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La psycho
dans Signes & sens
0 de conduite
pour les moins
de 3 ans !
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La constitution d’un collectif de professionnels des milieux médicaux et sociaux, ainsi que de nombreux parents, a comme objectif de dénoncer tout amalgame entre le comportement du nourrisson et la délinquance.
Malgré plus de 200 000 signatures, nous devons rester vigilants. Nos sociétés – dites modernes – se sentent-elles si menacées qu’il leur semble naturel de revenir à un repli sur soi quasi pathologique ? Comment pouvons-nous encore parler d’un déterminisme génétique à l’heure où les sciences humaines nous exhortent non seulement à reconnaître l’autre en tant qu’individu, mais à l’identifier surtout en tant que sujet désirant ? Comment après Levinas, Ricœur, Lacan, Freud, Schopenhauer, Nietzsche, Rimbaud, Jung, pour ne citer qu’eux, ne pas admettre, comme le souligne si bien Albert Jacquard, que l’être humain devient celui qu’il a choisi d’être ?
Le collectif
À trop vouloir faire des êtres identiques, on en vient à nier l’altérité alors qu’effectivement, nous sommes tous uniques. Bernie Glassman, moine zen américain, précise que notre seul point commun, c’est notre différence ! Dans une société en quête d’identité, ne créons pas une forme de nationalisme qui, au lieu de nous élever, nous renferme sur nous-mêmes. La singularité devient alors phobique : il faut fuir celui qui n’est pas comme soi ou, plutôt comme nous voudrions qu’il soit. 200 000 personnes pour faire pencher la balance, ce n’est rien, mais c’est beaucoup aussi, et d’autant plus si ces 200 000 personnes restent éveillées. Le collectif « Pas de 0 de conduite » avait adressé une lettre ouverte aux présidentiables car, si le gouvernement a renoncé à certains volets de la Loi, celle-ci continue de prévoir la levée du secret professionnel. C’est-à-dire qu’il est toujours d’actualité de rester vigilant face à ce risque concernant le champ psychique.
Une question d’éthique
Roland Gori, en mars 2007, marque sa déception car, après un mea culpa de l’Inserm, une nouvelle expertise faite sur le même modèle que la précédente vise cette fois-ci à résorber les « troubles de l’apprentissage », en s’appuyant sur des modèles neurobiologiques et génétiques. Tous les experts de ce rapport adhèrent aux pratiques cognitives les plus dures, dont la neuropsychobiologie du comportement… R. Gori* cite dans sa conférence de presse un extrait du rapport p. 644 : Les nouveau-nés sont comme les animaux, en mesure de mobiliser deux systèmes différents pour le traitement des quantités et des transformations qui les affectent… En somme, perdons notre humanité pour être de bons apprenants ! N’y a-t-il pas une différence entre connaissance et apprentissage, entre ingurgitation et réflexion ? Sommes-nous deux systèmes ? Le sujet peut-il être ainsi clivé ? Tant de questions qui ne peuvent être comprises qu’en prenant en compte son alter ego comme individué et pas uniquement comme un individu programmé et programmable. La question de l’éthique que soulève Gori doit nous faire réellement réfléchir sur le regard que nous portons sur nos enfants : Les enfants repérés et dépistés peuvent se retrouver stigmatisés dans un diagnostic. Devenus suspects, ils doivent en plus supporter la charge cérébrale et génétique de leur handicap. Et ce n’est pas la notion fourre-tout d’héritabilité qui peut disculper les experts de leurs dérives scientistes…
Dominique Séjalon
*Pour en savoir plus, lire :
La conférence de Roland Gori sur le site : www.pasde0deconduite.org
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