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La psycho
dans Signes & sens
Ne pas commettre d’erreurs
d’évaluation scolaire
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Le postulat freudien d’inertie neuronique, principe par lequel sont évacuées des quantités d’énergie reçues, associe le processus de la pulsion inhibée quant au but. Ainsi et paradoxalement certains sujets fantasment-ils inconsciemment l’échec comme les préservant...
Capacités scolaires et connaissances sont les critères de sélection de notre système social. Poussé à l’extrême, ce type d’approche arrive curieusement à la sélection par l’échec. Rien de plus inégalitaire, dans la pratique, que ce système de distribution de savoirs puisque nombre d’enfants et adolescents sont en situation de démission scolaire.
Des axes normalisateurs et réparateurs
Le phénomène est suffisamment significatif pour qu’une des principales orientations ministérielles, en matière d’Éducation Nationale, soit d’y remédier. Le mot est lâché : remédiation avec, en filigrane, une conception toute normalisatrice et réparatrice. L’enfant est appréhendé comme malade de son échec scolaire. On se penche donc à son chevet. Il est objet de remèdes. Les années qui viennent de s’écouler assistèrent, en la matière, à plusieurs moyens et approches mis en œuvre. Des structures telles que R.A.S.E.D, composées de psychologues scolaires, ré-éducateurs et maîtres de classe d’adaptation pour l’école primaire, ont pour mission de lutter contre l’échec scolaire. Or, paradoxe, alors que l’échec scolaire est toujours au premier rang des préoccupations, ces réseaux d’aide tendent à être réduits, voire à fonctionner dans des conditions loin d’être optimales, peu d’enseignants recevant la formation prévue par l’Éducation Nationale. Un autre des axes principaux de cette lutte est la pédagogie dite différenciée en ce qu’elle est supposée s’adapter à chaque enfant. L’idée est belle mais, dans la réalité, elle achoppe sur les effectifs des classes, tout comme sur les prémisses de cette approche. Il ne s’agit que de contenus à faire acquérir. Les choses sont mises en terme de retard à rattraper.
Une façon de se défendre
Certes, le système a évolué pour passer, officiellement, des contrôles de connaissances à l’évaluation des compétences, processus d’acquisition et acquis. Il y a là, à n’en pas douter, un affinement ; il n’en demeure pas moins que c’est d’une vérification qu’il s’agit et dont dépend la suite du cursus scolaire. Sont alors gommés les verrous qui s’opposent à ce que l’enfant réussisse. René Laforgue a introduit le terme de névrose d’échec où l’échec est conséquence du déséquilibre névrotique. Le sujet se situe, quant à son sexe, dans un processus conflictuel par où se crée une sorte d’impuissance psychique. L’échec résulte d’une auto-punition surmoïque. L’approche institutionnelle, malheureusement, conçoit l’échec en tant que condition déclenchante, ce qui est à l’inverse de l’approche psychanalytique et réduit l’enfant à un élève doté d’un seul cerveau défaillant ou performant. Seuls les contenus - résultats - sont pris en compte au grand dam du contenant - l’enfant - ici accessoire. Dans cette perspective, la re-médiation semble vouée... à l’échec ! Ainsi est fixé un minima en-deçà duquel il y a échec avec, pour corollaire inversé, le mythe de l’enfant sans problème, valorisant pour les parents et enseignants. Il ne s’agit en rien de dire qu’une norme n’a pas de valeur dans un système institutionnalisé mais la question centrale, semble-t-il, est plutôt : comment cette opposition à la réussite qu’est l’échec peut-elle être opérante ? L’enfant d’ailleurs ne s’y trompe pas qui, sachant les résultats surinvestis par ses parents, vit rarement bien au conscient cette situation de blocage. Pour autant, à l’inconscient, il en va autrement ; par cette stratégie, l’enfant fantasme arrêter le temps. C’est un refus d’identification. C’est aussi et surtout un refus du changement. L’enfant, tentant de ne pas répondre à ce qu’il fantasme être l’attente parentale, ne veut pas grandir, ni devenir adulte trop rapidement. Par le moyen de l’échec, il se réfugie dans l’inertie avec, pour prix, une auto-dévalorisation qui s’installe en spirales récurrentes à chaque nouvel échec, avec ainsi un renforcement du complexe d’infériorité et la mise en place de comportements passifs ou agressifs. C’est que le monde des adultes est, par l’adulte lui-même, souvent présenté à l’enfant comme une foire d’empoigne, une lutte pour dominer, pour vaincre les concurrents. Cette arène sociale ainsi abordée a tout des jeux du cirque romain, avec la mise à mort du vaincu. Une telle conception, où la rivalité est reine, a de quoi déclencher en défense une inertie qui, bien que dommageable, paraît à tout prendre moins dangereuse. L’enfant fantasme ainsi se défendre...
Fabienne Berthier
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