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      Une sexualité sans angoisse
      après son accouchement

      Une sexualité sans angoisse après son accouchement
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      Si la maternité est pour la femme une étape de vie importante, elle l’est aussi à d’autres titres pour le jeune père, constituant de fait un élément clé dans l’évolution du couple. Ainsi, comment concilier maternité et séduction féminine ? Désire-t-on être désirée après la maternité ? Et reste-t-on réellement désirable après l’accouchement ? L’autre membre du couple voit-il celle qui est devenue mère du même regard ? Autant de questions qui ne sont que la partie émergée de l’iceberg, on s’en doute. Au physique comme au psychique, de multiples aspects se trouvent être modifiés, voire perturbés, et plus particulièrement la sexualité avec, quelquefois, des modifications durables. Nouvel état qui fait qu’à l’évidence il y a un avant et un après la maternité. Cet après là, porteur parfois de souffrance et de déstabilisations, ouvre aussi à compréhensions et changements. Ces transformations physiques, tout comme les mutations de la psyché, influent sur l’image de soi, la communication et le désir sexuel...

      Dans les siècles passés, des normes religieuses, marquées de l’empreinte judéo-chrétienne, faisaient référence en matière de sexualité. Après l’accouchement, la vie sexuelle du couple ne devait reprendre qu’après un certain laps de temps. Si nous ne disposons que de peu de sources précises, nous savons pour autant qu’au Moyen Âge l’église édictait des recommandations et des règles auxquelles se conformer en ce domaine. Ainsi était-il fortement suggéré de respecter une période de continence de quarante jours après la naissance du bébé, période dite des « relevailles ». Mais il était aussi conseillé, à cette époque, de s’abstenir de tout rapport sexuel pendant l’allaitement au risque de nuire au lait ! Au XXème siècle, l’évolution des mœurs plaça les choses dans une autre perspective. De nos jours, seuls les deux éléments du couple décident de la reprise de leur vie sexuelle. Statistiquement, un couple sur cinq reprend une activité sexuelle un mois après l’accouchement. Souvent, c’est l’homme qui demande à ce que les rapports reprennent. Bien sûr, au plan médical, les médecins donnent toutes les recommandations nécessaires en termes de santé. Ainsi, six semaines sont nécessaires à la cicatrisation de l’utérus. Le vagin devra retrouver forme et élasticité. Les muscles du périnée sont aussi, temporairement, moins élastiques. D’autre part, tant que les lochies (pertes de sang) perdurent, le risque d’infection existant, tout rapport sexuel est formellement déconseillé. Si la femme a subi une intervention, la cicatrisation complète s’impose avant de reprendre toute relation sexuelle. Une épisiotomie cicatrise en deux à trois semaines. Pendant les premiers rapports, certaines positions seront une solution pour pallier les douleurs que la femme pourrait ressentir : côte à côte ou la femme sur son partenaire. Une césarienne demande une cicatrisation plus longue. Les rapports face à face sont, dans ce cas, déconseillés dans les premiers temps. Le couple aura, de ce fait, à trouver les positions qui seront les moins douloureuses pour la femme. Mais la cicatrisation physique seule ne suffit pas, il faudra aussi attention et prévenance de la part du partenaire ; il n’est pas aisé de se détacher de la souffrance qui perdure souvent à la suite d’une telle intervention. Le couple devra aussi tenir compte de l’absence de contraception orale ; elle ne peut être reprise que dans un délai de vingt jours.

      La jeune mère et l’image de soi


      Si, dans la première moitié du XXème siècle, la femme enceinte se devait d’être discrète, son ventre étant alors perçu comme obscène, il en va autrement à l’heure actuelle. La maternité, devenue libre choix, entraîne une image valorisée de la femme qui a choisi d’enfanter ; ainsi, la perception qu’elle aura de son corps est positivée. Si donc à l’inconscient, la maternité n’a pas porté atteinte à la féminité, être séduisante et désirable ne relève pas de l’impossible à la suite de ces neuf mois pas comme les autres. Mais pour certaines, jusqu’à retrouver la silhouette qu’elles aiment, cela ne va pas sans problème et leur sexualité en subit les effets. Bien sûr, pour l’homme aussi la transformation corporelle de sa compagne peut apporter des modifications dans l’économie libidinale. Occupée essentiellement par son enfant, la mère s’oublie un peu, voire beaucoup... Peut devenir secondaire aussi son corps que la maternité a transformé. Rares sont les femmes qui ont, à cette période de leur vie, une très bonne image d’elles-mêmes ; elles aiment souvent moins leur corps. Alors, qu’en est-il de la séduction ? Du fait des kilos en trop, lorsqu’ils n’ont pas encore disparu, la jeune mère tente généralement de masquer son corps. Parfois même le changement est si profond que la femme en vient à rejeter cette nouvelle enveloppe qui ne lui correspond pas et se refuse, par voie de conséquence, le plaisir sexuel. Pourtant, Françoise Dolto considérait la maternité comme un épanouissement pour la femme alors dans une dynamique d’accueil.

