La psycho
      dans Signes & sens

      Politique et liberté,
      un désir impossible

      Politique et liberté, un désir impossible
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      La liberté s'oppose-t-elle au pouvoir politique ?
      Cette antinomie qui détermine l'allégeance au pouvoir politique et le désir de satisfaire nos pulsions se présente comme un schème des plus tyranniques pour l'instance de plaisir, c'est-à-dire le ça. L'État se présente sous forme d'institutions administratives : police, fiscalité, administrations sociales et autres qui sont autant de substituts parentaux qui asservissent nos pulsions instinctuelles et nous subordonnent à la mamelle de l'Etat, ce qui est particulier à une Europe conservatrice vieillissant mal et plus encore à une France, lasse de ses réactions bourgeoises et du mécontentement populaire permanent. Ce que le père ou l'Etat nous refuse comme accession à nos désirs, castration ou fiscalisation, la mère culpabilisée par cette injonction nous en abreuve chichement par des prestations infantilisantes. Si on ramène la politique à l'éducation, ce ne sera pas sans dire, dans ces conditions, que l'État se considère de droit comme étant missionné de la fonction d'éducateur et de rôle nourricier envers ses administrés qu'il juge comme des enfants immatures. Est-ce bien la fonction de l'État de se prévaloir à la fois du complexe paternel et du complexe maternel, alors que cela consiste dans le triangle familial à ce que la mère console son enfant chaque fois que le père objecte à ses désirs ? On ne s'émeuvra plus dès lors, confronté à un tel dilemme, de voir l'enfant perturbé dans ses choix et l'adulte coupé de tout désir puisque perfusé au goutte-à-goutte des assedicleptiques et des alloc-azines dont il hante les halls à la recherche de son objet d'amour perdu. Personne ne revendique la liberté absolue, si ce n'est peut-être le psychotique ou le révolté. Le principe de réalité a été bien intégré au cours de la psychogenèse ; la frustration du désir immédiat a appris au principe de plaisir à attendre et à différer ses espérances.
      La vie sociale présuppose-t-elle formellement s'élaborer sur la part de désir non réalisable ou de la frustration de l'objet convoité ? L'homme social n'est plus à l'état de nature souverain de ses pulsions instinctuelles selon J.J. Rousseau, mais aliéné à la collectivité par le contrat social. L'État exerce la fonction symbolique du père, du signifiant totémique introduisant la loi et les règles d'une communauté, dont les attributions résident dans normaliser les pulsions sexuelles et agressives des êtres qui la constituent.

      Quelle politique l'État se doit-il d'instaurer ?


