Picasso,
un génie grâce aux femmes ?

Picasso, un génie grâce aux femmes ?
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Dans la mythologie grecque, les muses sont au nombre de neuf. Elles sont les filles de Zeus et de Mnémosyne et président aux arts. Pablo Picasso, génie oblige, aura neuf liaisons féminines connues. Comme pour symboliser que son art s’inscrivait dans la dimension des Dieux de l’Olympe…

Pablo, Diego, José, Francisco de Paula, Juan, Nepomuceno, Crispin, Crispianiano de la Santissima Trinidad Ruiz Blasco naît le 25 octobre 1881, à Malaga, en Andalousie. Son père est professeur de dessin. Nul doute que Pablo s’identifie dans un premier temps à lui : il commence à dessiner et à peindre dès l’âge de 8 ans. L’école primaire lui laisse de nombreux souvenirs, trahissant déjà son intérêt pour la femme, ainsi que son angoisse d’être abandonné. Picasso racontait à ses biographes et à ses amis comment il tuait le temps en dessinant et en regardant par la fenêtre, comment il s'échappait pour rendre visite à l'épouse du directeur, et les différents objets personnels de son père qu'il emportait avec lui en classe (un pinceau, une canne, une colombe...) afin d´être sûr que l'on reviendrait le chercher. Cinq ans plus tard, ce père, pourtant passionné de peinture, baisse les bras devant son fils prodige. Il lui cède ses pinceaux et cesse totalement de peindre. Cet événement prend alors, dans la vie de l’artiste, la signification d’un véritable meurtre oedipien. Pablo ira jusqu’à dire plus tard : En art, chacun doit tuer son propre père. La même année, sa petite soeur Conchita contracte une grave maladie infectieuse. Le seul secours de sa famille réside dans la prière. Pablo fait le voeu d’arrêter la peinture si sa soeur guérit. Mais Conchita mourra de la diphtérie en janvier 1895. À partir de ce moment, la peinture devient la seule échappatoire, une véritable passion. Pablo va y consacrer toute son énergie. Signant d’abord du nom de son père, Ruiz Blasco, il choisit finalement d’utiliser Picasso, à partir de 1901, comme pour l’éliminer définitivement. Quand on demandait au génial auteur des « Demoiselles d’Avignon » pourquoi il avait choisi ce nom italien – celui de sa mère –, il répondait : Vous savez, le nom que l’on porte ou qu’on adopte a son importance. M’imaginez-vous m’appelant Ruiz ? Pablo Ruiz, Diego Ruiz ? Ou Juan-Népomuceno Ruiz ? Effectivement, une marque de voiture portant un autre nom que celui du peintre n’aurait peut-être pas autant d’impact. Ni ne pourrait jouer sur la subtile ambiguïté publicitaire avec le célèbre slogan : Vous n’imaginez pas ce que Pablo peut faire pour vous !

Fernande et le rose


Jusqu’en 1903, le bleu sera la teinte dominante des oeuvres de Picasso, exprimant ainsi blues et mélancolie. Cet état d’esprit est exacerbé par le suicide de son ami Carlos Casagemas. Encore une image masculine qui s’en va. Le sombre bleu va toutefois s’éclaircir avec la première muse qui lui fera voir enfin la vie en rose… En 1904, Pablo décide de s’installer à Paris, à Montmartre, au n° 13 de l’ancienne rue Ravignan, un immeuble surnommé le « Bateau-Lavoir », dans un petit atelier. Un soir de 1905, à la fontaine du quartier, Pablo croise le regard d’une jeune beauté affublée d’un extravagant chapeau. Elle se nomme Fernande Bellavallée mais se fait appeler Fernande Olivier. Son père est artisan en fleurs et plumes artificielles. Sa soeur est la maîtresse du peintre Othon Friesz. Pablo en tombe fou amoureux… La vie est belle ! Par amour pour Fernande, Pablo cesse de fréquenter les maisons de passe et les cabarets. Son oeuvre s’allège. Les vieux mendiants et les enfants malades laissent la place aux arlequins et aux jeunes filles de la période rose. Et comme pour en rajouter, le succès sourit au peintre.

Eva et le cubisme


En 1911 pourtant, le couple se sépare. Le maître avait prévenu : Elle est belle mais elle est vieille. Eva Gouel, fiancée du peintre Louis Marcoussis, ne tarde pas à consoler l’artiste. Il est séduit par son côté fragile. Elle est petite, frêle, et possède ce que l’on nomme une frimousse. Pablo la baptise « Ma jolie », titre d’une chanson à la mode. C’est la grande période cubiste de Picasso. Eva apparaît souvent sous la forme d’une guitare, entre un paquet de tabac et une pipe, dans les natures mortes. En 1913, son doux visage prend alors la forme d’une fente verticale dont les tons mauves et les roses violacés évoquent les lèvres d’un sexe de femme. Mais le destin frappe une deuxième fois. Eva souffre de la fièvre typhoïde. Picasso court de son atelier à la clinique d’Auteuil où sa deuxième muse meurt à la fin de 1915. Il est malade de chagrin. Mais le phoenix va renaître de ses cendres…

