Le placebo se définit comme un produit sans activité pharmacologique, absolument inactif. Il se présente sous la forme d’un composant actif et est administré à la place du médicament.
On entend par effet placebo, l’impact psychophysiologique produit par les placebos. Il est surprenant en effet de pouvoir observer, dans un grand nombre de cas, le soulagement du malade, surtout en terme de douleur, après avoir pris sans le savoir un comprimé de substance inerte. Les symptômes les plus souvent soulagés sont la douleur, les céphalées, l’anxiété, l’insomnie, l’asthme, les troubles de l’appétit. En outre, il est reconnu que l’effet placebo intervient également sur le plan thérapeutique, même lors d’un traitement réel : le soulagement de la douleur ou la rapidité d’efficacité du traitement s’avère être supérieur ou de durée plus courte d’installation par rapport au produit actif.
Une triade médecin-placebo-malade
Étymologiquement, le mot
placebo signifie « je plairai », ce qui n’est pas anodin. En effet, l’effet placebo n’intervient pas seul : il s’inscrit au sein d’une relation médecin-malade. C’est grâce au regard bienveillant et à la parole rassurante, optimiste, du médecin que le malade investit favorablement le médicament considéré comme un moyen de traitement. C’est-à-dire de façon à poser un principe de guérison. Le médicament devient objet de médiation entre les deux personnes. Son efficacité dépend de la confiance du médecin en sa force thérapeutique. Il peut alors devenir pour le malade le « bon objet », qui maintient ce lien au soignant à la maison et est porteur d’un message de guérison. Il n’existe pas de personnalité type corrélée à l’efficacité du placebo ; seule la croyance en l’efficacité du traitement permet par un mécanisme d’autosuggestion d’aller mieux ou surtout de guérir. L’effet placebo interviendrait selon les études pour 30 % dans l’amélioration des soignés. Une réalité qui permet de rappeler l’influence du psychisme sur toutes nos maladies, nos douleurs dans leur déclenchement mais aussi leur guérison.
D’autres facteurs extérieurs
Ils sont multiples mais certains sont reconnus et utilisés : l’apparence du médicament participe à l’adhésion du malade au traitement. Ainsi, les formes injectables sont à l’heure actuelle toujours vécues comme plus efficaces que les formes
per-os. Les couleurs pourraient également intervenir : le bleu clair plutôt tranquillisant, le rouge stimulant. Un traitement s’inscrit en positif ou négatif en fonction de l’entourage relationnel du malade et du lieu des soins : domicile ou hospitalisation. Le nouveau médicament lancé sur le marché bénéficie en général d’un bonus d’efficacité la première année.
L’effet nocebo
L’impact pharmacologique du placebo est tel qu’il agit également parfois en sens inverse, donc en négatif : c’est l’effet nocebo. La prise médicamenteuse s’accompagne alors d’une gêne immédiate, avant même que le médicament soit réellement dans le sang, souvent d’ordre digestif, avec des nausées, de la somnolence, des vertiges ou des démangeaisons… Il est reconnu par le corps médical que la simple lecture des effets indésirables d’un médicament peut déclencher leur apparition dès son absorption. Certains en sont adeptes. Qui n’en connaît pas dans son entourage ou dans ses relations proches ? Dans les deux cas, ce regard suspicieux du patient vis-à-vis du produit déclenche, par un processus psychosomatique, les désagréments constatés. La discussion perdure donc autour de l’effet placebo, sur sa réalité de participation à l’amélioration d’un malade et son utilité. En revanche, sur le plan médical et pharmacologique, celui-ci continue d’être régulièrement employé pour évaluer l’efficacité et la tolérance de nouveaux médicaments sur le marché. Les études contre placebo permettent de comparer des cohortes de malades sous traitement actif avec un groupe de même pathologie mais sous traitement placebo.
Une méthode à appliquer
Dénué de toute action pharmacologique, curieusement, le placebo lorsqu’il est investi positivement par le malade, lui permet de l’aider à se positionner sur l’amélioration de son état, voire de sa guérison. D’autant que nos douleurs corporelles sont l’expression d’une souffrance psychique. Cet effet interviendrait également lors de traitements réels. Parfois le discours rassurant du médecin peut suffire à lui tout seul sans nécessité de médiation par un produit. Un mode d’action qui n’est pas sans nous renvoyer au principe de l’autosuggestion de la méthode Coué. Ainsi, selon Émile Coué, pharmacien, père de la Pensée positive, nombre de maladies sont le fait d’autosuggestions inconscientes et négatives. Nous avons en nous la capacité d’inverser ce positionnement et de déclencher notre imagination sur du possible et du positif. La volonté seule ne suffit pas pour réaliser ses projets. En l’occurrence, pour le malade, l’important est de s’imaginer guéri afin d’adresser à son psychisme des impulsions favorables au processus de guérison. Cette méthode, souvent raillée en France mais admirée à l’étranger – notamment aux États-Unis – est appliquée également dans les domaines sportifs, économiques et politiques…
« Ma sœur Monica prend de plus en plus l’habitude de s’automédiquer.
Court-elle un risque ? »
Marianne
La question que soulève Marianne est d’une grande importance. D’ailleurs, une enquête réalisée en France, en 2004, donne à constater que 39 % de sa population a une propension à prendre des médicaments sans avis médical ! D’où vient cette habitude ?
Cette même enquête restitue majoritairement que les personnes interrogées justifient le fait de s’automédiquer par manque de temps, en premier lieu. En second lieu, elles indiquent la difficulté à avoir un rendez-vous facilement avec le médecin. C’est-à-dire quand elles considèrent qu’elles sont libres et donc, que leur agenda le leur permet… En troisième lieu, ces mêmes personnes disent avoir de moins en moins confiance dans le corps médical ! Et, enfin, elles redoutent la spirale infernale des examens médicaux dès lors que leur plainte n’aboutit pas rapidement à un diagnostic objectif. Mais où est véritablement le fond du problème ?
Le fait de s’automédiquer systématiquement traduit, pour la psychanalyse en particulier, un état de solitude. Effectivement, le geste récurrent lié à l’automédication systématique exprime un repli sur soi qui peut friser ce que Sigmund Freud appelait état de détresse. Encore implicite, il y a dans ce type de passage à l’acte déjà comme un S.O.S. On le constate d’ailleurs à l’attitude de Marianne : sa sœur capte son attention au point de l’angoisser et de nous écrire ! Monica, telle qu’elle nous
est présentée, projette innocemment
(c’est-à-dire inconsciemment) sur son entourage, quel qu’il soit, comme un déni de celui-ci. De fait, Monica court-elle un risque ?
Oui, encore une fois du point de vue de la psychanalyse. C’est l’escalade dans la prise de médicaments, hors ordonnance et surveillance médicale, qui doit alerter. Le médicament, tout aussi anodin qu’il puisse paraître, est un étayage, une béquille redoutable. Il ne faut pas entrer dans ce cycle vite banalisé qui peut, un jour, fabriquer une forme d’addiction peu toxique en apparence mais autodestructrice dans son intentionnalité.