      La créativité, le travail et l'investissement intellectuel suffisent-ils à détourner les pulsions de leur but et de leur objet sexuel pour des objets sociaux valorisants ? Le contexte économique réussit dans une certaine mesure à donner l'illusion de satisfaire certaines pulsions anales, d'avoir le plus, jouissance de l'objet tout au moins pour une partie de la population. Mais qu'advient-il pour ceux qui restent collés au sein hallucinatoire ou à la mamelle étatique ? De ce sevrage rendu impossible à cause du don social ne peut officier de cette place la fonction symbolique du père ordonnant l'interdit ou la castration. Comment parvenir alors à un mode acceptable de satisfaction des pulsions agressives et sexuelles des individus, si la castration symbolique ne s'exerce plus de droit ? Si de la frustration naît. le désir, qu'on ne s'étonne point de voir les accros du subside, anesthésiés par le calmant lait maternel, se désocialiser progressivement, tombant dans un processus dépressif de déréliction ! On peut, à ce stade, mettre en équation les différentes étapes qui conduisent à la vie ou à l'autodestruction. Toujours ce paradoxe, pulsion de vie/pulsion de mort qui régit la vie de l'individu : frustration – désir – sublimation pour la pulsion de vie, assistance – dépendance – dépression ou extinction du désir pour la pulsion de mort. Pour l'adulte et son devenir social, la sustentation le conduit à attendre la substance qui le spolie du désir d'être et l'amène dans le registre régressif de la désocialisation, du non-être. Croyant subvenir à la pitance de ses oisillons quémandant la béquée, la mère-État se rend coupable de leur couper les ailes, d'étouffer tout désir d'autoréalisation faute de ne pas les pousser hors du nid.
      La véritable liberté, que l’individu peut espérer, est-elle la réussite sociale qui promeut l’homme dans la sphère des parvenus, seuls à pouvoir jouir du « plus » de la société ?
      La société libérale capitaliste tend à laisser supposer que le plus de jouir est réservé aux aréopagites des finances et à leurs licteurs ayant élu pour dieu Erosdollar ou Eroseuro. Qu'en est-il dans ce système de la liberté de ceux qui ne sont pas à leur place, dominés, subordonnés à une société qui n'est plus la leur, esclaves d'un travail pour lequel ils n'ont aucune affinité et méprisent. Où est la liberté si l'accès au désir n'est plus possible et si la jouissance du plus n'est même plus image de rêve. La liberté de penser n'est pas une liberté intangible même si pour Spinoza elle est partie insécable de l'homme. Se suffit-elle pour accéder au désir, à l'inné de tout individu ? Faut-il encore qu'il ait quelques degrés de latitude pour sublimer ses pulsions sexuelles. Le capital, accessible pour certains, impossible pour d'autres, n'est qu'un produit d'excrétion, surplus entre production et consommation qui conditionne les relations humaines dans un rapport dominant – dominé. Il ne reste plus qu'une alternative dans le système économique qui nous subjugue : disposer de notre droit à la révolte pour Hobbes, ou fuir vers les îles exquises laissant les fossoyeurs se délecter de leur politique vampiriste. La civilisation se trouve déchirée entre deux pôles de forces pulsionnelles qui l'agrègent ou la désagrègent. La pulsion de vie ou Eros, selon Freud, exerce des forces de cohésion tendant à maintenir les unités individuelles en contact permanent suivant le principe d'échange économique et à les associer en mégapole. La pulsion de mort ou Thanatos cherche à saborder cette cohésion et à la réduire à l'état anorganique. Les désirs interdits refoulés constituent la part incongrue des motions pulsionnelles non satisfaites entraînant un sentiment de culpabilité inconscient, seul facteur capable de retenir le souffle destructeur des pulsions agressives et son cortège de rejetons polymorphes. Le renoncement à une partie de la satisfaction pulsionnelle peut se retourner contre le moi, se payer sur la bête et par surcroît s'enivrer d'une jouissance morbide pour devenir saint-homme. Alors comment parvenir à ce fragile équilibre de la société entre les interdits et les désirs ?
      Jean-Jacques Rousseau nous dit que la plus ancienne de toutes les sociétés et la seule naturelle est celle de la famille. Mais, tout chef d'État ne prend pas la place du père de la nation, même symboliquement, comme tout système politique tend à nous le faire croire. Il est exempt de l'amour paternel et du désir d'affranchir ses sujets et use ou abuse du symbolique Nom-du-Père pour nous priver toujours davantage d'une partie de nos désirs au nom d'une loi. Mais la loi est-elle péché ? Loin de là ! clame Saint-Paul. Mais je n'ai connu le péché que par la loi. Car je n'aurais pas connu la convoitise si la loi n'eût dit : Tu ne convoiteras point. Et le péché, saisissant l'occasion, produisit en moi par le commandement toutes sortes de convoitises car sans la loi le péché est mort. L'exercice du pouvoir consiste-t-il à vouloir faire une société de candides lorsque l'on sait que n'est vertueux que celui qui se sent inconsciemment coupable ? La conscience morale, c'est la perception interne du rejet de certains désirs que nous éprouvons, étant bien entendu que ce rejet n'a pas besoin d'invoquer des raisons quelconques, qu'il est sûr de lui-même écrit Freud dans « Totem et Tabou ». Le pouvoir politique aurait-il quelques scrupules inconscients sur les vertus et mérites de ses actes qu'il s'arroge le droit de brimer les désirs du tiers, les travailleurs payeurs ? Le surmoi frappe le sujet de l'interdit et le renvoie à l'ordre social mais plus la satisfaction pulsionnelle se voit réprimée, refoulée, plus le surmoi devient impitoyable et barbare envers lui-même et le paternalisme étatique sévissant pour ramener ses enfants à une éthique surmoïque acceptable à ses yeux, trouve naturellement l'allégation au césarisme. Cette société bureaucratise, institutionnalise, informatise, re-catégorise non plus féodalement parlant mais selon le plus-de-jouir recouvré sous forme de plus-value par le capitalisme libéral. Lacan élabore à partir de Marx la concordance analytique entre le plus-de-jouir et la plus-value du capital. Le travail peut donner l'illusion de l'accès à l'objet a disparu depuis belle lurette mais pourtant toujours là, mirage de l'Autre. La jouissance perdue de l'objet fantasmé tombe dans l'escarcelle du capitalisme comme plus-value. Les objets de consommation, seuls accessibles au travailleur, prennent des allures d'objets auto-érotiques se substituant à l'objet a cause du désir et excluant l'autre. De ce schème politico-économique, l'individu se voit coupé de l'individuation possible tant redoutée des pouvoirs publics mais aliéné à son propre individualisme croissant, détaché des liens qui constituent la trame de la société. L'onanisme de consommation est devenu aujourd'hui justifiable aux yeux de tous et sans affres de pruderie. C'est à celui qui exhibe le plus son obélisque consommable dans l'espoir de séduire, d'être adulé et surtout reconnu par l'autre. Toute société de consommation se caractérise par l'exploitation du manque à avoir de ses sujets, écran d'un manque à être profond, dont la castration imaginaire a fait surgir le désir inextinguible de récupérer l'objet de convoitise.

