Pas facile de se retrouver avec des enfants, plus ou moins grands, fruits de l’union précédente de notre compagne ou compagnon… L’image de la famille recomposée parfaitement sereine se matérialise rarement ! D’autant qu’une belle-mère ou un beau-père ne sont pas toujours bien accueillis par des jeunes déjà tiraillés entre leurs deux géniteurs.
Les petites filles rêvent presque toujours de devenir maman, jamais d’être une « marâtre ». C’est pourtant le sort qui attend de nombreuses femmes. Une tâche difficile, ingrate, et à laquelle elles ne sont le plus souvent pas préparées. Même si, contrairement aux beaux-pères, les belles-mères ne partagent généralement pas le quotidien des rejetons de leur compagnon, elles subissent plus de pression. En tant que femmes, on attend davantage de leur part. C’est comme si cela allait de soi, observe Marianne, 28 ans : Quand la fille de mon mari vient chez nous, c’est moi qui m’occupe de tout ou presque. Cela ne me dérange pas, je le fais avec plaisir. Mais j’aimerais quand même avoir un minimum de reconnaissance. Après tout, c’est lui le père ! C’est lui qui devrait s’occuper de son enfant, au lieu d’aller voir des matches de foot en me laissant seule avec elle…
Le bouc émissaire idéal
Un « manque de reconnaissance » : l’expression est fréquente dans la bouche des beaux-parents et surtout des femmes. Si les chemins du beau-parent et du parent biologique se séparent, bien souvent le parent de substitution n’a plus aucun contact avec eux, alors qu’il leur a consacré parfois des années de sa vie.
On n’a aucun droit, aucune vraie place, constate amèrement Sarah. Les pères divorcés, les grands-parents ont le droit de voir les gamins, ce qui est on ne peut plus normal. Mais que fait-on de nous ? Pourtant, on les aime aussi ces enfants. Peut-être d’autant plus que ce n’était pas gagné d’avance, que ça n’allait pas de soi. Et du jour au lendemain, vous êtes éjecté de leur vie. Sans qu’on ne vous doive rien... Entre les pères qui ne s’occupent pas suffisamment de leur progéniture et ceux qui s’y consacrent exclusivement au point de négliger leur compagne, sans oublier l’influence négative des «ex» qui n’hésitent pas toujours à se servir des enfants pour véhiculer leurs rancœurs, le beau-parent peut donc facilement faire figure de bouc émissaire idéal, même s’il n’est pour rien dans la séparation des anciens partenaires.
Un rôle ingrat
Pourtant, une relation de qualité peut s’instaurer entre beaux-parents et beaux-enfants. Voici quelques pistes :
– Laissez du temps au temps. Ne croyez pas que vous allez être tout de suite accepté, voire aimé. Beaucoup de facteurs rentrent en compte, comme l’âge des enfants. Généralement, s’ils ont moins de cinq ans, c’est plus facile. Les plus jeunes étant ceux qui s’attachent le plus vite à un autre adulte. Dans tous les cas, ne tenez pas les choses pour acquises. C’est en vivant au jour le jour avec les héritiers de votre partenaire, en créant des souvenirs communs, que les liens se tissent peu à peu. Ne forcez pas ce processus, il doit se mettre en place naturellement.
– Essayez d’apporter autre chose à l’enfant. André, 55 ans, est un fou de mécanique. Il avait peu de points communs avec les deux jumelles de sa seconde femme. Mais quand elles ont commencé à prendre des leçons de conduite, il a été très présent, les amenant conduire sur des petites routes de campagne, leur faisant répéter les manoeuvres problématiques… Cela a suffi pour le rapprocher des jeunes filles qui ont compris qu’il ne leur était pas hostile puisqu’il leur consacrait de son temps.
– Discutez des problèmes de loyauté. Parfois, les jeunes ont peur de « trahir » leur parent biologique s’ils se laissent aller à éprouver de l’affection pour leur beau-parent. N’hésitez jamais à parler avec l’enfant ou l’adolescent du sujet, de façon la plus sereine possible.
– Mettez-vous bien d’accord avec votre partenaire. Votre venue dans son existence change forcément les règles de vie en commun. Vous pourrez fort bien avoir des exigences différentes en ce qui concerne les horaires, la nourriture, le rangement, etc. Avant d’aborder le sujet avec les enfants, réfléchissez-y avec votre compagnon ou compagne. Vous devez présenter un « front uni ».
– Restez zen mais intransigeant sur certains aspects. Si vous avez droit au célèbre couplet « T’es pas mon père/ma mère », ne vous énervez pas. Effectivement, vous n’êtes pas le géniteur de cet enfant. Mais ce n’est pas parce que vous ne l’êtes pas que vous n’avez pas le droit, comme tout un chacun, à un minimum de respect et de politesse. Surtout de la part d’un enfant qui vit chez vous. L’idéal est bien sûr une bonne relation entre les parents. Le mari de Mathilde, père de ses trois enfants, est décédé cet été. La situation est très dure à vivre pour elle qui a toutefois la chance de pouvoir compter sur le soutien de Michel, son nouveau compagnon :
Il a dit aux enfants : « Jamais je ne pourrai remplacer votre papa mais je veux que vous sachiez que vous pourrez toujours compter sur moi ». Il m’aide énormément à surmonter ce drame et à soutenir mes garçons. Et si cela se passe aussi bien entre eux et lui, c’est parce que quand mon mari était encore là, nous nous retrouvions parfois à dîner amicalement tous ensemble. Mon époux appréciait beaucoup Michel. Grâce à cela, mes fils n’ont pas peur de trahir ou d’oublier leur père en s’attachant à lui… Ainsi, ni trop proche, ni trop distant, ni trop sévère, ni trop permissif, l’art d’être beau-parent requiert humour, patience et tact… Mais surtout une grande et belle intelligence du cœur.
Nadine Girard