S'initier à la poésie

La musique des mots

David, le chantre biblique, chante ses psaumes en s’accompagnant de sa lyre bien avant qu’ils soient mis par écrit. Les troubadours et les trouvères du Moyen-âge, ces précurseurs de la poésie moderne, étaient tous musiciens. Tout simplement parce que la poésie naît du mystère de la vibration sonore. Elle est musique avant d’être parole, s’étayant sur nos perceptions auditives les plus archaïques. Ne dit-on pas d’ailleurs que tous les poètes ont leur muse… La psychanalyse évoque les lallations, ces premières manifestations indifférenciées de l’univers acoustique qui émerveillent déjà le petit d’Homme. Une poésie comme « Le bateau ivre » d’Arthur Rimbaud témoigne des beautés fulgurantes du registre poétique et visionnaire de l’artiste. Ainsi, la sensibilité ouvre les portes du merveilleux. En vers ou en prose, la poésie se nourrit de nos songes, libérant ce que nous avons de plus intime. Un poème se suffit à lui-même, stimule la faculté de donner forme à l’imaginaire. Sur son cahier de récitation, l’écolier est invité à dessiner. Seule discipline – hormis les arts plastiques – où la chose est permise ! La poésie convoque le je mais également le jeu. Le plaisir suscité par les ateliers d’écriture poétique séduit toujours les élèves en difficulté d’apprentissage. Et pour cause ! Les règles grammaticales et orthographiques ne viennent pas, dans un premier temps, faire obstacle à la créativité orale des jeunes élèves. Privilégier la musique des mots plutôt que leur sens, le contenant plutôt que le contenu, déclenche à coup sûr l’imagination. La magie opère et le poète en herbe aura tout le loisir, ensuite, de peaufiner son texte de manière à le proposer au plus grand nombre.

Des jeux possibles

Pour développer ce goût très particulier pour la poésie, voici quelques situations ludiques possibles à mettre en place quelles que soient nos connaissances en la matière :
- L’écriture à plusieurs : il s’agit pour chacun des participants de choisir un vers qu’il affectionne tout particulièrement et de le mettre en lien avec ceux des autres de manière à créer un nouveau poème. Les résultats sont toujours étonnants !
- Le logo rallye à la Raymond Queneau : le principe est d’écouter dans un premier temps un certain nombre de poèmes, tout en notant des mots au hasard sur des petits bouts de papier. La consigne consiste ensuite à inventer un texte avec les mots choisis.
- La poésie à la manière de : basé sur une structure liée à un poème précis, par exemple Une fourmi de dix-huit mètres avec un chapeau sur la tête... ça n’existe pas, ça n’existe pas ! , de Robert Desnos, peut devenir Un souris toute chauve dans une robe mauve… ça n’existe pas, ça n’existe pas ! , pour un poète en herbe…

Les troubadours modernes

Beaucoup de poésies ont été transmises par les troubadours modernes que sont nos chanteurs dits de variétés. Ainsi Léo Férré a fait connaître à toute une génération les poèmes de François Villon, d’Arthur Rimbaud. Georges Brassens a popularisé Paul Fort. Jean Ferrat a fait aimer Aragon. Il en est ainsi de la poésie de Joachim du Bellay, « Heureux qui comme Ulysse », que des millions d’ados ont découverte grâce au chanteur Ridan. On peut aussi prendre en compte cette poésie revendicative, le rap, qui a donné naissance au slam, une forme d’expression plus littéraire. Il n’est pas de doute que cet art de rue aura un jour ses lettres de noblesse, tout comme les œuvres de cet asocial qu’était François Villon sont aujourd’hui parfaitement intégrées à la poésie officielle !

Adam Bravet