      Le chant des psychosés


      Le désir naît de la frustration avons-nous dit plus haut. Mais qu'advient-il quand le désir ne peut plus se satisfaire d'aucune façon même dans l'illusion et que la frustration prend des allures de privation, d'interdit de consommer faute d'argent ? Paradoxe de cette société où l'argent pose l'interdit à la jouissance pour les exclus, les Rmistes, les oubliés du capitalisme, les Béotiens qui s'empressent de se culpabiliser à coup de prestations lénifiantes. Combien de temps encore les sédatifs sociaux entretiendront-ils la culpabilité et sa jouissance morbide ? Même les bonnes vieilles névroses d'antan ne font plus recette et laissent leur place aux névroses narcissiques. La structure de l'édifice social s'élabore sur le renoncement des pulsions libidinales mais cela ne veut pas dire qu'elles disparaissent pour autant qu'on les mate. C'est oublier que les pulsions ou les poussées libidinales se satisferont irrémédiablement dans les vicissitudes des méandres du moi, par les chemins détournés dont seul l'inconscient a le plan secret mais aussi la clé de leur funeste destin. Toutes ne se sublimeront pas pour la joie, l'extase ou la jouissance de soi ou des autres. Que peuvent sublimer les relégués du système, les assignés à la marge de la société ? Nous ne parlerons pas de la multitude des voies déviées, empruntées par les pulsions non satisfaites causes du malaise de la civilisation, du mal être tout court, de ses somatisations et de ses symptômes qui fleurissent aussi vite que les pilules et cachetons miracles supposés magnifier le manque, mais du retournement de la pulsion sur le moi appelé narcissisme, c'est-à-dire de l'amour porté sur un objet particulier, le moi. Ce singulier renversement de la pulsion définit le champ des psycho-névroses narcissiques ou des psychoses. La logique est formelle pour les pulsions libidinales non satisfaites et les désirs impossibles à assouvir, de s'approprier le seul objet disponible, le moi lui-même. La déception amoureuse conduit à se complaire de sa propre image, à s'y dissocier pour régresser à ce moment-là dans la plénitude du narcissisme primaire et sa toute-puissance. Ulcéré, lacéré depuis l'enfance par souffrance de la perte de l'objet chéri, il ne trouve plus qu'un recours à son profond malaise, réactiver à sa source la fonction érogénéisée du moi. L'enfoncement du sujet dans cet état le coupe du lien social ou seul le réel devient sa loi. La barre tombe sur le sujet comme un couperet, le dissociant de la réalité. Le réel est ce qui échappe à la symbolisation de la fonction paternelle et fait dire à Lacan que le réel ne cesse pas de ne pas s'écrire et revient toujours à la même place dans le discours, se dérobant au signifiant, à l'univers dialectique, au monde raisonnant.
      La violence des banlieues, le fléau de la drogue, le racisme, l'intolérance, l'individualisme, le nombre croissant d'exclus sont autant de signes subversifs qui menacent la société qui tente de s'en accommoder, préférant la répression à l'interrogation. L'interdit engendré par l'instance du surmoi ou par la castration symbolique du Nom-du-Père enfante la raison mais aussi la folie lorsqu'il y a forclusion de la loi. Le phénomène a pris suffisamment d'amplitude pour être devenu le symptôme des sociétés occidentales et bien au-delà. Et Lacan d'insister : Le réel c'est ce qui revient toujours à la même place, à cette place où le sujet en tant qu'il cogite, ne le rencontre pas. L'impossible désir menace de revenir dans le réel sous des formes aussi violentes qu'imprévues et de nous sortir un beau matin, au rythme des chants séditieux, de nos rêves de bon samaritain.

       

      Jacques Roux

       

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