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La psycho
dans Signes & sens
Considérée comme une pathologie du comportement alimentaire, il convient toutefois de ne pas confondre une « bonne fourchette » et un sujet véritablement boulimique. Indissociable de son corollaire inversé, l’anorexie, il s’agit d’un trouble important touchant souvent la période de l’adolescence.
Conscient du caractère anormal de son comportement alimentaire, le sujet boulimique souffre car il lui est impossible de contrôler ses pulsions. En fait, il a une image inconsciente du corps abîmée… En outre, la boulimie n’a rien de commun avec une fringale. Il n’y a, pour la personne atteinte de cette affection, aucun plaisir à manger. Il s’agit de remplir un vide impossible à combler. La seule chose importante à ses yeux est d’ingurgiter la plus grande quantité de nourriture possible. Touchant plus particulièrement la population féminine (2 % ), on estime que la boulimie concerne de 4 % à 8 % des étudiantes.
Le diagnostic, selon la psychiatrie
Les symptômes caractérisant un diagnostic de boulimie installée sont pluriels. Selon le D.S.M IV, manuel de psychiatrie, ils se définissent, entre autres, ainsi :
- Absorption récurrente de nourriture largement supérieure à la normale, accompagnée d’un sentiment de perte totale de contrôle pendant la crise de boulimie.
- Comportements compensatoires : vomissements provoqués, emploi abusif de laxatifs… Les crises de boulimie et les comportements compensatoires inappropriés surviennent tous deux, en moyenne, au moins deux fois par semaine pendant trois mois.
- Estime de soi perturbée par l’image corporelle.
Des ressorts inconscients
De l’extérieur, une jeune fille boulimique peut passer tout à fait inaperçue. Elle dépense en fait souvent beaucoup d’énergie à donner le change. Derrière l’apparence se cache une angoisse existentielle. Très peu sûre d’elle, elle n’aime pas son corps, son aspect. Constamment dépendante de ses pulsions, elle porte un regard négatif sur elle-même, n’éprouvant aucun réel plaisir à manger. Enfermée dans un cycle infernal, les troubles alimentaires sont la manifestation d’un trouble inconscient dont l’origine remonte à la petite enfance.
Comment en sortir ?
S’il est important de prendre en compte l’histoire et le profil psychique unique de chaque patient, certains thérapeutes avancent des causes possibles ainsi que des pistes susceptibles de permettre d’en sortir. C’est le cas de Margo Maine, auteur de " Anorexie, boulimie, pourquoi ? ", publié aux éditions Le Souffle d’or. Ainsi, selon elle, les troubles alimentaires, surtout des femmes, découleraient parfois d’une absence émotionnelle du père pendant leurs premières années… Pour d’autres, il s’agit d’un dysfonctionnement beaucoup plus précoce lié à la relation à la mère. Chaque cas étant unique, il n’existe aucune méthode qui s’appliquerait à toutes les personnes souffrant de boulimie. Quoi qu’il en soit, une aide d’ordre psychologique s’avère de toute façon nécessaire afin de restaurer une meilleure image de soi. Si certaines thérapies de type comportemental peuvent être efficaces dans certains cas, elles échoueront pour d’autres. La boulimie n’est pas due à de mauvaises habitudes qu’il suffirait de corriger pour régler le problème. Les personnes vraiment boulimiques se contrôleront peut-être un temps mais craqueront de nouveau ou déplaceront le symptôme sur une autre conduite addictive parfois plus grave. On ne guérit pas d’une obsession par l’abstinence. Un travail sur la personnalité dans son entièreté est indispensable. Une prise en charge d’inspiration psychanalytique, en complémentarité avec un médecin – dans le cas où la santé physique est menacée – peut aider à dénouer les fixations inconscientes à l’origine du symptôme addictif. La « boulimie » n’est donc pas une fatalité comme en témoigne Ghislaine: Je m’en suis sortie grâce à une psychothérapie analytique. La volonté seule ne m’a pas suffi. J’ai eu besoin d’aide pour comprendre ce qui se passait. Alors que je n’avais aucune communication avec l’extérieur – je ne sortais pas, n’avais pas de réels désirs –, je prends aujourd’hui plaisir à entrer en relation...
Claudie Haut
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