Depuis notre plus tendre enfance, nous rêvons d’évasion, de conquête, de grand large. Arthur Rimbaud à travers son célèbre poème « Le bateau ivre » a magnifiquement traduit cet appel de l’âme. Le navigateur Bernard Moitessier, dans son ouvrage « La longue route » publié aux éditions Arthaud, a témoigné pour sa part de cette expérience existentielle au travers de laquelle « l’Homme, son bateau et les éléments se pénètrent et vibrent à l’unisson »… Tour d’horizon sur une pratique.
Le premier voilier serait né il y a plus de 5000 ans. Un homme, vraisemblablement fatigué de pagayer, a alors l’idée de dresser une branche d’arbre avec ses ramures et ses feuilles. Il laisse ainsi au vent le soin de pousser son embarcation. Une des représentations les plus anciennes d’un bateau à voile nous vient d’Égypte. Il s’agit d’une pirogue en papyrus. Lorsque les hommes disposaient de gros arbres, ils creusaient leur canot dans un tronc. Pour éviter de chavirer, ils l’équilibraient à l’aide d’une grosse branche, formant une seconde coque : la pirogue à balancier est en fait l’ancêtre du catamaran. Que de chemin parcouru depuis ! La navigation à voile ne cesse de se perfectionner au fil du temps. Pourtant, la lente évolution du gréement oblige les navigateurs à ramer encore pendant quelques siècles. En effet, le vent propulse le bateau lorsqu’il vient de l’arrière et gonfle la voile carrée. Mais lorsque la brise est contraire, il faut carguer ou rouler la voile et avancer à l’aide d’avirons. Ce n’est qu’à partir du XIIème siècle qu’on commence à expérimenter la voile latine, voile triangulaire qui permet d’aller contre le vent. L’art de la navigation à voile acquiert définitivement ses lettres de noblesse au XVIème siècle. Le galion compose à cette époque la plupart des flottes des pays d’Europe. Navire gréé de trois ou quatre mâts, il explore les mers et transporte les richesses des pays conquis.
Marre de ramer !
Il est intéressant de mettre en miroir cette formidable adaptabilité de l’Homme aux éléments. Psychologiquement, lorsque nous avons l’impression de ne pas avancer, nous utilisons l’expression Je rame. Il arrive d’ailleurs un moment où la situation ne peut plus durer. Nous avons effectivement besoin d’air pour accéder à des horizons nouveaux. Et celui-ci est toujours à notre disposition, attendant que nous le prenions en compte pour que notre créativité se déclenche. Alors que l’élément eau renvoie à un principe féminin passif, l’élément air renvoie à un principe masculin actif. Le philosophe Gaston Bachelard, dans son ouvrage « L’air et les songes », paru aux éditions Le Livre de Poche, écrit : Avec l’air, le mouvement prime la substance. Alors, il n’y a substance que s’il y a mouvement. Le psychisme aérien nous permettra de réaliser les étapes de la sublimation... Autrement dit, si avancer est d’une importance primordiale, la nature est une alliée incontournable au service de notre évolution aussi bien matérielle que spirituelle, voire ontologique, pour peu que nous utilisions les éléments qu’elle met à notre disposition.
Christine Merlin
De voile en voile, bon vent !
Aujourd’hui, la navigation à voile ne correspond plus à un besoin économique. D’autres moyens de propulsion l’ont largement remplacée. Cependant, elle fait de plus en plus d’adeptes. À croire que nos contemporains ont besoin de retourner à cette confrontation essentielle avec les éléments. Confrontation dont tout un chacun peut faire l’expérience quel que soit son désir, du simple plaisir de vacances à la passion des aventuriers de l’inutile… - La planche à voile : cette pratique consiste à naviguer debout, en équilibre sur un flotteur, grâce à une voile qui en assure la propulsion. Bien qu’étant la forme la plus simple d’embarcation à voile, la planche a conquis un large public. Il est vrai que vous pouvez la transporter sur le toit de votre voiture et mettre les voiles facilement ! - Le dériveur : il s’agit d’un petit bateau sans quille, muni d’un aileron sous la coque pour résister à la poussée latérale d’une dérive (sorte de quille relevable), pouvant embarquer de une à quatre ou cinq personnes. Il est utilisé pour la simple promenade mais aussi pour la compétition en régate. Le plus basique, l’Optimist, est destiné aux enfants. Idéal toutefois pour vous initier aux manœuvres sans trop de risques, si vous n’avez pas encore lâché les amarres. - Le catamaran : c’est un bateau à deux coques. Il permet d’aller plus vite, d’améliorer la stabilité, d’augmenter la surface du pont. Il est principalement utilisé en tant que voilier de plaisance. Nécessitant des compétences certaines, le catamaran est un bateau multicoque. Le trimaran possède, lui, trois coques. Il existe bien sûr de multiples modèles d’embarcation et il s’en trouvera certainement un qui s’adaptera à votre soif de liberté. N’hésitez donc pas à contacter la Fédération Française de Voile ou tout autre organisme sérieux qui saura vous diriger vers un cap en adéquation avec la façon dont vous désirer voguer ! Mais sachez toutefois qu’on ne met pas les voiles sur un coup de tête. Pratiquer cet art de vivre demande rigueur et élaboration. Alors oui, ayez de l’audace mais une audace « calculée » pour que le plaisir soit authentique… et que le vent soit bon !