Depuis la sonnerie du réveil matin jusqu’à l’émission de radio tardive, en passant par le stimulateur cardiaque, la pile électrique rythme nos temps modernes et nous serions bien en peine de nous passer de cette découverte scientifique datant du tout début du XIXème siècle.
Luigi Galvani (1737-1798), devenu médecin puis physicien, après s’être intéressé à la théologie, est le premier à observer, en 1786, que les muscles d’une cuisse de grenouille se contractent quand celle-ci est mise en contact avec des métaux, de la même manière que lorsqu’on la branche sur une machine électrostatique. Il découvre que la réaction est plus forte quand on utilise un instrument composé de deux métaux différents. Ce scientifique ouvre ainsi l’accès à une utilisation large de l’électricité. À partir de son observation, le physicien Alessandro Volta (1745-1827) aura l’intuition que la production d’électricité est liée à la présence de métaux différents, reliés par un conducteur (la cuisse). Il invente alors en 1800 la première pile électrique (pile à colonne), en remplaçant la cuisse par du carton imbibé d’eau salée. Il s’agissait d’un empilement de disques de deux métaux différents séparés par des disques de feutre, imbibés d’acide. Napoléon Bonaparte, après avoir assisté à la présentation de l’invention devant l’Institut de France, fait décerner à Volta une médaille d’or, le nomme comte et sénateur du royaume de Lombardie. Depuis cette époque, de nombreuses améliorations ont été apportées mais notre société se trouve aujourd’hui confrontée à l’envers de la médaille : les métaux parfois toxiques, constituants des piles, restent toujours actifs même si l’on ne s’en sert plus !
Des déchets dangereux
Malgré les immenses avantages que nous apporte l’utilisation de piles (environ 300 euros de budget annuel par ménage), notre époque est soumise à un problème d’ordre écologique et sanitaire. L’emploi du mercure, par exemple, est interdit depuis décembre 1998 en Europe (directive 98/101/CE) et aux États-Unis, en raison de problèmes environnementaux. Le plomb, reconnu pour être un poison, fait aussi partie des composants de la pile. Outre des métaux comme le nickel, le fer, le zinc, le lithium, il en est un qui devrait attirer particulièrement notre vigilance : le
cadmium. Cet élément chimique présente des propriétés proches de celles du zinc. Lors de l’ébullition du cadmium, il se dégage des vapeurs jaunes toxiques. Connu depuis les années 50, ce métal est particulièrement dangereux et ceci sous toutes ses formes (métal, vapeur, sels, composés organiques). Il est l’un des rares éléments n’ayant aucune fonction connue dans le corps humain ou chez l’animal. Chez l’Homme, il provoque notamment des problèmes rénaux et l’augmentation de la tension. C’est ainsi que vers 1500, au Japon, une intoxication aigüe au cadmium provoqua une maladie des reins et des os, nommée
itaï-itaï (qui signifie
j’ai mal, j’ai mal, la phrase souvent répétée par les malades).
Des solutions
En France, les vendeurs qui commercialisent des piles et des batteries sont tenus de les reprendre gratuitement une fois inutilisables. En Suisse, une taxe comprise dans le prix de vente finance le recyclage. Le processus reste toutefois lent et le taux de piles collectées demeure insuffisant en France. Pourtant, la Communauté Européenne a adopté une directive en 1991 qui prévoit la collecte des piles contenant du plomb, du cadmium et du mercure. Puis, en 1999, elle a adopté une autre directive qui interdit la mise sur le marché de piles contenant plus de 5 ppm (particule par million) de mercure. La France a devancé ces nouvelles obligations avec le décret de 1999 qui rend obligatoire la collecte de toutes les piles depuis 2001. Ainsi, les revendeurs de piles grossistes ou détaillants ont désormais l’obligation de procéder à la collecte des piles usagées, rapportées par les consommateurs en vue de leur recyclage. Une solution raisonnable semble cependant pointer son nez : le rechargement des piles. Outre son aspect économique, elle permettrait de mettre un frein bénéfique à l’escalade de la pollution, tout en conservant le non négligeable confort de pouvoir écouter sa station ou son disque préférée entre deux rendez-vous. De quoi
se recharger d’énergie !
Docteur Laurence Pescay