Olga et le retour au classicisme


Le peintre croise boulevard Raspail une certaine Gaby Depeyre. Je t’aime de toutes les couleurs, lui écrit-il, en soulignant Je t’aime de six couleurs différentes. Cependant, la liaison ne dure pas. En 1916, la critique d’art se déchaîne, reprochant à Picasso d’avoir abandonné le cubisme. Il a la tête ailleurs. Il pense déjà à la belle Irène Lagut, immortalisée par Guillaume Apollinaire dans son livre « La Femme assise ». Encore une passade. Une rencontre décisive sera celle qu’il fait à Rome : Olga Khoklova, la fille d’un colonel russe au visage de madone, de dix ans sa cadette. Elle est vierge. Son ami Diaghilev lui lance : Fais gaffe, une Russe, on l’épouse. Le mariage est célébré le 12 juillet 1917 dans l’église orthodoxe de la rue Daru. Jean Cocteau et Max Jacob sont les témoins. Le couple s’installe 23 rue La Boétie, dans un décor bourgeois où Olga impose un ordre sans concession. Elle aime la vie mondaine. Picasso devient la coqueluche des salons. Olga donnera naissance à Paulo, père de Marina. Toutefois, la sérénité conjugale n’est pas le fort du peintre !

Marie-Thérèse, Dora et le surréalisme


L’année 1925 est celle d’une rupture radicale dans la production du peintre. Il réalise des tableaux très violents montrant des créatures difformes, convulsives, prises dans les mailles d’une rage hystérique : « Femme dans un fauteuil » (1927, collection privée, Bruxelles), « Baigneuse assise » (1930, Musée national d’Art moderne, Paris). Une période floue au niveau des sources biographiques. En 1925 selon certaines ou 1927 selon une autre, Picasso croise le regard gris bleu d’une jolie blonde. Cette lolita, longtemps cachée, a donc 15 ou 17 ans. Picasso en a vingt-huit de plus : Mademoiselle, je voudrais faire votre portrait. Je suis Picasso… Marie-Thérèse Walter est charmée par l’Espagnol. Longtemps, elle n’a été qu’une ombre fugitive dans la vie et l’oeuvre de Picasso, un visage esquissé d’une inconnue aux boucles blondes. Au printemps 1932, Picasso dévoile au grand jour l’origine de son inspiration et peint de grands portraits de femmes, dont les larges courbes fascinent. Une année de chefs-d’oeuvre. L’artiste veut demander le divorce. Marie-Thérèse refuse. Maya, née en 1935 de père inconnu précise l’état civil, sera donc le fruit d’un couple illégitime et portera comme son géniteur le nom de sa mère. Troublant, ce prénom ramenant à la divinité indienne de l’illusion ! La même année, une nouvelle conquête fait son apparition : la célèbre Dora Maar. De son vrai nom Henrietta Théodore Markovitch, cette photographe - amie de Georges Bataille et d’André Breton - séduit Picasso par son intelligence et sa connaissance de la langue espagnole. Elle devient son modèle. Le peintre aime, pour la représenter, sculpter des formes torturées. Il voit en elle de la tragédie, lui assènant souvent : Tu ne m’attires pas, je ne t’aime pas. Ou plutôt si, comme j’aime un homme. Picasso, qui préfère l’imaginaire à la réalité, se complaît dans un curieux ménage à trois. Il peindra ses deux femmes en 1939, sur deux toiles jumelles, comme des reines rivales. Le jeudi et le dimanche, Pablo se consacre à Marie-Thérèse et à Maya qu’il adore, le reste du temps appartient à Dora. Il part en vacances, à Royan, avec les deux élues de son cœur. Marie-Thérèse loue une villa avec sa fille et Pablo loge à l’hôtel avec Dora. L’atmosphère correspond à sa période artistique : totalement surréaliste. Encore plus surréaliste, Olga dépassée sort de la scène avec son fils mais refuse de divorcer.

