Romain Rolland disait de Ludwig : « Il est bien davantage
que le premier des musiciens. Il est la force
la plus héroïque de l'art moderne ». Transcendant
toutes les modes, il a même inspiré le Rock and Roll
(Roll over Beethoven de Chuck Berry). Johnny Hallyday
a enregistré Poème sur la VIIème et le grand
Léo Ferré lui a consacré tout un album. Retour sur
une vie touchée par le génie et la grâce… Sur les traces de MozartLudwig van Beethoven naît à Bonn le 17 décembre 1770 dans une famille qui, si elle est marquée par la musique depuis deux générations, n'en reste pas moins d'origine modeste. Sa mère, Marie-Magdalena, fille de cuisinier, reste très effacée face à son mari, Johan van Beethoven. Le père de Ludwig est décrit comme étant une personnalité autoritaire, souvent sous l'emprise de la boisson. Il parvient cependant à nourrir sa famille avec son emploi de musicien à la Cour de Bonn. Détectant les qualités musicales précoces de son fils, Johan voudrait bien s'identifier au père de Mozart. Comme cela se faisait couramment à l'époque, il tente alors d'exhiber son enfant sur différentes scènes de la Rhénanie, faisant même croire que Ludwig a 6 ans alors qu'il en a déjà 7. Mais le père du jeune Ludwig ne possédant pas les qualités pédagogiques et musicales nécessaires, le projet tourne vite au fiasco. Cependant, d'autres maîtres de musique prennent le relais. Ainsi, Ludwig devient notamment l'élève privilégié de Christian Gottlob Neefe, auprès de qui il s'initie à la pratique de l'orgue et surtout à la composition. Prenant véritablement sous son aile cet enfant surdoué, Neefe s'occupe aussi de sa formation philosophique, lui faisant lire les Anciens et les Modernes. Soutien de familleLudwig est âgé de 12 ans lorsqu'il publie sa première composition, laissant entendre ainsi au public qu'il pourrait effectivement devenir le nouveau Mozart. Deux ans après, en 1784, le musicien précoce est nommé organiste à la Cour du Prince Maximilian Franz. Cette opportunité lui vaut une sécurité financière qui vient fort à propos. En effet, Ludwig se sent contraint de remplacer un père déficient qui sombre de plus en plus dans l'alcool. Au point de se sentir responsable de ses deux frères lorsque, le 17 juillet 1787, la personne qui compte le plus pour lui, sa mère, décède. Le musicien sublime toutefois ce drame personnel au travers de l'héroïsme romantique que l'on retrouve dans la plupart de ses symphonies. La reconnaissance des pairsL'ascension de Ludwig van Beethoven ne cesse de se confirmer. En 1792, il se rend à Vienne pour parfaire sa formation. Côtoyant alors Haydn, Salieri, il se fait une place incontestable et incontestée dans le milieu viennois. Haydn le confirme dans ses qualités : Vous avez beaucoup de talent et vous en acquerrez encore plus, énormément plus, lui prédit ce grand compositeur britannique. En 1794, il compose son Opus 1, trio pour piano. Toutefois, ce qui ajoute surtout à la notoriété de Beethoven sont ses étonnantes qualités d'improvisateur. Le compositeur autrichien Carl Czerny, ayant assisté à nombre de ses récitals, témoigne que son improvisation était on ne peut plus brillante et étonnante : Dans quelque société qu'il se trouvât, il parvenait à produire une telle impression sur chacun de ses auditeurs qu'il arrivait fréquemment que les yeux se mouillaient de larmes et que plusieurs éclataient en sanglot… Les musiciens contemporains diraient que Ludwig bénéficiait d'un feeling exceptionnel, indépendamment de ses qualités techniques…. Le style héroïqueÀ partir de 1802, Ludwig van Beethoven se lance plus sérieusement dans la composition symphonique. Il voue à cette époque une admiration pour les idéaux de la Révolution Française, nourri qu'il est par la littérature du siècle des Lumières. Et notamment pour un jeune et fougueux général qui incarne pour lui le sauveur idéal : Napoléon Bonaparte. Il est intéressant de noter que les deux hommes ont sensiblement le même âge. Napoléon a 33 ans en 1802… L'âge du Christ-Sauveur… Ainsi la Troisième Symphonie dite « héroïque » est-elle originellement dédiée à son héros. Les choses sont cependant douloureuses pour le romantique musicien, deux ans plus tard, lorsque l'ambitieux général se sacre lui-même empereur. La colère et le chagrin de Ludwig s'expriment avec sa nouvelle dédicace pour sa Symphonie : «Grande Symphonie pour célébrer le souvenir d'un grand Homme». La production musicale ne cesse pourtant pas, bien au contraire. Ludwig van Beethoven compose la Vème Symphonie et son célèbre motif rythmique de quatre notes, exprimant un combat intérieur se soldant par le triomphe final. Beethoven est fondamentalement positif et optimiste malgré le paradoxe de la condition humaine et ses conflits internes. Neuf ans avant la composition de sa IXème Symphonie, il écrit avec une étonnante lucidité existentielle : Nous, êtres limités à l'esprit infini, nous sommes uniquement nés pour la joie et pour la souffrance. Et on pourrait dire que les plus éminents s'emparent de la joie par la souffrance… Un musicien de l'âmeQuoi de plus terrible pour un musicien que d'être atteint dans sa chair au travers du sens de l'ouïe ? C'est à partir de l'année 1796 que Ludwig van Beethoven perçoit les premiers signes de sa surdité. Son handicap progresse irrémédiablement et devient total en 1820. Victor Hugo exprime de façon extraordinaire la destinée du musicien malgré ce terrible symptôme : Cet Être qui ne perçoit pas la parole engendre le chant… Les symphonies de Beethoven sont des voix ajoutées à l'Homme. Cette étrange musique est une dilatation de l'âme dans l'inexprimable. L'oiseau bleu y chante, l'oiseau noir aussi… Beethoven s'éteint le 27 mars 1827, laissant en héritage à l'humanité une musique encore à découvrir. Schubert dira de lui cette même année : Il sait tout mais nous ne pouvons pas tout comprendre encore et il coulera beaucoup d'eau dans le Danube avant que tout ce que cet homme a créé soit généralement compris…
Philippe Corbon |
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