      Être disponible pour la sexualité


      Si la relation de la mère à son nourrisson est fusionnelle, exclusive dans les premiers temps de vie du petit d’Homme, elle doit évoluer. Le compagnon de la mère retrouvera ainsi sa place et s’y inscrira. Cette dé-fusion de la mère à son enfant est cependant cruciale ; elle normalise la relation entre les trois sujets concernés que sont la femme, l’homme et l’enfant. C’est le rôle du père que d’instaurer cette séparation entre l’enfant et sa mère. Du fait de l’alternance, absence et présence de la mère, l’enfant construit peu à peu son « moi ». Ainsi intègre-t-il que sa mère existe en dehors de lui et donc qu’il peut exister en dehors d’elle. Mais même si elle est normative, cette distance nécessaire n’est parfois pas facile à mettre en place. La mère n’en manifeste d’ailleurs pas toujours le désir. Comblée par la relation à son enfant, la femme peut y puiser son comptant de sensualité et de caresses dans les premiers temps. Dès lors, une question s’impose : le désir sexuel est-il encore possible sans mettre en œuvre de puissants freins inconscients qui y feraient obstacle?
      D’amante, la femme est devenue mère avec, bien entendu, des répercussions inévitables. Pour certaines mères même, l’enfant exclut tout autre. Ainsi, ayant le nombre d’enfant(s) qu’elles souhaitaient, inconsciemment leur libido chute et se met en sommeil. Par ailleurs, à n’en pas douter, l’arrivée d’un enfant fragilise la position de l’homme. Le nouveau venu est si vulnérable qu’il prend toute la place. L’enfant étant au centre de tous ses investissements libidinaux, la mère satisfaite de cet amour-là peut en arriver à n’être que peu disponible pour son partenaire. Et c’est avec l’homme que s’installe une distance perçue parfois comme une séparation mal vécue. Si elle n’est pas expliquée, elle pourra aller jusqu’à déstabiliser profondément la vie du couple ; un sentiment d’abandon aura été déclenché chez l’homme. Autre question alors, le compagnon ou le mari garde-t-il sa place ou pas ? Pour l’homme, il s’avère difficile de partager l’objet du désir quand la mère, sein nourricier, prend le pas sur l’amante. Il est exclu de la relation prioritaire qu’il avait à sa compagne, n’en est plus le centre. De là à se sentir rejeté, il n’y a pas loin. De la sorte, les hommes orientent souvent leur énergie vers le travail, les femmes focalisent sur l’enfant. C’est aussi, bien évidemment, encore de tels bouleversements qui influent sur la sexualité du couple après la naissance du bébé. Manque de temps, fatigue, responsabilité d’un si petit être, bousculeront les choses établies. Nul doute que la sexualité du couple ne puisse plus être spontanée. La programmer ? Jusqu’à ce que le nourrisson ait atteint ses trois mois, elle se heurtera bien souvent à l’impossible. Les pleurs, le sommeil irrégulier ou tout autre problème éprouvé par le tout-petit, amèneront le couple à passer après. Son activité sexuelle sera aussi entravée lorsque l’enfant dort dans la chambre parentale. Mais, si de femme à mère il y a obligation, comment concilier les deux afin que ni l’une ni l’autre n’en pâtisse, que l’une n’exclut pas l’autre ? Articulation bien souvent délicate. C’est d’en être consciente que les choses se règleront mais aussi et surtout grâce au dialogue avec l’autre aimé. La prise en compte de ses désirs importe afin que la frustration qui s’installe n’en devienne pas insupportable. Par ailleurs, se consacrer toute entière à son jeune enfant peut par la suite déséquilibrer, pour avoir occulté sa féminité. Ainsi, l’enfant a pu prendre la place de « rival » pour l’homme sans que les deux parents n’y prennent garde. C’est pour cela aussi que l’attitude du père est primordiale en participant à la charge que représente un jeune enfant car l’épuisement fait la part belle au besoin de sommeil et étiole le désir. Responsabilité et charge de travail partagées avec le conjoint entraînent une sérénité compatible avec le désir sexuel. L’urgence du faire face n’est plus de mise.