Françoise Gilot et le pacifisme


L’auteur de « Guernica » n’a rien d’un artiste engagé, même si, dans les années 30, il combattit le franquisme. Sa vie amoureuse en est le reflet. D’ailleurs, on reconnaît dans le célèbre tableau Dora Maar dans un coin et Marie-Thérèse dans l’autre. Cette oeuvre est plus un appel au peuple qu’un véritable manifeste. Une expression de la brutalité à l’état pur. Picasso peint « Guernica » sous le regard de Dora qui, elle-même, réalise un excellent reportage photo. Mais les tumultes de leur couple ont épuisé leur relation. Pablo et son égérie se quittent en 1943. Il lui offre une maison dans le Midi, à Ménerbes, en souvenir... Cette année-là, l’acteur Alain Cuny présente à Picasso une jeune fille brune. Françoise Gilot a 21 ans, il en a 62. Elle vient d’abandonner ses études de droit pour peindre. Fascinée, Françoise tient pourtant Pablo à distance. Pendant trois ans, Pablo et Françoise vont jouer au chat et à la souris. Ils se vouvoient. Leur itinéraire amoureux aligne les hauts et (surtout) les bas. Picasso vocifère : Vous allez jurer maintenant de m’aimer toujours... En 1946, il l’immortalise en « Femme-fleur », une huile sur toile de l’époque de « La joie de vivre », l’année où Françoise, à 24 ans, accepte de partager l’existence de Pablo. Le couple part vivre dans le Midi, à Vallauris, où naîtront leurs deux enfants, Claude (en 1947) et Paloma (en 1949), ainsi prénommée en souvenir de la colombe de la paix que le peintre réalisa pour l’ONU. Françoise Gilot, qui a les idées larges et modernes, invite Marie-Thérèse et Maya pour les vacances. Lorsqu’on débarque dans la vie d’un homme de quarante ans votre aîné, dira-t-elle, on ne peut pas s’attendre à trouver la place libre. Une famille reconstituée qui semble s’entendre à merveille, en tout cas en ce qui concerne les enfants. Pour ce qui est des femmes, l’affaire est un peu plus complexe. Olga refuse d’entendre parler de Maya, de Claude, de Paloma. Quant à Dora Maar, elle est en analyse pour dépression nerveuse chez Jacques Lacan. En 1953, Françoise, lassée de vivre avec un monument historique, préfère rentrer à Paris avec ses deux enfants. Elle refera sa vie et partira aux États-Unis.

Un grand abandonnique ?


Picasso est décidément incapable de vivre seul longtemps. Jacqueline Roque a la taille fine, un physique avenant... et 27 ans. Pablo en accuse 72. Elle remplira ses vingt dernières années. Divorcée d’un fonctionnaire d’Outre-mer, elle a une fille, Catherine. Ils vivent sur la Côte d’Azur. Picasso découvre à la Californie, à Cannes, la villa où il s’installe en 1953, un havre de lumière et de calme dont Jacqueline sera l’instauratrice. Il brosse beaucoup de portraits de son ultime égérie, dont le physique lui remémore celui des paysannes de Catalogne. La prêtresse protège les dernières saisons du maître. C’est sa seconde et dernière épouse, la dernière muse de sa vie. Veuf depuis la mort d’Olga, Picasso repasse devant Monsieur le Maire en 1961. À 80 ans, il est d’une grande douceur mais toujours inépuisable. Il a besoin de monde autour de lui. Chaque jour, après le déjeuner, il joue avec ses enfants et, le soir, il dîne avec ses amis : Pagnol, Gary Cooper, Prévert, Cartier-Bresson, Villers, Raimu, Florence Gould ou Montand. La nuit, quand tout le monde est couché, il se rend dans son atelier où son expression « Je ne cherche pas, je trouve » prend tout son sens. C’était une force de la nature, raconte son ami le photographe américain David D. Duncan, mais ses mains étaient fines et élégantes, à l’exception d’une bosse qui apparaissait entre le pouce et l’index quand il tordait des brides de métal pour réaliser des portraits de Jacqueline. Pablo Picasso s’éteint à Mougins le 8 avril 1973. Zeus et ses éclairs déchirent le ciel, comme pour montrer les limites du demi-dieu. Il a 92 ans. Ne disait-il pas : Dans la vie, il est beaucoup plus facile de commencer que de s’arrêter… Le matin des obsèques, Jacqueline, visiblement très éprouvée par la douleur, bloque l’accès du cimetière de Vauvenargues à la famille de l’artiste. En 1977, Marie-Thérèse Walter est retrouvée pendue dans son garage. Neuf ans plus tard, en 1986, Jacqueline Roque se tire une balle dans la tête après avoir travaillé sur la rétrospective de l’oeuvre de son époux, unique amour de sa vie disparu 13 ans plus tôt. Filles de l’imaginaire, ombres fidèles, fantômes en sursis, à quoi bon être muse si l’artiste n’est plus là ?
Comme tout génie, Pablo Picasso reste une énigme. À la fois sublime et vulgaire, généreux et égoïste, humaniste et chauvin. Violent et tendre, il a peint colombes et carnages, anges et démons. Son oeuvre immense suscite l’intérêt des foules et anime les musées du monde entier. Cet abandonnique hors norme a néanmoins eu besoin de neuf femmes pour que son génie explose. Il en a seulement épousé deux. Peut-être était-ce un clin d’oeil aux deux seules femmes qu’il a essayé d’aimer au-delà du miroir, au-delà de l’impossible : Maria sa mère et Conchita sa soeur ?

 

Claire Merlier

 

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