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La psycho
dans Signes & sens
Le concept d’appareil psychique groupal, développé par le psychanalyste R. Kaës, a permis de dégager l’idée d’appareil psychique familial, formule développée par A. Ruffiot. La pratique montre que la famille a une forte tendance à régresser lors d’une thérapie analytique groupale. C’est lors de ce repli que la spécificité psychanalytique intervient. L’approche de la thérapie analytique s’appuie sur les comportements inconscients de chacun des membres de la famille, contrairement à d’autres formes de traitements qui ne se basent que sur des techniques comportementalistes et/ou systémiques.
« Au commencement était le ça »
Cette phrase de Sigmund Freud, exprime le postulat de base de la thérapie analytique familiale. En effet, les prémices de cette thérapie s’appuient sur les premiers temps de la vie psychique. En nous étayant sur les travaux de Winnicott, Tausk, Bion et Ferdern, nous constatons qu’au tout début de la vie, il y a préexistence d’un moi psychique qui s’intègre progressivement lors de son développement au moi corporel. Ce moi psychique du commencement de l’existence se présente donc comme un moi ne possédant pas de réelles limites. Il faudra qu’il acquière une forme de maturité pour pouvoir, selon Winnicott, habiter progressivement le corps, ou comme le dit Ferdern pour incorporer progressivement le corps. Le psychanalyste André Ruffiot souligne que cette psyché primaire mal délimitée, mal individuée, persiste chez chaque individu à l’état de refoulé. Pour cet auteur, cette position du Moi permet une forme d’ouverture à l’autre qui se réactivera de façon inconsciente dans le groupe, et surtout au sein de la famille. Ce moi archaïque permet une communication inconsciente. Il agit comme le postule J. Bleger tel une forme de dépôt du Moi/Non-Moi de départ, dans la mère et dans la famille. Ainsi cette forme de psyché serait autant psyché maternelle et paternelle que psyché de l’enfant. Cela rejoint ce que Freud nomme La langue fondamentale. On peut également retrouver une trace de ce langage dans le rêve. C’est pour cette raison que les scènes oniriques ont toutes leur place lors des séances. Toujours pour Ruffiot, ce moi archaïque est le fondement de la communication inconsciente de la famille. Ainsi, continue-t-il, l’individuel, c’est le corps ; le groupal (et le familial) est d’essence psychique. C’est donc dans le psychique que ça rêve. Il est ainsi intéressant de prendre le rêve comme médiation/induction lors d’une séance.
L’appareil psychique familial
Le mode spécifique de l’analyse familiale permet aux membres de la famille de pouvoir retrouver cette phase archaïque, où l’inconscient primaire n’a pas encore incorporé complètement un moi individualisé. Il devient dès lors le lien inconscient commun des membres du groupe et par extension de la famille. Ce Moi/Non-Moi n’ayant pas de limites propres s’impose comme un agent de transmission intrapsychique au sein de la famille. Le cadre familial joue donc le rôle de moule pour l’individu, qui pourra ainsi structurer son Moi. Ce Non-Moi appelé par Bleger méta-ego, est projeté dans la mère. Il formera plus tard la base de l’identité de l’enfant. Il est la base la plus archaïque et l’origine même de la personnalité. Durant une thérapie familiale, nous pouvons retrouver cet état archaïque de la personnalité. Il agit comme un élément fusionnel moi/corps/monde. Il se forme un noyau d’indifférenciation primaire (concept de Bleger), permettant une relation inconsciente au sein de la famille. La psychanalyse appliquée à la famille agit donc dans cet interstice inconscient, permettant de comprendre le « pourquoi » et le « comment » de toutes les problématiques. Cette souffrance est le moteur et le déclencheur de toute thérapie.
La technique employée
La thérapie est avant tout axée sur le langage. Par le jeu transférentiel, les membres de la famille rejouent sur le psychanalyste les communications les plus primitives qui s’établissent au sein de la famille. L’objectif étant, par la circulation fantasmatique dans l’appareil psychique familial, d’arriver à l’autonomisation des psychismes individuels de chacun des membres de la famille. Pour ce faire, les participants ont comme consigne de parler de tout ce qu’ils souhaitent. La règle des associations libres, si connue dans la cure individuelle, est ici aussi possible. Par contre, chaque individu a la possibilité d’avoir des secrets individuels. L’analyste s’inscrit dans la neutralité et n’a pas un rôle de censeur. Il ne porte pas de jugement. Cette posture lui permet en fin de séance de pouvoir donner une interprétation.
La place du matériel onirique
Le groupe de travail impulsé par Ruffiot, pour mieux cerner ce Moi/Non-Moi, travaille sur les rêves. Les différents cas cliniques montrent que, dès le commencement de la thérapie, la famille met rapidement en commun le récit de ses rêves. Cette mise en commun, dans le système psychique familial de ses récits oniriques, est le point de départ d’une prise de conscience des liens profonds, inconscients, qui unissent tous les membres, et la base d’une reprise de la fantasmatisation inter-psychique. Le rêve sert de miroir à la famille : La famille se constitue, se reconnaît, se sent constituée, reconnue comme une famille dans le miroir onirique groupal.
La thérapie analytique familiale, comme nous pouvons le constater, se différencie fortement des autres modèles thérapeutiques dans le sens où elle ne fait pas uniquement, comme par exemple dans les approches systémiques, une simple étude intersubjective. Elle se distingue par son analyse des relations inter-psychiques inconscientes et elle postule l’importance de l’instance Moi/Non-Moi comme un facteur clef de la thérapie.
Dominique Séjalon
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