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La santé et la forme
dans Signes & sens
Identifié il y a une dizaine d’années par les professionnels de la santé, le burn-out parental est un état dépressif consécutif au fait d’être dépassé par son rôle de parent. Ce sont particulièrement les mères qui en sont affectées, étant traditionnellement plus en contact avec les jeunes enfants, mais les pères ne sont pas épargnés…
De plus en plus de parents consultent parce qu’ils craquent face au comportement de leur enfant. Phénomène de société ? Certainement mais le problème mérite amplement d’être signalé, ne serait-ce que pour pouvoir se donner les moyens de prévenir avant d’en arriver à des extrémités nécessitant un lourd arsenal médical.
Une perte d’autorité
C’est essentiellement dans leur rapport à l’autorité vis-à-vis de leurs petites têtes blondes que le bât blesse dans le burn-out parental. Ce sont pourtant en général des adultes responsables, à l’aise dans leur vie professionnelle, mais qui démissionnent devant leur progéniture. Ils ont la sensation que l’amour qu’ils donnent n’est pas payé en retour, l’enfant étant perçu au fil du temps comme un véritable petit monstre. Culpabilité aidant, la dépression s’installe avec ses conséquences invalidantes. Liliane Holstein, psychanalyste et auteur de l’ouvrage « Le burn-out parental », publié aux Éditions Josette Lyon, situe l’origine de cette situation à partir des années 1970. Selon elle, il s’agit d’une période à laquelle, en réaction à une éducation trop autoritariste, des personnalités de la psychologie et de la psychanalyse, comme Jean Piaget et Françoise Dolto, ont insisté sur l’importance de donner la parole aux enfants : Nous sommes passés d’un extrême à l’autre, explique la psychanalyste. Les parents ont trop souvent pensé que les enfants étaient des adultes en miniature et se sont laissé envahir par un manque de confiance dans leurs capacités d’adultes, dans leur manière de se faire respecter et de cadrer les enfants. Cette attitude a créé des catastrophes. Aujourd’hui, on paie les pots cassés. Les enfants deviennent de plus en plus odieux par provocation mais aussi par désespoir de ne pas avoir face à eux des parents suffisamment solides et charismatiques pour les protéger de leurs propres pulsions agressives inconscientes…
Les signes
Chez les mamans, les candidates au burn-out se repèrent en raison de la manifestation de quelques critères représentatifs. Le premier consiste en un désir de perfection. Il faut être à tout prix au top sur tous les fronts au niveau de la vie de l’enfant : école, éducation, relations, vacances, mode, santé… Il s’agit d’un véritable marathon de performances. Les réussites de l’enfant semblent être un faire-valoir de la propre réussite maternelle. Au point que ce type de maman ne se rend pas compte qu’elle s’épuise. C’est souvent l’entourage qui en prend conscience. Se met en place également et insidieusement une ambivalence de sentiments. L’amour et la haine alternent dans des comportements de surprotection, suivis d’une perte de contrôle lui faisant pousser des cris de colère inconsidérés. Une fatigue chronique s’installe tandis que le repos ne soulage plus. Les troubles du sommeil apparaissent, nécessitant la prise de somnifères et d’anxiolytiques. La spirale infernale est en route : troubles de l’humeur, plaintes récurrentes, attitudes dépressives… Le désir sexuel diminue et un désintérêt pour le conjoint est palpable. L’estime de soi est au plus bas et l’isolement devient la seule solution. On peut assister à une prise de poids ou à l’inverse. Ainsi, le burn-out endommage sérieusement la santé. Quant aux papas, le tableau n’est guère plus réjouissant : déprime, sensation de tristesse et de fatigue, fuite dans des comportements addictifs, tels que les jeux, le sport, l’alcool… Certains d’entre eux vivent leur travail comme une occasion d’échapper à leur famille et envisagent même une liaison…
Les solutions
Pour Liliane Holstein, il faut oser en parler. Les mères déclarent les symptômes en premier, explique-t-elle. Et plus elles sont épuisées, plus elles se fixent des challenges de plus en plus importants… Il faut ralentir le rythme et cesser de se fixer des objectifs impossibles. Il s’avère donc indispensable de rétablir un juste équilibre fait d’autorité, de tendresse et de cohérence comportementale. Dès que l’enfant arrive, poursuit la psychanalyste, il faut se simplifier la vie, arrêter de courir d’une activité à l’autre. Les enfants n’en demandent pas tant. Et elle conclut dans une interview accordée à l’hebdomadaire « Le vif » : Les parents iront mieux lorsqu’ils reprendront confiance en leurs compétences parentales et cesseront d’avoir peur de leurs enfants. Il faut juste écouter et retrouver le bon sens d’une vraie communication humaine, d’une bonne solidarité dans le couple…
Gérald Keskin
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