À une époque où la haute technologie nous époustoufle, quel besoin avons-nous encore d'utiliser du symbolique à tout va ?
S'il pleut à la Saint Médard..., Un tient vaut mieux que deux tu l'auras…, Il ne faut jamais vendre la peau de l'ours..., Pierre qui roule n'amasse pas mousse, Noël au balcon, Pâques aux tisons… Nous utilisons et véhiculons ces pensées énigmatiques un peu comme des vérités absolues. Voilà qui est gênant tout de même car toutes ces compulsions verbales séculaires contiennent - reconnaissons-le - une menace implicite. À quoi jouons-nous donc, même si nous proférons le jour d'une union affective légale se déroulant sous une pluie battante : Mariage pluvieux, mariage heureux ! ? Tout basiquement, à mal mettre en garde. Rien de bien rassurant alors, au contraire. Il s'agit de moyens (discutables) pour dire qu'après la pluie vient le beau temps... Voici encore une façon peu louable d'insinuer que, de la même façon, le mauvais succède toujours au bon.
L'être humain est décidément bien tortueux, voire tordu, lui qui projette dès lors qu'il maxime, dictonne ou proverbe ; ainsi, essayons plutôt d'admettre que toute vérité n'est pas bonne à dire ou qu'il faut tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler. Tout simplement parce que les mots, aussi banals qu'ils puissent paraître, peuvent blesser. Et surtout avoir un impact conséquent, non mesurable, au moment où nous les libérons. Certes, s'identifier à l'agresseur peut faire l'affaire un temps, en arrêtant l'interlocuteur mal intentionné : C'est celui qui dit qui l'est (laid ?), par exemple mais, quoi qu'il en soit, plus juste est de reconnaître que les conseilleurs ne sont pas les payeurs, cependant qu'on peut admettre malgré tout qu'il faut de tout pour faire un monde...
En d'autres termes, méfions-nous de ne pas polluer le récepteur. La sagesse doit prévaloir car nos bonnes intentions peuvent en cacher d'autres, plus malveillantes encore. Les mots d'esprit, condamnés par Freud lui-même, doivent appeler à la méfiance. Nos dires sont souvent moins innocents dans le fond que ce que leur forme nous donne à entendre.
Chantal Calatayud