agréable de
plaisir et développera un intérêt à jouer et donc un
intérêt à agir.
Francine Ferland*
*Pour en savoir plus, lire :
« Et si on jouait ?
Le jeu chez l’enfant de la naissance à six ans »,
Éditions Hôpital Sainte Justine.