      L’importance de l’empathie


      La femme qui vient d’accoucher voit son économie hormonale transformée momentanément et d’autant plus si elle allaite. La médecine est ici d’une aide précieuse. Des gels lubrifiants pourront, par exemple, permettre de pallier les problèmes de lubrification vaginale parfois éprouvés. Mais et surtout, chez la femme qui vient d’accoucher, les taux d’œstrogènes et de progestérone diminuant, la réceptivité sexuelle baisse aussi. À l’inverse, la prolactine, hormone inhibitrice du désir qui interrompt le cycle sexuel, augmente. Un tel bouleversement hormonal n’est pas sans effet. De fait, le désir sexuel diminue pour beaucoup de femmes au cours de la période qui suit l’accouchement. La crainte parfois est même qu’il ne revienne pas. Ainsi, les relations sexuelles avec le compagnon ne se conçoivent-elles que du respect de cet état : attendre que la femme se sente prête, au plan physique comme au plan psychique, pour reprendre une sexualité satisfaisante. Il est capital de comprendre que les premiers mois qui suivent l’accouchement constituent une période transitoire à aborder de façon différente. Les premiers rapports après l’accouchement ne sont pas toujours agréables pour la femme; c’est même bien souvent le contraire. Le temps est pour beaucoup qui aide à dépasser le paroxysme de l’accouchement mais il n’y suffit pas. Le partenaire, à l’écoute de sa compagne, participe de la redécouverte qu’elle fera de ses sensations. Une manière autre de vivre leur sexualité, différente de celle qu’ils étaient accoutumés de pratiquer. Le bouleversement qu’a subi la femme a pu modifier ses points d’excitation. D’autre part, l’homme subit, quant à lui, un profond trouble émotionnel. Souvent il lui est difficile de surmonter le traumatisme que constitue l’accouchement lorsqu’il y a assisté. Bien que ce moment reste unique, l’amant qu’est le jeune père ne se détachera pas aisément de la vision du sexe de sa femme à ce moment-là. D’ailleurs, certains hommes éprouvent le besoin de participer à des groupes de paroles pour aborder au mieux ce changement d’état lorsqu’il paraît trop ardu. Ainsi osent-ils dire ce qui les perturbe, c’est-à-dire cette distance qui les éloigne du corps de la femme-mère, émotions difficiles à gérer, inquiétudes face à la paternité. Toutefois, d’autres expriment cependant enthousiasme et émerveillement.
      Ainsi chacun, selon son histoire et sa personnalité, passera d’une place à une autre dans l’ordre des générations. Les turbulences se font parfois sévères jusqu’à atteindre un nouvel équilibre. L’évolution psychique est telle qu’elle monopolise beaucoup d’énergie ; aussi la libido peut-elle se mettre en sommeil. Les sentiments amoureux, la tendresse, seront alors précieux à l’un comme à l’autre. La sensualité est à redécouvrir à deux. Mais il faudra de la patience. Selon les médecins, tout devrait rentrer dans l’ordre dans une période de deux à six mois. Pour certains couples pourtant, l’altération de la sexualité se fait plus durable. Qualité et fréquence des rapports sexuels diminuent sensiblement. Si cette baisse de la libido résiste, des verrous psychiques œuvrent alors ; ils perturbent la relation à l’autre. Celui dont le désir s’éteint, mais aussi celui qui est moins désiré, en souffrent. Cependant, simuler ou s’imposer des relations, on s’en doute, ne résoudra rien. Avoir un enfant, pour certains couples (plus nombreux qu’on ne le pense), chasse le désir sexuel dans un premier temps. Effet pour le moins imprévu mais il faut être conscient qu’après la maternité, l’homme et la femme ne formulent pas la même demande quant à la sexualité. Besoin physiologique, demande sentimentale... Pour délicat que soit un tel changement dans les nouvelles relations à construire, il n’en reste pas moins encore une fois que rien ne remplace le dialogue dans le couple. Dire ce qui est mal toléré, ce qui est attendu de l’autre, permet de trouver ensemble la solution du moment qui satisfasse au mieux ce couple devenu parental. Ce qui ne signifie pas la négation du couple d’amants, loin s’en faut, l’un ne devant pas inhiber l’autre.

       

      Bernadette Franchini

       

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