«  Je n’ai jamais eu de chagrin qu’une heure de lecture n'ait  dissipé ». Cette citation de Montesquieu suffirait-elle pour  déclencher l’envie de lire ? Certainement. À condition  toutefois qu’en amont tout soit fait pour que cet acte convoque le  plaisir. Celui-ci passe par un apprentissage, aisé pour certains,  plus difficile pour d’autres… 
	                     Prendre  conscience que cette merveilleuse invention qu’est l’imprimerie a  permis l’appropriation par le plus grand nombre d’un savoir  jusque-là réservé à une élite est un premier pas pour que les  livres deviennent de véritables amis. Que ce soit pour se cultiver  ou se détendre, on n’est effectivement jamais seul lorsqu’on  lit ! 
	                     Respecter  la bonne période d’apprentissage
	                      Les  pédagogues ont compris qu’il ne sert à rien de forcer les choses.  La lecture doit relever d’un désir et non d’un devoir. Aussi  est-il important de donner du sens à l’acte même de lire. Il  s’agit véritablement de faire en sorte que le futur lecteur puisse  comprendre qu’il a tout à y gagner. Psychanalystes et psychologues  viennent étayer cette conception. Si la classe de CP reste celle de  l’apprentissage de la lecture et accueille des enfants ayant 6 ans  au cours de l’année scolaire, la maturité psychologique ne suit  pas toujours. La fourchette se situe plutôt entre la 5ème et la  7ème année, ce qui correspond au cycle II de l’école primaire  incluant la Grande Section de maternelle, le CP et le CE1…  Malheureusement dans l’inconscient collectif, le fameux cours  préparatoire reste encore la classe dans laquelle on doit apprendre à lire. Ce qui est dommageable et pose un déni sur le  développement psychique de l’enfant. Dans cette même classe du  CP, un enfant né le 31 décembre et un autre né le 1er  janvier de l’année suivante, malgré leurs 12 mois d’écart –ce qui est considérable au niveau d’une maturité psychologique–  ne peuvent en aucun cas posséder des pré-requis identiques quant à  cet apprentissage dont découlera leur approche futur du livre.  Dédramatiser et relativiser les pseudo-échecs dans ce domaine est  donc la première attitude à avoir pour qu’un véritable  traumatisme ne vienne pas barrer la route au plaisir.
	                     Diversifier  les lectures
	                      La  personnalité du petit d’Homme se construisant grâce à des  identifications successives, le comportement des parents eux-mêmes  face aux livres et leurs goûts pour la lecture prend une importance  particulière… Lire régulièrement une histoire ou un conte au  tout-petit avant qu’il sache même déchiffrer les mystérieux  signes graphiques fait naître en lui une saine curiosité : 
Qu’est-ce que tu lis ? Montre-moi… Lorsque le sujet  le permet, il est possible d’enrichir, grâce au livre, la  communication. Plus tard, l’amour de la lecture se partagera  d’autant mieux et c’est d’ailleurs là tout son sens : 
 J’ai  aimé ! Ou au contraire : 
Je n’ai pas aimé ! L’adulte de demander alors : 
Pourquoi ? Qu’est-ce  qui ne t’a pas plu ? Un simple ouvrage se révèle parfois  être le point de départ d’une communication de très grande  qualité. La diversité des lectures joue aussi un rôle important :  romans, BD, documents, biographies, ouvrages de sciences humaines, de  spiritualité, albums photographiques, recueils de poèmes, livres de  recettes. Plus la bibliothèque sera diversifiée, plus le goût va  s’affiner… Le philosophe Michel de Montaigne a consacré un texte  de ses célèbres « Essais » à sa bibliothèque qu’il  nommait « Ma librairie ». Ce grand liseur y décrit  avec amour ce lieu privilégié dans lequel il aimait fréquenter ses  amis les livres : 
Là je feuillette à cette heure un livre,  à cette heure un autre, sans ordre et sans dessein, à pièces  décousues. Tantôt je rêve ; tantôt j’enregistre et dicte,  en me promenant, mes songes que voici. Les livres possèdent ce  pouvoir de faire rêver, d’apprendre, et pourquoi pas, d’inciter  à l’écriture…	                     
                         
	                     À  l’heure du numérique
	                      Si  le support papier garde sa noblesse et n’est pas en passe de  disparaître – témoins les nombreux Salons du livre –, une  nouvelle porte s’est ouverte avec Internet. Surfer sur le Net pour  trouver la maison d’édition où se trouve l’ouvrage recherché,  la boutique de livres ésotériques, ou encore le livre numérique  que l’on peut télécharger sur son ordinateur, voilà un avantage  non négligeable – même si l’on réside loin de tout centre  culturel – de la technologie du numérique. Paradoxalement, la  pratique de l’ordinateur donne au goût de lire une impulsion de  plus. Blogs et sites proposent des lectures et des forums permettant  d’échanger des idées à propos d’un ouvrage, d’un auteur. On  peut y acquérir pour un prix raisonnable et parfois gratuitement des  chapitres, voire des ouvrages entiers. Même la Bible, ce best-seller  inégalé, est consultable sur le Net. L’amour de la lecture,  contrairement à ce qui peut être véhiculé, n’est donc pas près  d’être détrôné !
	                      
	                     Ariane Palombo