Le bébé ayant dès sa naissance une vie psychique, il est raisonnable de penser qu’il puisse lui aussi connaître des moments de « déprime ». Plaisir et déplaisir sont de toute façon le lot de l’être humain. La problématique du nourrisson, c’est qu’il ne possède pas encore la faculté d’exprimer verbalement son désarroi comme un enfant plus grand, un adolescent ou un adulte pourrait le faire…
Le docteur Pierre Delion, pédopsychiatre et auteur − entre autres − de « Périodes sensibles dans le développement psychomoteur de l’enfant de 0 à 3 ans », explique que si les états de mal-être de bébé sont passagers, cela fait partie de son développement normal. De quoi dédramatiser certaines situations et surtout déculpabiliser les mamans qui ont tendance à s’inquiéter facilement. C’est seulement lorsque le symptôme perdure qu’il convient de réagir.
Le bébé déprimé
Selon encore Pierre Delion, un bébé déprimé signale son anxiété principalement avec son corps. Lorsqu’un petit enfant perd peu à peu ses capacités interactives, on peut alors parler de véritable déprime. Les signaux d’alarme se manifestent par un appauvrissement de ses facultés psychomotrices. Il convient ici de consulter son pédiatre car le trouble peut aller, dans certains cas, jusqu’à ce que le docteur Delion nomme une désorganisation psychosomatique. Le bébé, donnant l’impression de se mettre en retrait permanent face à l’extériorité, devient sujet − de façon récurrente − à des infections ORL, ainsi qu’à toutes les formes d’affections spécifiques à cette période de la vie. Même si les exemples restent rares, il est donc indispensable de consulter, d’autant que si le bébé réellement déprimé est rapidement pris en charge, il va reprendre son développement sans aucun problème, rassure Pierre Delion. L’intervention se fait notamment en travaillant avec les parents de manière à ce que l’infans ne sombre pas dans ce que les pédopsychiatres nomment l’évitement relationnel.
Le mythe de la perfection parentale
Outre le tableau décrit précédemment à propos du bébé déprimé pour lequel il est légitime et même urgent de s’alarmer, les spécialistes de la psychologie de l’enfance mettent en garde contre le fait de vouloir à tout prix préserver son enfant. Un parent parfait, comme un bébé parfait, ça n’existe pas ! Laisser pleurer son enfant, après qu’il ait bénéficié de tous les soins nécessaires, ne signifie pas que le parent soit mauvais ou « insuffisamment bon »… Le stress de la vie quotidienne et la fatigue du travail font partie de l'existence de tout un chacun. Par voie de conséquence, il n’est pas souhaitable de supprimer constamment toute frustration au petit d’Homme. Bien au contraire : ce comportement pourrait installer une dépendance pernicieuse qui ne lui rendrait pas service. Tout enfant est capable de se confronter peu à peu à la réalité en apprenant à gérer sa propre anxiété, passage obligé pour devenir un individu autonome et heureux…
Valérie Vivet