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La psycho
dans Signes & sens
Le rugby
n’est pas un jeu de hasard !
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Le stade ressemble à une cour de récréation où une cohorte de gars se disputent le phallus, symbolisé au rugby par un ballon de forme ovoïdale.
Au bout de quatre-vingt-dix minutes, l'arbitre siffle la fin de la récré et le stade se vide ; les joueurs sortent, les habits déchirés, boueux, le visage ensanglanté, penauds d'avoir perdu ou heureux d'avoir gagné, peu importe car pendant une heure et demie, ils ont combattu, rivalisé avec un adversaire, celui qui les empêche de pénétrer avec le phallus !
Un corps à corps
Au rugby, on joue à se battre mais il n'est pas question d'anéantir l'adversaire autrement que symboliquement... Il faut dominer et dominer c'est d'abord avancer vers la ligne de but par tous les moyens légaux. À ce jeu, même si le ballon circule, le rugby n'est pas fondamentalement un jeu de circulation de balle mais, au contraire, un jeu où le combat des hommes est essentiel. Le but du jeu est, de toute façon, de dominer physiquement l'adversaire dans un combat de corps à corps.
C'est dans ce corps à corps que le joueur va pouvoir retrouver ce combat auquel il s'est livré étant petit, vis-à-vis de son père, ce père, réducteur inconsciemment, qui l'a empêché d'accéder à son désir incestueux, celui de la pénétration de la mère, celui de la possession de l'objet d'amour. Mais l'adversaire sur le terrain pourra l'empêcher également de pénétrer. Alors y aura-t-il des tentatives par des essais, des touches, des passes, des transformations et, enfin, des pénétrations ?
Le détachement
Le petit garçon a peur de perdre ses objets d'amour du fait de la haine et de l'agressivité qui font partie aussi de son complexe d'Oedipe ; ainsi s'installe de la culpabilité et, avec, un besoin de réparation. Le conflit ne connaîtra d'issue que grâce à la castration symbolique du père. Et c'est donc l'apparition de l'angoisse de castration qui fera disparaître le complexe œdipien, le garçon reconnaissant, de fait, dans le père, l'obstacle à la réalisation de ses désirs. Il accepte la loi et abandonne l'investissement de la mère en tant qu'objet d'amour ; il pourra ainsi progressivement se diriger et, s'étant détaché de la mère, choisir le moment venu, de vivre à son tour, une relation affective sur des bases de différenciation et d'individuation. Mais quel combat et quel match pour en arriver-là, sans être pour autant certain d'avoir un trop-fait mais peu importe... D'ailleurs, dans tout sport collectif, les inconscients se retrouvent et se rassurent et c'est peut-être cela le but ! Alors, allez les bleus !
Aurore Badéa
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